Et le PM, édifié sur la teneur des questions, n'a pas flanché pour répondre aux députés puisque les réponses étaient préparées à l'avance. Vu le contexte assez tendu par "l'affaire Khalifa Sall" qui prend des proportions de plus en plus alarmantes, vu l'opinion de plusieurs Sénégalais qui considèrent que l'embastillement du maire de Dakar est sous-tendu par des règlements de compte politiques, il était impératif voire impérieux pour le chef du gouvernement d'édifier le peuple sur la légalité de l'arrestation de Khalifa Sall.
Ainsi, l'incarcération du maire de Dakar a ravi la vedette aux autres sujets d'actualité. D'ailleurs, cette sortie du gouvernement n'était qu'un prétexte pour en parler de long en large et gagner éventuellement une partie de l'opinion qui, pour la plupart, assimile l'emprisonnement de Khalifa Sall comme une épreuve de force pour briser la carrière d'un adversaire politique qui guigne le fauteuil présidentiel.
Ainsi, à l'instar du procureur de la République, Serigne Bassirou Guèye, qui s'est épanché sur le sujet avant le mandat de dépôt de l'édile de Dakar, Boun Dionne a passé en revue le budget de la mairie de la Capitale de façon circonstanciée comme pour dire que les fonds politiques n'existent pas dans le budget de la municipalité de Dakar, contrairement aux dires de son chef, lequel a soutenu que les 30 millions mensuels dégagés de la caisse d'avance sont, en réalité, des fonds politiques.
D'ailleurs, lors de la dernière intervention du PM qui répondait à la question du président du groupe parlementaire Bennoo Bokk Yaakaar, Moustapha Diakhaté, relative à "l'affaire Khalifa Sall", un incident s'est produit. En effet, le député Barthelemy Dias a stoppé net le PM qui se livrait à une véritable explication détaillée de la légalité de l'arrestation de Khalifa Sall. Le bouillant et tonitruant député n'a pas barguigné pour dire au PM que l'Assemblée nationale n'est pas une juridiction et que ce dernier n'avait pas à se prononcer de la sorte comme un procureur ou un juge.
Cette interruption "inélégante" a poussé Moustapha Niasse, chef de l'institution parlementaire, à sortir hors de ses gonds pour vitupérer Barthelemy et le faire taire sous peine de lui appliquer les articles 53 et 57 du Règlement intérieur de l'Assemblée nationale même s'il a avoué, par la suite, qu'il ne ferait jamais recours aux forces de l'ordre pour expulser de l'Hémicycle un député insoumis à l'ordre régnant. Le PM, comme en mission commandée, tenait vaille que vaille à poursuivre sa séance d'explication.
Pour finir sur le "cas Khalifa", Boun Dionne a réitéré que le Président continue de mettre sous le coude le dossier du Fesman "pour des raisons que nul n'ignore". Si cela concerne les membres de la famille présidentielle Wade, ils sont justiciables comme les autres citoyens sénégalais. Karim Wade n'est-il pas condamné par la Cour de répression de l'enrichissement illicite (CREI)? Donc si Sindiély a failli dans la gestion du Fesman, elle doit rendre compte. A moins que tout cela ne soit qu'un prétexte fallacieux pour amortir la condamnation de Wade fils.
Pourtant dans son intervention, le PM a avoué que le Président est impartial dans le traitement des dossiers qui épinglent la gestion de certains citoyens qui ont eu à exercer des responsabilités publiques. Où est donc cette justice indépendante, équitable et impartiale qui était le leitmotiv de Boun Dionne hier à l'Assemblée ?
Serigne Saliou Guèye