L'utilisation de gangs par des responsables politiques fait à nouveau la une de l’actualité au Nigéria. Cette fois-ci, c’est le président du Sénat, Bukola Saraki, qui se retrouve sous le feu des critiques.
L’histoire remonte au 5 avril dernier, lorsque 22 individus sont arrêtés pour leur participation présumée aux braquages de six banques dans la ville d'Offa, dans l'État de Kwara (centre), qui ont fait 33 morts. Cinq d'entre eux ont "admis et avoué" qu'ils étaient "des voyous politiques" ayant reçu "des armes, de l'argent et des véhicules opérationnels" de Bukola Saraki et de son successeur au poste de gouverneur, Abdulfatah Ahmed, selon un communiqué de la police. Laquelle a convoqué, dimanche, le président du Sénat et ancien gouverneur de l'État de Kwara à se rendre dans ses locaux pour répondre aux accusations portées contre lui.
Depuis, des milices ethniques sont apparues, comme le Oodua People's Congress dans le Sud-Ouest, les Bakassi Boys dans le Sud-Est et le Niger Delta Vigilante Service dans le Sud. Parmi leurs homologues dans le Nord figurent Sara-Suka, Yan Daba et Kauraye, des gangs actifs dans les États de Gombe, Kano et Katsina.
"Pauvreté, chômage, Boko Haram"
Pour Don Okereke, le recours aux gangs s'explique par une perte des valeurs de la société et les difficultés économiques ainsi que par la volonté désespérée des hommes politiques d'accéder au pouvoir et de s'y maintenir. "Nos jeunes ont perdu les valeurs morales les conduisant à bien se comporter. C'est aussi une question de pauvreté et de chômage, a-t-il déclaré. Ils sont devenus des instruments consentants aux mains de politiciens prêts à tout, qui exploitent leur médiocre condition pour réaliser leur ambition politique".
D'anciens membres d’un gang appelé Ecomog, recrutés par l'ancien gouverneur de l'État de Borno, Ali Modu Sheriff, qui les a laissé tomber quand il a quitté son poste, auraient gagné les rangs de Boko Haram. Le groupe islamiste qui, à ses débuts, finançait ses activités par des braquages de banques et des extorsions de fonds, a tué au moins 20 000 personnes dans le nord-est du Nigeria depuis 2009. Boko Haram a été accusé de manière répétée d'avoir des sponsors politiques, même si aucun lien n'a jamais été établi.
La police de Lagos a récemment mis en garde les parents contre un recrutement de leurs enfants, vu les risques de tomber dans d'autres activités criminelles, y compris les enlèvements.
Le président du Nigeria,Muhammadu Buhari espére etre réelu pour un deuxiéme mandat de quatre ans a la presidentielle de fevrier 2019, sur fond d'insécurité croissante du fait de tensions ethniques et religieuses. Éradiquer la pratique des gangs politiques ne sera pas facile étant donné le système nigérian de clientélisme politique et l'attrait de l'argent et d'un statut pour les nombreux jeunes mécontents et sans emploi.