Si on se fie au rang protocolaire et au plan stratégique, Ali Ngouille Ndiaye monte en grade en récupérant le ministère de l’Intérieur. Mansour Elimane Kane s’empare du juteux ministère du pétrole. Moustapha Diop, quitte la Micro-finance pour occuper un portefeuille plein avec le ministère de l'Industrie et des PMI. Mame Mbaye Niang va occuper le ministère du Tourisme tandis que son camarade de parti, Pape Gorgui Ndong, récupère son ministère qui est celui de la Jeunesse, de la Construction Citoyenne et de la Promotion du Volontariat.
Les départs
Il faut noter que les ministres et secrétaires d’Etat au nombre de huit qui ont quitté le gouvernement n’ont pas de base politique. Et les plus départs les plus remarquables sont ceux de Mankeur Ndiaye aux Affaires étrangères et d’Awa Marie Coll Seck. Mais au vu des revers diplomatiques du Sénégal au niveau de l’Union africaine, des rapports tendus avec les voisins, de la mauvaise gestion des problèmes de la diaspora avec les rapatriements à outrance de nos compatriotes, des difficultés du Sénégal pour entrer dans le G-5 Sahel, il n’est point surprenant de voir Mankeur quitter le gouvernement. Awa Marie Coll Seck est emportée la radiothérapie dont souffre nos hôpitaux. Il est inadmissible que le Sénégal ne dispose que d’une vieillotte radiothérapie qui date des années 90. En sus, le secteur est devenu très instable avec les remous syndicaux récurrents.
D’ailleurs, si ce n’était pas le respect du principe des équilibres avec les alliés, le socialiste Serigne Mbaye Thiam ne devait pas rester à la tête de ce ministère très trouble. Viviane Laure Bampassy, pour avoir accusé beaucoup de lenteurs dans la production des actes de reclassement, de validation et d’avancement des fonctionnaires surtout des enseignants, quitte le ministère de la Fonction publique, de la Rationalisation des effectifs et du Renouveau du service public au profit de Mariama Sarr. Même si des machines nouvelles ont été commandées, entre-temps plusieurs malades du cancer ont été emportés par leur mal en l’absence de la machine même si des efforts ont été effectués pour en évacuer certains au Maroc. Youssou Touré et Yakham Mbaye plient bagage pour manque de compétence. Diène Faye, qui n’a été que l’ombre de lui-même, disparait tel qu’il a géré son secrétariat d’Etat.
Les entrants
Ils sont neuf nouveaux à avoir été appelés au gouvernement de Boun Dionne. Mais à des postes plus ou moins importants. Ismaila Madior Fall, qui est le conseiller juridique du Président et missi dominici de sa Majesté est promu Garde des Sceaux, Ministre de la Justice. Il occupe un secteur à problème quand on sait que depuis 2012, c’est le ministère le plus décrié avec les affaires Karim Wade, Khalifa Sall et l’indépendance de la justice.
Ndèye Saly Diop Dieng, femme de l’actuel DG de la Suneor, est nommée ministre de la Femme, de la Famille et du Genre. Samba Sy, patron du PIT, remplace son camarade de parti au ministère du Travail, du Dialogue Social, des Organisations Professionnelles, des Relations avec les Institutions. Abdou Latif Coulibaly quitte le secrétariat général du gouvernement pour atterrir à la Culture qui devient un département plein. Aissatou Sophie Gladima, ancien ministre sous le régime de Wade, occupe les Mines et de la Géologie. Mame Thierno Dieng, brillant dermatologue devient ministre de l'Environnement et du Développement Durable. Abdoulaye Diop est nommé ministre de l'Emploi, de l'Insertion Professionnelle et de l'Intensification de la Main-d’œuvre. Ndèye Ramatoulaye Guèye Diop devient ministre de la Bonne Gouvernance et de la Protection de l'Enfance. On note aussi l’entrée d’Aminata Angélique Manga nommée ministre de la Solidarité et de la Microfinance.
La parité loin d’être respectée
Si au niveau de l’Assemblée nationale et des autres institutions, on respecte la parité, il n’en est pas toujours pour le respect de la parité. Sur 39 ministres, il n’y en a que 8 femmes qui occupent des ministères de seconde zone. Au rang protocolaire, la première femme apparait à la 9e place avec Mariama Sarr.
L'équilibre des forces est-il maintenu ?
Le grand perdant de ce remaniement est sans doute les transhumants et les alliés du président de Macky 2012 qui n’ont rien obtenu. Le PS et l’AFP, le PIT et la LD conservent leurs ministères. Ni plus ni moins. Le président n’a pas jugé utile de les renforcer ni de les délester au risque de créer des frustrations de part et d’autre. Sur les 39 ministres, seuls deux catholiques y figurent (Augustin Tine et Aïssatou Sophie Gladyma). Concernant les équilibres régionaux, il faut souligner que la région de Diourbel est laissée en rade. Elle perd Khadim Diop même si Mame Thierno Dieng se révèle être le médecin du khalife des mourides. La ville de Thiès qui s’attendait à une promotion d’un de ses fils doit être déçue puisque le président n’a pas jugé utile de combler le déficit laissé par le départ de Thierno Alassane Sall. Le président n’a pas appliqué la règle de sanction brandie en cas d’échec ou de victoire aux législatives sinon Ciré Dia serait récompensé pour avoir gagné Thiès et Abdoulaye Bibi Baldé limogé pour avoir perdu la ville de Kolda.
L’équation du ministère de l’Intérieur, organisateur des élections
S’il y a un changement réel auquel s’attendaient les Sénégalais, c’est surtout au niveau du ministère de l’Intérieur surtout après l’organisation catastrophique des élections législatives. Certes le ministre a changé, mais le système demeure or la revendication principale de l’opposition et suggestion de la société civile, c’est de confier l’organisation des élections à une personnalité réputé neutre ou équidistante. Donc l’équation demeure puisque le nouveau ministre de l’Intérieur Aly Ngouille Ndiaye est aujourd’hui un militant de l’APR pur et dur et qu’il ne se distinguera en rien d’Abdoulaye Daouda Diallo. Déjà les opposants ruent dans les brancards pour dire que le président a déshabillé Paul pour habiller Pierre avec le même vêtement. En cela, le dialogue politique auquel il conviait les opposants est déjà plombé puisque le président Sall n’a pas montré de bonnes intentions en laissant toujours l’organisation des élections, pomme de discorde des politiciens, aux mains d’un de ses hommes-liges.
Serigne Saliou Guèye