L’émission Diakarlo de la Tfm, du vendredi 9 mars continue de faire des vagues. La dernière en date s’est manifestée par la démission annoncée du journaliste animateur Khalifa Diakhaté talentueux, sérieux et affable. Il ne nous revient de nous étendre sur les circonstances l’ayant amené à rendre le tablier alors même que son émission battait tous les records d’audience. Il semble que certaines digues éthiques aient été franchies dans le traitement des dérapages verbaux du Professeur et chroniqueur Songué Diouf. Toutes ces péripéties relèvent de la cuisine interne de la Direction de l’établissement. Il est tout de même regrettable que la bonhomie dans laquelle s’est terminée l’édition du vendredi 17 mars n’ait pas servi à arrondir les angles et faire éviter cette malheureuse issue. L’équipe de Diakarlo en dépit des excès, dont moimême j’ai été victime, était très sympathique, les thèmes développés, pertinents, le ton libre, le verbe parfois trop haut et l’ambiance cacophonique.
Cependant, la tyrannie du direct, le format de l’émission, tout s’y prêtait et la bonne humeur finissait toujours par rabibocher les esprits surchauffés. Il en restait toujours des traces, souvent aigre-doux, après que la moutarde eut fini de monter au nez des invités, chroniqueurs et même téléspectateurs. Dans ce méli-mélo, véritable pot pourri incongru de coups de gueule, d’embardées verbales, d’intelligentes séquences infuses, le chroniqueur Songué Diouf se distinguait pas son calme, sa retenue, sa pédagogie et ses formidables capacités à contextualiser les situations les plus complexes.
L’intello régulateur du groupe, c’est lui Songue. Les coups de sang, moralisateurs de Charles et Bouba donnaient du piquant à l’émission. Même si le style balourd, partisan et colérique de Birima déparait un peu le talk show. Hélas, pour emprunter un élément du langage sportif, cela arrive aussi aux meilleurs, la sortie de Songué sur le rapport entre le viol et les tenues indécentes des femmes est incompréhensible. Son tir est totalement décroisé et il a raté le cadre. Pour avoir vu et revu les vidéos, nous avons fini par renoncer à trouver une justification à ce dérapage. Nous nous sommes contentés d’ouvrir le parapluie du lapsus lingae pour lui offrir un voile pudique dans le noble dessein de couvrir ses débordements. En fait, le régulateur s’est démonté et déréglé. Et les arguments, même sincères, qu’il a servis postérieurement à ses glissements, n’ont fait que l’enfoncer encore plus dans ses tentatives de rattrapage. Le rétropédalage aux accents lyriques et parfois pathétiques n’aura pas suffi à l’absoudre.
Nous ne nous laisserons pas aller à une exhaustive analyse de contenu des délitements du valeureux Professeur chroniqueur. Nous nous borderons à estimer que ses regrettables paroles ont tout simplement dépassé sa saine et fructueuse pensée. Notre raisonnement est simple à comprendre. Si le brillant, professeur devait servir un cours magistral devant un auditoire d’étudiants, d’hommes et de femmes de culture, il n’aurait jamais commis de lapsus calami (écrit). Il se serait lu et relu et fait passer son cru par les fourches caudines de la pensée intérieure réfléchie et les subtilités calligraphiques, pour ne pas débiter de pareilles allégations. C’est qu’en vérité, il y a une différence de nature et de degré entre la télévision miroir au prisme déformant, au public virtuel, à la science informelle et l’amphi universitaire au public réel, trié et choisi, à la science formelle. En d’autres termes, le message qu’il soit média ou non média est fonction du médium. Et comme Mc Luhan, on dira que « Media is message ».
Le professeur ne saurait donc se substituer au chroniqueur sans frais. La personne humaine, en elle, même est unique. Mais les personnages sont différents, comme dans un jeu de rôle. Et la personnalité qui se dégage dans les deux supports est forcément à la mesure de leur statut et posture. Nous avons aimé, aimons et respectons toujours le professeur Songué. Il reste bien ancré dans nos cœurs. Mais disons-le, nous n’avons pas apprécié la sortie du chroniqueur dont les traces marquent nos esprits, choquent légitimement les femmes si injustement indexées et culpabilisées. Si ses propos dérangent tant c’est qu’ils tendent à présenter le viol, comme la seule alternative devant des femmes même indécemment habillées. En quelque sorte, un droit de cuissage devant un délit d’indécence vestimentaire.
Prof Songué aurait-t-il oublié que les femmes passablement dévêtues ne sont pas les seules à être violées. Et que même les femmes correctement vêtues peuvent être la proie de violeurs. Ce n’est pas ce qu’a voulu faire croire le Professeur Songue. C’est la compréhension qui sera retenue et fixée dans l’inconscient collectif. L’usage de l’expression, «c’est pourquoi nous vous violons» constitue à bien des égards, la petite brandille qui a cassé le dos du chameau. En appliquant la grille d’analyse de contenu à cette phrase, on verra bien que les occurrences utilisées (contenu) rapportées à la catégorie (contenant) donnent un cocktail explosif dans la perception qui se dégage des propos du Professeur.
Mais, il est aisé de constater que le format du talk show, offre hélas quelques licences transgressives, à condition de savoir jusqu’où ne pas aller trop loin. Cette vigilance a échappé au chroniqueur. On ne lui en tiendra pas rigueur. Du moins pas autant que ces féministes et autres vierges effarouchées, jusqu’au boutistes démesurées, qui cherchent à traîner ce brave soldat devant la justice. Ce défouloir collectif et ce démentiel lynchage médiatique est devenu relevant de l’hystérie. Tout ce qui est excessif est détestable, dans les deux cas. Doctor Diouf, Mister Songué, attention tout de même, car vous méritez encore notre sympathie.