Face à la presse hier, Me Seydou Diagne et Cie ont clamé haut et fort l’éligibilité de leur client. Premier à enfiler sa robe d’avocat pour démonter aly Ngouille et Cie, Me Seydou Diagne a expliqué que l’inéligibilité ou la perte des droitsciviques et politiques ou encore l’interdiction des droits civiques a son siège dans les dispositions des articles 34 et 35 du Code pénal. C’est, souligne-til, une peine. en effet, selon Me Diagne, les personnes qui sont poursuivies en justice, quels que soient les délits pour lesquels elles sont poursuivies, encourent plusieurs peines principales ou des peines accessoires ou complé- mentaires. Les peines principales pour le cas de Karim Wade, c’est, fait-il savoir, l’emprisonnement à 6 ans, l’amende à 138 milliards de francs Cfa et la confiscation des biens présents et futurs. Cela dit, rappelle-t-il, la Crei a statué sur la requête de l’etat, à travers son Procureurspécial qui, en plus de l’emprisonnement et de l’amende et la confiscation des biens, lui a demandé de « prononcer l’interdiction de droits civiques, politiques et de famille » de Karim Wade.
Selon Me Seydou Diagne, « la Crei a dit non au Procureur spécial. elle a dit non à l’etat du Sénégal. elle leur a dit que je refuse de prononcer la perte de droits civiques, politiques et familiaux de M. Karim Wade ». Quant à Me Demba Ciré Bathily, il a rappelé que cela fait maintenant 3 ou 4 ans qu’on parle de l’inéligibilité de M. Karim Wade. Ils (les gens du pouvoir, ndlr) ont, selon Me Bathily, dé- battu partout en disant qu’il est inéligible sous l’empire de l’ancienne loi. et nousleur avonstoujours dit que ce n’est pas le cas. « après, ils se sont rendus compte que ce n’était pas le cas, que M. Karim Wade était bel et bien éligible. alors, pour empêcher notre client d’être candidat, ils ont modifié notre Constitution, ils ont modifié la loi électorale. Mais malgré cela, M. Karim Wade est toujours éligible », soutient Me Demba Ciré Bathily selon qui, pour qu’une personne ne soit pas inscrite sur un fichier électoral, il faut bien que quelqu’un en décide.
« Qui estchargé d’appliquer la loi ? », demande Me Bathily qui répond « c’est le Juge ! ». et le Juge dit bien, selon lui, que rien ne m’autorise ou ne me permet de prononcer une telle peine. De son côté Me amadou Sall pense que si les gens du pouvoir en place veulent désinscrire Karim Wade, ils n’ont qu’à mettre son nom etsaisir le Juge en lui disant que Karim Wade ne doit pas figurer sur la liste électorale. « C’est ça la technique et c’et ça qu’ils ne veulent pasfaire ! » s’exclame-t-il. « L’etat ne peut nous demander de nous conformer à l’arrêt de la Crei et refuser à son tour de se conformer de la décision de la Crei de refuser prononcer l’inéligibilité de M. Karim Wade » Me Seydou Diagne est revenu à la charge pour souligner un « paradoxe ». en effet, fait-il valoir, « l’etat ne peut pas nous demander de lui payer 138 milliards, nous demander de purger une partie de la peines, poursuivre la confiscation à l’international l’ensemble des biens de Karim Wade en se fondantsur l’arrêt de la Crei et ne pas respecter le refus de la Crei de prononcer l’inéligibilité de M. Karim Wade. S’il pense que l’arrêt de la Crei doit être appliqué, il faut qu’il reconnaisse ici et maintenant l’éligibilité et la candidature de M. Karim Wade. »
Poursuivant, Me Seydou Diagne estime qu’ « aujourd’hui, le ministère de l’Intérieur devrait nous dire qu’on se fonde sur l’arrêt de la Crei parce que cet arrêt vous a condamné à perdre vos droits. Dans tous les pays du monde, il faut qu’une juridiction prononce la peine d’inéligibilité. Le code électoral, c’est un code électoral. Ce n’est pas un code pénal. L’arrêt de la Crei dit bien qu’on ne peut pas déchoir M. Karim Wade de ses droits civiques. L’arrêt dit que, pour toutes infractions dans le Code pénal, vous avez une loi spécifique qui dit qu’on peut prononcer l’interdiction des droits civiques et politiques. Mais, pour l’enrichissement illicite qui est une loi spéciale devant une Cour spé- ciale et une disposition spé- ciale, il n’y a aucune disposition légale qui me permette, moi Crei, de prononcer l’interdiction de droits civiques ».
