Cher Premier ministre, devrais-je vous rappeler l’article 3 de la Loi n° 99-04 du 29 janvier 1999 abrogeant et remplaçant la loi 91-14 du 11 février 1991 instituant le Médiateur de la République qui stipule que “dans l’exercice de ses attributions, le Médiateur de la République ne reçoit d’instruction d’aucune autorité.” Je m’interroge, alors, sur l’efficacité de la myriade de conseillers techniques et spéciaux de votre cabinet qui, d’un simple clic, auraient pu vous dissuader ou déconseiller vos critiques aux rôles du Médiateur de la République, institution républicaine, non partisane, et dont l’indépendance est garantie par la loi.
Monsieur le Premier ministre, vous avez essayé de plaire au chef de l’Etat en ignorant indignement, les doléances du peuple sénégalais souverainement portées à la connaissance du Médiateur de la République. Monsieur le Premier ministre vous avez tort de dire que le Médiateur n’a pas la prérogative de contrôler la mise en œuvre des politiques publiques et que celle-ci serait exclusivement réservée à l’Assemblée Nationale. Je vous rappelle que l’Article premier de la loi sus citée dit expressément qu’« il est institué un Médiateur de la République, autorité indépendante qui reçoit les réclamations concernant le fonctionnement des administrations de l’Etat, des collectivités locales, des établissement publics et de tout autre organisme investi d’une mission de service public. » Et « s’il l’estime utile, le Médiateur de la République peut entreprendre de sa propre initiative toute démarche entrant dans le cadre de sa mission.»
Le Médiateur de la République est un Ombudsman qui joue le rôle de défenseur des droits des citoyens. Or dans plusieurs localités de notre pays, nos compatriotes vivent dans des conditions indécentes, de misère indescriptible. Ils ne connaissent ni eau potable ni électricité encore moins d’écoles ou de structures sanitaires. N’est-ce pas là des dysfonctionnements des administrations de l’Etat dont le Médiateur de la République doit s’autosaisir afin de soulager les populations ? Monsieur le Premier ministre, savez-vous que dans les 37 villages du ferlo Matam de la commune de Aouré, arrondissement de Orkadiéré et département de Kanel, il n’y a pas de voies de communications ? Aucune piste rurale ! Le PUDC dont vous faites allusion pour étayer les réalisations de votre gouvernement en milieu rural n’est qu’un conte de fée pour ces populations vivant dans le dénuement total. Savez-vous que plus de 27 villages du ferlo ne disposent même pas d’abris provisoires pouvant servir d’écoles ? Des centaines d’enfants y vivent sans aucune éducation scolaire et exposés à tous les dangers imaginables. Non Monsieur le Premier ministre, je suis désolé de vous le dire, mais vous ne connaissez pas le Sénégal.
Au lieu de prendre en compte les observations du Médiateur de la République pour améliorer votre gouvernance du pays, vous versez dans la menace avec une indélicatesse qui n’honore pas votre rang. D’une manière incongrue, vous avez perdu toute votre sérénité suite à l’énervement de Maitre Alioune Badara Cissé dû aux conditions indécentes de vie des populations du Ferlo et du Boundou qu’il a eu à rencontrer durant sa récente tournée dans l'intérieur du Sénégal. Je le dis et le répète, le Médiateur de la République est la voix des Sans-Voix.
Ressaisissez-vous Monsieur le Premier ministre et souffrez de savoir que le Médiateur de la République continuera à servir le peuple sénégalais, avec vigueur et abnégation pendant la période de six ans non renouvelable, car il ne peut être mis fin à ses fonctions avant l’expiration de ce délai, le 05 août 2021, sauf cas de force majeure, ou à moins que vous ne mettiez en exécution vos menaces en dissolvant l’institution par une loi scélérate introduite au parlement et qui, à coup sûr, sera votée par votre majorité mécanisée. Cher Premier ministre, si vous voulez le poste de ABC qu’il n’a jamais demandé ni quémandé, alors créez les conditions pour le reprendre. Et cela pourrait se faire sans effort de votre part puisque vous vous entêtez à fuir la réalité et continuez de tromper le président avec des programmes vides de contenu et concoctés par votre gouvernement depuis les salons cossus de Dakar et Diamniadio.
Sans aucune haine ou médisance à votre égard, Cher Premier ministre, je voudrais vous suggérer de faire prendre les dispositions idoines pour rectifier les dérapages notés dans certains programmes tant vantés pour le satisfecit des doléances du peuple souverain de la République du Sénégal.
Que Dieu vous accorde davantage de clairvoyance pour vous rendre compte de l’échec de vos politiques publiques sur l’ensemble du territoire national, car vous êtes passé à côté de l’essentiel monsieur le Premier ministre.
Mallé Tall Sy, Coordonnateur perpétuel des Abcdaires d’Europe