L a boutade, apocryphe ou non, est attribuée à Kader Boye : « Le Sénégal est un pays à irresponsabilité illimitée ». L’éminent juriste pointait alors la capacité presque infinie de notre société à se mouvoir dans un laxisme, voire un « je-m’en-foutisme » qui défie l’entendement. Un comble vient d’être franchi avec l’organisation des élections législatives de ce dimanche. Un scrutin parti pour être l’un des plus controversés de l’histoire politique récente du pays. La responsabilité du ministre de l’Intérieur est engagée au premier chef dans ce chaos noté dans la distribution des cartes d’électeur par la Direction générale des élections. Au point d’obliger le Président de la République à s’adonner à des arguties juridiques par la saisine du Conseil Constitutionnel, appelé à la rescousse par un pouvoir exécutif affolé pour sauver les meubles. Un coup de canif de plus assené à la crédibilité d’une institution qui n’aura pas brillé par son attachement scrupuleux à la règle de droit et dont l’image était déjà fortement écornée au sein de l’opinion. Quel que soit le résultat sorti des urnes, le Sénégal risque de plonger dans un contentieux électoral lourd de menaces pour sa stabilité. Pour un pays qui se targue d’avoir réussi deux alternances exemplaires, ce grand bond en arrière est pathétique.