."Moi, ça m'étonne que le ministre de la Justice, qui est tout de même professeur de droit, puisse tenir de tel propos. Mais en tout état de cause, je considère que notre système judiciaire, c'est totalement incongru de parler de risque de gouvernement des juges", déplore-t-il dans un entretien accordé au quotidien le Témoin.
Le magistrat est revenu sur les travaux du Comité de concertation sur la modernisation de la Justice présidé par le professeur Isaac Yankhoba Ndiaye, " Le ministre (de la Justice, nous a donné l’assurance que la cérémonie de remise officielle du rapport du chef de l’Etat allait être organisée dans les semaines qui suivent". Six mois sont passés et les lignes n’ont pas bougé.
"Nous attendions donc la tenue de cette cérémonie afin d’entendre, de vive voix, le président de la République se prononcer sur la question. Aujourd’hui, le délai raisonnable d’attente est largement dépassé", s’impatiente le juge Téliko, qui n’a pas manqué de fustiger que le ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, révèle à deux reprises certaines "propositions issues des travaux du Comité" alors qu’il avait demandé aux membres de "ne pas divulguer le contenu du rapport" des concertations.
Souleymane Téliko explique que les recommandations ne sont pas les réponses que le comité a cru devoir apporter au mal diagnostiqué. A cet égard, il rappelle qu'à l'issue des différentes journées de réflexions évoquées plus haut, l'Ums avait fait un diagnostic qui faisait ressortir deux choses :
- l'ineffectivité des garanties de l'indépendance de la justice que sont le principe de l'inamovibilité et le conseil supérieur de la magistrature (Csm). Le premier étant vidé de sa substance par le recours fréquent aux notions de nécessité de service et intérim. Quant au Csm, il a été jugé inapte à garantir une gestion autonome et transparente de la carrière des magistrats eu égard à sa composition, à son mode de fonctionnement et à ses attributions.
- la dépendance du parquet, vis-à-vis du ministère de la Justice qui rend possibles les immixtions du ministre de la Justice dans le traitement des affaires judiciaires. Du fait de cette dépendance, un citoyen peut être poursuivi, mis sous mandat de dépôt et maintenu pendant plusieurs mois en détention par la seule volonté du ministre de la Justice donc de l'exécutif.