Le 28 septembre, comme chaque année à cette date, depuis la proclamation de celle-ci par l’UNESCO en 2015, le monde célèbre la Journée internationale de l’accès universel à l’information. Une journée en faveur autant pour le journaliste que pour le public. ‘’Il s’agit d’un droit à la fois actif et passif : d’une part, la recherche de l’information et, d’autre part, la possibilité pour tous de la recevoir’’.
En d’autres termes, ‘’le droit à l’information est le droit fondamental de l’individu et de la collectivité de savoir et de faire savoir ce qui se passe et ce que l’on a intérêt à connaître’’, comme l’explique la COREDEM (Communauté des sites ressources pour une démocratie mondiale). Droit à l’information et droit d’informer, donc.
Au Sénégal, cette journée a été l’occasion pour Article 19, ONG britannique de défense de la liberté d’expression, d’appeler le gouvernement de ce pays à se doter d’une loi consacrant le droit à l’accès à l’information. ‘’Il appartient donc à l’État et aux administrations de veiller (au) respect de cette loi), notamment en matière d’accès aux documents publics, rapporte l’agence de presse en ligne PressAfrik.com. Pourtant, bien que considéré comme droit fondamental, il renvoie davantage à des valeurs et est susceptible d’une pluralité d’acceptation de son sens, et donc de sa sanction. Il est, de plus, limité par le respect des autres droits fondamentaux’’.
‘’En effet, renchérit le portail Leral.net, dans un article consacré à la question le 29 septembre 2015, ‘’au Sénégal, malgré la consécration du droit à l’information plurielle par la Constitution, il n’existe pas de loi sur l’accès à l’information. Et ce jour-là, le juriste Ismaïla Madior Fall, alors ministre conseiller juridique du chef de l’Etat, actuel ministre de la Justice, relevait ‘’les avantages escomptés de l’adoption d’une loi sur l’accès à l’information’’.
Il cita, entre autres avantages, ‘’la conformité de la législation des citoyens devant la loi, la lutte contre la corruption, le renforcement de l’obligation de rendre compte, etc.’’.
En regardant les journaux des chaînes de télévision des démocraties avancées, on est séduit par la facilité avec laquelle les reporters recueillent les réactions des ministres, PDG et bien d’autres hautes personnalités.
Ce qui n’est pas encore le cas au Sénégal où tous les prétextes sont opposés au journaliste soucieux d’exercer un droit d’informer, d’accès à l’information destinée au public qui a droit de connaître la vérité. ‘’Vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres’’, comme enseigne Saint Jean l’Evangéliste dont ce verset est érigé en devise par des journaux américains, européens...
L’entourloupe la plus retardante, la plus aberrante est celle consistant à demander au journaliste ou à son organe d’écrire à l’autorité de tutelle du détenteur de l’infirmation pour demander à ce dernier l’autorisation de donner l’information.
Et le pauvre journaliste se mettra toujours à attendre le bon monsieur Godot qui ne viendra jamais. Dans la plupart des cas, pour peu que le journaliste veuille se plier à cette condition, il n’y a aucune suite à sa requête. Une manière de fermer l’accès à une information à laquelle le journaliste et son public ont droit.
N’oublions pas ces fourre-tout ‘’information sensible’’ et ‘’secret défense’’ qui sont d’une telle complexité qu’un séminaire lui a été consacré les 13 et 14 mai 1995 par un gouvernement sénégalais confronté au contenu des articles de presse nationale sur la guerre en Casamance. Une rencontre initiée par la Direction de l’information et des relations publiques de l’armée (DIRPA).
‘’Ce séminaire travailla à partir d’une communication préliminaire présentée par le Pr Djibril Samb, rappelle le chercheur et universitaire Momar Coumba Diop dans son livre ‘’Le Sénégal à l'heure de l'information : technologies et société’’ (éditions Karthala), placé sous l’égide de l’Etat-major particulier du président de la République, avait regroupé, en plus des hauts fonctionnaires de la défense nationale, des représentants des corps constitués, des membres du gouvernement, du Syndicat des professionnels de l’information et de la communication du Sénégal (SYNPICS) et de la plupart des organes de presse’’.
Un peu plus de vingt ans après ce fameux séminaire, le 15 juillet 2015 précisément, Alioune Badara Fall, Directeur de publication du journal ‘’L'Observateur’’, et son journaliste Mamadou Seck étaient convoqués à la section recherches de la gendarmerie à Dakar et questionné pendant plusieurs heures. Il leur était reproché d'avoir publié des informations concernant le déploiement des troupes sénégalaises en soutien des opérations au Yémen et sont, à ce titre, accusés de "violation de secret défense".
Tant que ces prétextes, allégations, arguties et autres sont des obstacles à l’accès universel à l’information et tant qu’ils ne seront pas levés, il n’y aura jamais cette transparence et cette bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques.
Des affaires privées aussi… ‘’Il n’y a pas toujours dans nos entreprises le réflexe d’organiser l’information et de la rendre publique aux citoyens’’, déplorait le Pr Ismaïla Madior Fall en septembre 2015. Et depuis lors, et depuis toujours, rien n’a changé. Ou si peu !