A la fin de son audition par la gendarmerie, on lui a signifié son placement en garde à vue. La poursuite de Pape Sané pour diffusion de fausses nouvelles est basée sur une publication sur sa page Facebook intitulée «Les Sénégalais ne vous oublieront jamais», dans laquelle il a republié un article daté de 2021 rendant hommage au Général Tine, commandant de la gendarmerie nationale. «Nous demandons aux autorités du Sénégal à libérer le journaliste Pape Sané sans condition et abandonner toutes les charges contre lui.
Arrêter un journaliste pour avoir exprimé une opinion critique pousse les médias vers l'autocensure, limitant ainsi le droit du public à l'information et la liberté de la presse», a dit Alfred Nkuru Bulakali, directeur régional d’Article 19 Sénégal et Afrique de l’Ouest. Pour lui, au lieu de réprimer la liberté d'expression, «les autorités devraient promouvoir un haut niveau de tolérance pour différentes opinions sur leurs actions et leur conduite, y compris les opinions critiques, telles que recommandées par les principes de la commission africaine des droits de l’homme et des peuples sur la liberté d’expression et l’accès à l’information.
Elles devraient également favoriser une culture de transparence et un environnement médiatique pluraliste et indépendant, garantissant ainsi au public une pluralité d'informations et d'opinions». L’ONG dit avoir documenté le cas de plusieurs autres journalistes et activistes qui ont été emprisonnés et accusés de diffuser de «fausses informations», en vertu de l’article 255 du code pénal sénégalais et réitère ainsi son appel à l’abroger.
«Le droit international des droits de l’Homme, y compris l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), stipule que ‘toute restriction à la liberté d’expression doit être prescrite par la loi, poursuivre un ou plusieurs objectifs légitimes, et être nécessaire (exigeant qu’il doit y avoir un besoin social pressant motivant la restriction) et proportionnée à l’objectif légitime poursuivi», indique Article 19.
A l’en croire «l'article 255 ne satisfait pas à ce test en trois parties. Le terme ‘fausses nouvelles’ est très large, vague et ouvert à différentes interprétations. Pour répondre à l'exigence de légalité, les définitions dans les lois pénales doivent fournir autant de clarté que possible en détaillant exactement ce qui est interdit. L'article 255 confère ainsi un pouvoir discrétionnaire excessif à ceux chargés de faire respecter la loi. Ceux qui sont soumis à la loi doivent être à mesure de réguler leur comportement avec certitude, cela n’est possible que si la loi définit ce qui est interdit avec clarté, ce qui n’est pas le cas de l’article 255 du code pénal», explique le directeur.