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Qui veut tuer la presse sénégalaise?

POLITIQUE
Mercredi 7 Août 2024

Depuis quelques mois, les entreprises et organes de presse sont confrontés à une crise sévère, marquée par le blocage des comptes bancaires, des demandes de paiement de dettes fiscales par la Direction générale des impôts et des domaines, la suspension de conventions entre médias et départements ou structures étatiques, ainsi que des menaces de coupure de signal de télévision en cas de retard de paiement des redevances. Ces mesures mettent de nombreux médias au bord de l'asphyxie. La situation est préoccupante, avec un risque élevé de faillite pour plusieurs organes de presse. Les répercussions d'une telle crise sur le secteur médiatique sont considérables et inquiétantes.


Qui veut tuer la presse sénégalaise?
« Il n'y a pas de société démocratique sans une presse libre et pluraliste », déclarait l'ancien Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies (ONU), Kofi Annan, lors de la Journée mondiale de la liberté de la presse le 2 mai 1997 au siège de l'ONU à New York. Il soulignait que cette journée, instaurée quatre ans auparavant par l'Assemblée générale de l'ONU, célèbre le droit à la liberté d'opinion et d'expression et réaffirme qu'une société démocratique ne peut exister sans une presse libre, indépendante et diversifiée. Cette déclaration résonne avec celle de Thomas Jefferson, rédacteur principal de la Déclaration d'indépendance des États-Unis, qui, en 1776, affirmait qu'il n'y avait pas d'alternative à la liberté de la presse. En 1787, Jefferson écrivait : « Notre gouvernement repose sur l'opinion de notre peuple. Le premier objectif devrait être de maintenir ce droit. Et si on me demandait de choisir entre un gouvernement sans journaux ou des journaux sans gouvernement, je n'hésiterais pas un instant à choisir la seconde option. » Cette vision reste pertinente aujourd'hui.

Cependant, au Sénégal, la presse, toujours centrale dans la vie démocratique, traverse des difficultés croissantes. Depuis plusieurs mois, des entreprises de presse se trouvent en grande difficulté, avec des risques de faillite si la situation perdure. Dernièrement, le groupe « Africaine Communication Edition » (AFRICOME) a annoncé la suspension de ses quotidiens « Sunu Lamb » et « Stades », illustrant les difficultés financières du secteur.

« Depuis deux ans, AFRICOME subit des déficits importants, des dettes considérables envers ses fournisseurs (notamment étrangers pour les intrants), des retards de paiement des salaires, et l'arrêt des paiements des cotisations sociales et des frais de couverture maladie », a déclaré Mamadou Ibra Kane, Directeur de publication des deux quotidiens. Il a également averti que cette crise n'est pas isolée à AFRICOME et que d'autres entreprises médiatiques sénégalaises sont en danger. Depuis l'arrivée du nouveau régime, de nombreuses entreprises de presse font face à une intensification de la crise, exacerbée par des pressions fiscales croissantes.

Les nouvelles autorités cherchent à recouvrer 13 milliards de dettes fiscales et 25 milliards pour les redevances dues à l'Agence de régulation des télécommunications et de la poste (ARTP) auprès des médias. Cela a entraîné des mises en demeure et des blocages de comptes bancaires de certains groupes de presse. Le Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse (CDEPS) a tenté de trouver des solutions face à cette situation. En plus de la pression fiscale, les conventions entre les médias et les structures publiques ont été suspendues, aggravant ainsi la situation déjà critique des médias, dont une grande partie des revenus provient de la publicité et des accords de partenariat.

Par ailleurs, la Société de télédiffusion du Sénégal (TDS.SA) est en conflit avec Excaf Télécom, qui avait investi dans la Télévision numérique terrestre (TNT). TDS.SA a annoncé son retrait de l'exploitation technique des multiplex gérés par Excaf Télécom depuis 2014. Excaf Télécom conteste cette décision et menace de défendre ses droits par tous les moyens légaux. En parallèle, TDS.SA a menacé de couper le signal de Walf TV et d'autres chaînes en cas de non-paiement d'une somme de 10.820.000 francs CFA, représentant les frais de diffusion sur la TNT. 

La presse est ainsi en train de subir une véritable asphyxie financière, avec des conséquences directes telles que des licenciements et une aggravation du chômage, en particulier parmi les jeunes qui entrent chaque année sur le marché du travail.

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