J’ai éprouvé un énorme plaisir lorsque j’ai appris que le chef de l’Etat a accordé un passeport diplomatique à l’intellectuel Camerounais Achille Mbembe. J’aurai, en outre, appris qu’il a, durant la même période, accordé une audience au Palais de la République aux universitaires et célèbres invités venus assister aux Ateliers de la pensée. Quelques jours auparavant, le Président avait honoré de sa présence la cérémonie officielle commémorative du 70e anniversaire de la création de la Maison d’édition Présence africaine.
En effet, ces actes de haute portée républicaine et symbolique avaient fini de convaincre les plus dubitatifs de l’attachement du Président de la République aux Idées et à la Communauté scientifique. De plus, ce geste semblait parachever la réconciliation de nos élites dirigeantes avec ce qu’il a toujours été et incarné aux yeux de l’Afrique et du monde, c'est-à-dire cette terre d’asile d’intellectuels africains pourchassés et persécutés pour leur idées et leur liberté d’esprit.
Avant Achille, on peut juste rappeler que le grand historien Boubacar Barry et beaucoup d’autres d’intellectuels guinéens et africains ont bénéficié notamment dans les années 70 et 80 de cette belle « Terranga » sénégalaise de la part de nos dirigeants. C’est dans ce même contexte que Le Président Senghor avait marqué son accord pour que le Sénégal abrita le siège du CODESRIA, devenue, aujourd’hui, l’une des institutions scientifiques panafricaines la plus dynamique et la plus prestigieuse dans le domaine des sciences humaines et sociales notamment.
Cette belle tradition d’hospitalité et d’esprit d’ouverture en faveur des intellectuels et universitaires africains ancrée dans notre riche histoire intellectuelle et politique est-elle en train de prendre un sacré coup de Jarnac avec l’arrestation et l’emprisonnement de Dr Babacar Diop, Enseignant-chercheur à la Fac des Lettres de l’UCAD ? Tout compte fait, les deux actes posés en fin octobre à Paris et le début novembre au Palais de la République contrastent avec cette arrestation de début décembre de l’universitaire Babacar Diop.
Voilà, que l’histoire se répète de la triste des manières. Comme en novembre, la scène se joue cette fois devant les grilles du même Palais qui a accueilli Achille. Je ne cherche pas à comprendre où se trouve la raison encore moins à juger les fondements de tel acte ou de tel autre. Je veux juste que les mêmes raisons, les mêmes principes de générosité et de tolérance qui fondent le choix d’octroyer le passeport diplomatique à Achille s’appliquent à notre collègue Babacar, le philosophe. Que Dame Justice ne cherche pas à juger pour condamner. Je veux juste qu’elle comprenne et nous libère Babacar. Entre Achille et Babacar, une équation complexe mais qui exige l'équité dans sa résolution.