La décision prise par le comité central du Parti de l’Indépendance et du travail (P.I.T), du 30 septembre 2018, de soutenir la candidature du président Macky Sall est d’une gravité extrême et semble même, sous certains angles, revêtir des allures de “suicide politique”.
Le prétexte de recherche de cohérence brandi pour justifier la prolongation du compagnonnage avec le président de l’A.P.R, au-delà de 2019, était déjà jugé fallacieux, car il n’est pas logique de foncer lorsqu’on se rend compte qu’on s’est trompé de direction. Et les militants issus du peuple qui souffre, ne peuvent pas ignorer cette évidence : la voie empruntée par le président Macky Sall depuis 2012, n’est pas la nôtre, ni historiquement, ni sociologiquement. On observe, en effet, des phénomènes inquiétants, contre lesquels, notre Parti s’était toujours dressé :
- une mal-gouvernance illustrée par les scandales en cours sur le bradage de nos ressources nationales (pétrole, or du Sénégal oriental, fer de la Falémé…),
- le renforcement de la mainmise des puissances étrangères, particulièrement la France sur notre économie (Total, Eiffage, Orange, Auchan, franc CFA…)
- la poursuite et l’amplification de la transhumance honnie assimilée à la pêche de gros poissons par des pécheurs invétérés,
- l’instrumentalisation de la Justice dénoncée par l’Union des magistrats sénégalais, avec l’embastillement d’adversaires politiques et l’impunité de fait pour les amis et les transhumants,
- un recul démocratique indéniable avec un processus électoral dénaturé par la loi scélérate sur le parrainage sans oublier la rétention couplée à une distribution sélective de cartes électorales, sous la houlette d’un ministre de l’Intérieur partisan
C’est dire donc que la situation de paix et de stabilité qui prévaut encore, relève plus de la maturité et des traditions pacifiques de notre peuple, que du prétendu génie politique d’un président semeur d’injustices, auteur d’actes antinationaux, antipatriotiques et renfermant des germes de menaces de troubles sociaux incontrôlés.
Où sont la paix et la justice sociale, quand deux milliards sont dilapidés pour permettre au président-candidat d’obtenir l’approbation de 1% de ses concitoyens et d’avoir le droit de se représenter ? Dans le même temps l’Université de Saint-Louis est obligée de repousser son ouverture aux calendes grecques, parce l’État reste devoir 1,6 milliard aux fournisseurs du CROUS !
Où sont la paix et la justice sociale, quand les étudiants incompréhensiblement versés dans les écoles privées en sont exclus pour défaut de paiement de l’État ? Au même moment, le Ministre des finances évoque une surliquidité à hauteur de 700 milliards !
Mensonge d’État ou volonté délibérée de sacrifier toute une génération ?
Le « grand bond de l’agriculture sénégalaise » sous la conduite éclairée du président-candidat a-t-il empêché la faim et la soif dans les villes et dans les campagnes, même si les tenants du pouvoir continuent à noyer la souffrance des populations dans des débats sémantiques sans objet (insécurité alimentaire ou famine) ?
Sommes-nous obligés de taire ou de justifier les milliards engagés pour réhabiliter un building administratif jamais livré, alors qu’un autre building a été construit pour abriter le gouvernement ? Avons-nous été consultés pour le choix antinational de sauver ALSTOM en condamnant le Dakar-Niger et bientôt le dernier bout de rail du Petit train Bleu ?
Que pensent les sénégalais qui nous entendent toujours approuver sans jamais critiquer ? Pouvons-nous continuer à applaudir publiquement sans réserve les choix de la politique libérale et antinationale du président-candidat ? Est-il possible que la politique libérale nous agrée à 100 % alors que nous avons toujours eu une position critique même vis-à-vis-à-vis de nos partenaires idéologiques comme ce fut le cas lors de l’invasion de la Tchécoslovaquie par le Pacte de Varsovie en 1968 ?
Nous voyons donc, que l’argumentaire pour soutenir la candidature de Macky Sall est truffé de contre-vérités manifestes, objectivement vérifiables, aux antipodes des réalités quotidiennes des masses laborieuses, au grand dam du prolétariat des villes et des campagnes, des syndicats en lutte, de la jeunesse dans le désarroi, qu’elle soit à l’école ou dans la rue. À tel point que les citoyens sénégalais se posent des questions sur le PIT, qui a toujours été connu pour son engagement historique aux côtés du peuple. Ce parti a toujours mis son identité politique et son orientation idéologique au-dessus des contingences liées à sa participation à des gouvernements de coalitions, aussi bien sous Diouf que sous Wade.
La lettre d’allégeance intitulée « Lettre aux Sénégalais », dont on peine à identifier le ou les auteurs, l’instance ou le responsable, est la goutte de trop qui devrait amener les militants les plus timides et les plus scrupuleux à réagir publiquement au-delà des cercles restreints qui les réunissent. Ces louanges sorties de la tête de laudateurs, de flagorneurs comme dirait Amath Dansokho, est une manifestation typique de collaboration de classe.
Ces communiqués intempestifs de loyauté et de fidélité à la politique antinationale et antidémocratique du président de la République engagent-ils les authentiques militants ou laissent-ils faire ?
Le PIT-Sénégal ne connaît certes pas encore de scission, mais est traversé par un conflit ouvert entre une nomenklatura, privilégiant des intérêts étroits d’appareil et ayant une approche de sommet et de nombreux cadres politiques, militants depuis plusieurs décennies, liés aux masses et conscients des méfaits de la politique, qu’on leur fait endosser.
C’est en leur nom et avec leur collaboration active, que cet appel à un sursaut salvateur est lancé. Même si, avec Seydou Cissokho, nous demeurons convaincus qu’on ne peut « détruire ce Parti comme on a détruit Carthage », nous demandons aux camarades égarés de se ressaisir, pour que ce bien commun qu’est le P.I.T reprenne toute sa place dans lutte de notre peuple contre la domination impérialiste et pour le progrès social.