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Madiambal Diagne charge Abdoulaye Wade : «L’absence d’une vision avait contrarié la conduite de la politique économique et sociale d’Abdoulaye Wade»

TRIBUNE LIBRE
Mardi 20 Mars 2018

Les derrières semaines, nous avons évoqué dans ces colonnes des performances économiques réalisées sous la gouvernance du Président Macky Sall. Il se trouve encore des gens pour chercher à chahuter «les beaux succès de Macky Sall que son opposition refuse de voir» et qui, du reste, sont attestés et certifiés par toutes les institutions compétentes à cet effet. Il nous semble important de demander aux Sénégalais de regarder, de temps en temps, dans le rétroviseur.

Qui ne se rappelle pas qu’en 2000, quand Abdoulaye Wade remplaçait Abdou Diouf à la tête du Sénégal, la situation économique du pays était, comme on peut dire, «sur de bons rails» ? Ainsi, le dernier Premier ministre d’Abdou Diouf, en l’occurrence Mamadou Lamine Loum, avait publié un livre-blanc intitulé Le Sénégal au 01 avril 2000. Il y faisait le point de la situation exacte de l’état de l’économie du Sénégal, à la date de départ des Socialistes du pouvoir. 

Mamadou Lamine Loum tenait à prendre l’opinion publique à témoin, estimant que le régime d’Abdou Diouf ne devrait nullement raser les murs pour présenter un bilan économique, social et même politique. Il dépeignait des «fondamentaux économiques confortables avec une croissance soutenue, des finances publiques assainies, une situation monétaire remarquable. Au total, en fin 1999, le Sénégal était le seul pays membre de l’Uemoa à respecter tous les critères de convergence de cette organisation. Il affichait les meilleurs indicateurs macro-économiques des pays de la Cedeao, et enfin figurait très honorablement dans le ‘’Top 20’’ de la croissance dans le monde».
 
A l’opposé, le régime du Président Abdoulaye Wade n’avait pas osé, à son départ en 2012, faire son bilan devant les Sénégalais. Tellement le pays était devenu un champ de ruines ! Abdoulaye Wade lui-même le disait quand il mettait en garde durant la campagne pour l’élection présidentielle de 2012, déclarant que s’il ne restait pas au pouvoir, «le Sénégal ne pourrait plus payer les salaires des fonctionnaires dans un délai de deux mois». Il savait bien de quoi il parlait. A son entrée en fonction, le Président Macky Sall avait été obligé de solliciter un appui budgétaire exceptionnel de la part de la France pour parer au plus pressé et donc éviter au Sénégal une situation catastrophique de ne plus pouvoir faire face à ses engagements et surtout de constater un défaut de paiement des salaires de fonctionnaires, entre autres.

Le passif légué par Abdoulaye Wade
Il importe donc de rappeler la situation du Sénégal au départ d’Abdoulaye Wade. Les archives du Fonds monétaire international (Fmi) ainsi que celles de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) et de l’Ansd parlent avec éloquence. Au 2 avril 2012, l’économie sénégalaise avait traversé une situation difficile, marquée par la dégradation de la plupart des indicateurs macro-économiques. Ainsi, la croissance économique de 1,8% en 2011 restait inférieure à la croissance démographique (2,8%). On notait un déficit public de 6,7% en 2011 et qui avait dépassé la barre des 8% en avril 2012. Le taux d’inflation était de 3,4% en 2011.
 
Dans le même temps, le solde du compte courant de la balance des paiements était négatif et atteignait 10% du Pib. A cela s’ajoutait une progression rapide de l’encours de la dette de 1 022,7 milliards de F Cfa en 2006 (20% du Pib) à 2 741,4 milliards de F Cfa au 31 mars 2012 (40% du Pib) et un service de la dette insoutenable (44% de nos recettes fiscales) en raison de la part importante des maturités courtes. Dans un tel contexte, on peut mesurer les tensions de trésorerie caractérisées par un besoin net de trésorerie de 302,572 milliards de F Cfa. La Position nette du gouvernement (Png) était caractérisée par un excédent de dettes de 166 milliards de F Cfa.

A titre illustratif, en avril 2012, quelques faits majeurs ont caractérisé l’exécution de la loi de finances initiale 2012, notamment des moins-values de recettes de l’ordre de 53,6 milliards F Cfa à la fin du premier trimestre 2012 ; un gap tarifaire de l’électricité prévisible d’un montant de 60 milliards F Cfa, dont seulement 45 milliards F Cfa ont été prévus pour la subvention du prix de l’électricité, alors que les besoins préalablement évalués étaient de 105 milliards F Cfa ; un programme agricole 2012 sans couverture budgétaire, puisque les crédits d’un montant de 27,3 milliards F Cfa inscrits dans la Loi de finances de 2012 étaient destinés à payer partiellement les arriérés des campagnes antérieures qui étaient supérieurs aux provisions budgétaires de 2012 ; l’inexistence d’un programme d’assistance au monde rural, malgré une mauvaise campagne de production agricole et le renchérissement des prix des produits alimentaires ; un Fonds de soutien au secteur de l’énergie  (Fse) délesté des crédits d’investissements de 15 milliards F Cfa au profit du paiement d’arriérés du Fesman ; une réserve de gestion d’un montant de 50 milliards 232 millions 748 mille 679 F Cfa initialement destinée à faire face, en cours de gestion, à des moins-values de recettes et/ou des dépenses soudaines urgentes et prioritaires, totalement affectées en trois (3) mois à d’autres opérations inopportunes et coûteuses (acquisition de véhicules des chefs de village, acquisition de produits phytosanitaires pour le Plan jaxaay, etc.).

Tout le monde avait pu constater qu’aux derniers instants du régime d’Abdoulaye Wade, les investisseurs internationaux ne faisaient plus confiance au Sénégal compte tenu de la mauvaise gouvernance et la faiblesse de son économie. Toutes choses qui laissaient présager fortement des risques de défaut de paiements. C’est ce qui expliqua que l’Eurobond de 2011 avait été souscrit à un taux d’intérêt trop cher de 8,75%.

En définitive, l’absence d’une vision à moyen et long terme avait contrarié la conduite de la politique économique et sociale sous le régime d’Abdoulaye Wade. En conséquence, il a été remis en question le développement planifié auquel s’était jusqu’ici engagé le Sénégal ; d’où la non-adoption du 10ème Plan d’orientation pour le développement  économique et social (2002-2007). Ce sont finalement des Documents de stratégie de réduction de la pauvreté (Dsrp) qui ont été élaborés dans le but de bénéficier beaucoup plus des allègements de dettes que de servir de référentiel de stratégie de développement économique et social à moyen terme.
 

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