Trump continue l'offensive. Après s'être attaqué au droit à l'avortement en interdisant le financement américain d'ONG soutenant l'IVG, il s'en prend désormais aux immigrés et aux réfugiés. Dans un décret entré en vigueur vendredi soir, le 55e président des Etats-Unis a ainsi interdit pendant trois mois l’entrée aux Etats-Unis de ressortissants de sept pays musulmans : Irak, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen. Tous les Syriens sont, eux, interdits d’entrée sur le territoire américain jusqu’à nouvel ordre. Il s’agit de «nouvelles mesures de contrôle pour maintenir hors des Etats-Unis les terroristes islamiques radicaux», a-t-il indiqué.
Ces mesures, qui ont provoqué un tollé aux Etats-Unis, ont étaient accueillies avec stupeur par les représentants politiques du monde entier.
L’Iran, un des pays visés par le décret et qui a décidé d’appliquer une mesure de réciprocité, a une nouvelle fois dénoncé dimanche une «discrimination». La mesure du président américain «sera perçu dans l’histoire comme un grand cadeau aux extrémistes et à leurs protecteurs», avait réagi un peu plus tôt dans un tweet le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif.
Parmi les Etats pays concernés, le Yémen. Le gouvernement dirigé par les rebelles chiites Houthis à Sanaa, non reconnu par la communauté internationale, a dénoncé quant à lui comme «illégale» la décision du président américain Donald Trump.
Stupéfaction en Europe
En Europe, plusieurs pays dont la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne, ont aussi critiqué la nouvelle approche américaine en matière d’immigration.
Le président François Hollande a mis en garde samedi soir son homologue américain contre «le repli sur soi» et l’a appelé au «respect» du principe de «l’accueil des réfugiés», fondement de «nos démocraties», selon un communiqué publié par l’Élysée.
Angela Merkel a, elle, fait savoir ce dimanche par le biais de son porte-parole que ce décret est «non justifié». «Elle est convaincue que même dans le cadre de la lutte indispensable contre le terrorisme il n’est pas justifié de placer sous une suspicion généralisée des gens en fonction de leur origine ou croyance», a dit le porte-parole cité par l’agence de presse DPA.
La Première ministre britannique, Theresa May, qui a rencontré vendredi à Washington le président américain, n’est «pas d’accord» avec les restrictions à l'immigration et interviendra si elles touchent des citoyens britanniques, a indiqué aujourd'hui un porte-parole de Downing Street. Quelques heures auparavant, elle avait pourtant provoqué la polémique dans son pays en refusant de critiquer l’initiative américaine lors d’une conférence de presse durant un voyage en Turquie, disant que c’était à Washington de prendre ses responsabilités sur sa politique sur les réfugiés.
Dans une interview diffusée ce samedi, le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a de son côté déclaré que cette mesure allait renforcer «la haine envers l'Occident».
Au lendemain de la décision de la Maison Blanche, le Premier ministre canadien Justin Trudeau avait, lui, affirmé la volonté de son pays d’accueillir les réfugiés «indépendamment de leur foi». «A ceux qui fuient la persécution, la terreur et la guerre, sachez que le Canada vous accueillera indépendamment de votre foi», a-t-il tweeté. «La diversité fait notre force #BienvenueAuCanada», a-t-il ajouté.
Le président tchèque charmé par Trump
Seul le président tchèque Milos Zeman fait figure d'exception en félicitant la nouvelle approche américaine de forte restriction de l’immigration conduite par Donald Trump, jugeant que ce dernier ne faisait qu’assurer la sécurité de ses concitoyens. «Le président américain Trump protège son pays, il est soucieux de la sécurité de ses citoyens. Exactement ce que les élites européennes ne font pas», a tweeté le porte-parole du président tchèque, Jiri Ovcacek. «La sécurité des citoyens tchèques est une priorité. Maintenant nous avons des alliés aux Etats-Unis», a ajouté le porte-parole.
Quoiqu'il en soit, la mobilisation et les actions en justice laissent augurer un long bras de fer entre les défenseurs des immigrés et l’administration Trump. Les défenseurs des droits civiques ont d’ailleurs remporté une première manche en obtenant d’un juge fédéral le blocage des expulsions des dizaines de passagers musulmans interpellés à leur arrivée. «C’est la première salve d’une longue bataille devant les tribunaux», estime Michael Kagan, spécialiste du droit de l’immigration à l’Université du Nevada. Pour ce juriste, l’issue de cette bataille devant les tribunaux est incertaine car elle est «sans précédent dans l’histoire récente américaine».
Tout dépendra de l’attitude des juges et pourrait remonter jusqu’à la Cour suprême, qui n’a pas eu à trancher sur des affaires d’immigration de ce type depuis la Loi sur l’exclusion des Chinois adoptée en 1882. A l’époque, la loi avait interdit pendant plusieurs décennies l’entrée sur le territoire américain de tous les ressortissants chinois.