Toutes choses qui font dire à Me Diagne que « M. Wade jouit jusqu’à ce jour de tous ses droits civiques et politiques, puisqu’il est régulièrement inscrit, puisque la commission sié- geant à l’ambassade du Koweït lui délivré son récépissé, puisque les services centraux et le ministères de l’intérieur ne sont pas un tribunal – « ce ne sont pas des Juges, c’est une administration qui doit être régie par les principes de neutralité ». Par consé- quent, soutient-il, ils n’ont qu’à laisser continuer le processus électoral avec les droits des citoyens, faire leurchemin. S’ils ont des contentieux de l’inscription, ils n’ont qu’à saisir eux-mêmes les juridictions dans la phase contentieuse et « dire qu’on a une commission qui avait été dé- léguée et qui ne devait inscrire et qui a inscrit ». D’après Me Diagne, toujours, la conférence de presse avait pour but de rappeler à l’opinion publique nationale et internationale que M. Karim Wade jouit de tous ses droitsciviques et politiques et qu’il n’ya aucune juridiction au Sénégal et dans le monde qui a prononcé une peine complémentaire de l’interdiction de ses droits civiques et politiques. Par consé- quent, il doit rester dansle fichier.
« Il doit concourir, comme tous les citoyens, à la compétition. L’administration sénégalaise, elle est neutre. elle n’a pas à se mêler de la compétition électorale. elle n’a pas à ses substituer en Juge pour prononcer l’inéligibilité d’un candidat », répète-t-il. Quant à Me Ciré Clédor Ly, il explique que l’article 28 de la Constitution pose les seules conditions pour être candidat à la présidence de la République. et cette disposition de la Constitution dit bien,selon lui, que « Tout candidat à la présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civiques et politiques, être âgé de 35 ans au moins et de 75 ans au plus le jour du scrutin, savoir lire, écrire et parler couramment la langue officielle ».
Demba Ciré Bathily : « Nous allons répondre coup pour coup » » Interpellé sur la stratégie qu’ils vont mettre en place pour faire appliquer l’arrêt de la Crei, Me Demba Ciré Bathily promet qu’à partir d’aujourd’hui, « nous prenons date pour mener tous les combats qu’il faut, mener toutes les procédures qu’il faut sur le plan international et national pour qu’au-delà que M. Karim Wade retrouve ses droits, restaurer l’etat de droit ». a cet effet, Me Bathily fait savoir que désormais « pour chaque coup que nous recevrons, nous allons ré- pondre par des coups. et la ré- ponse sur le plan juridique sera à la mesure du défi auquel on sera confronté. »
Me Madické Niang, lui, pense que c’est la démocratie qui est en danger. a en croire le président du groupe parlementaire « Liberté et Démocratie » à l’assemblée nationale, « tous les principes qui la fondentsont touslesjours violés, piétinés et massacrés par ce ré- gime. aucune forme d’exigence, par rapport à la règle de droit n’est prise en compte. « Ce qui est le plus grave, c’est qu’on prenne une loi pour une catégorie de personne alors que la loi est impersonnelle et générale. Tous les cheminements de l’affaire Karim Wade montrent à suffisance qu’on crée, qu’on ressuscite des juridictions, qu’on fait passer des lois à l’assemblée nationale pour tout simplement empêcher un groupe de personnes de participer aux élections. Hélas, nous n’avons pas d’organes compé- tents face à cette situation. Le Conseil Constitutionnel, à chaque fois, nous sert le prétexte d’incompétence », conclut l’ancien ministre de la Justice sous le pré- sident Me abdoulaye Wade.