Monsieur le ministre, vous n’êtes pas reconduit dans le Gouvernement de Dionne II. Et 72 heures après, vous annoncez votre démission de l’Apr. Qu’est-ce qui s’est réellement passé ?
Je le dis et je le répète. Il est important que je précise certaines choses. La décision que j’ai prise aujourd’hui (Ndlr: hier) n’a absolument rien à voir avec l’entrée ou la sortie d’un gouvernement. Je vous l’assure sur l’honneur. Le Gouvernement a été formé il y a plusieurs jours. Depuis lors et les plus hautes autorités peuvent en attester, tous les actes que j’ai posés, sont allés dans le sens de l’apaisement, concernant mes camarades militants de Dakar Plateau et d’autres militants. L’acte que j’ai posé aujourd’hui (Ndlr: hier) est motivé par des évènements qui se sont produits hier (Ndlr: avant-hier).
Quels sont ces évènements ?
Ces évènements sont attentatoires à mon honneur. Il y a une tentative d’attenter à mon honneur, en me collant la paternité ou bien celui qui serait derrière un article de presse publié par le quotidien L’As. Dans cet article, il est question des «performances» politiques ou électorales de Yakham. Et la surprise qu’il ne soit pas reconduit dans le Gouvernement. Et finalement, le journaliste s’est posé la question de savoir si ce qui semble être une sanction n’est pas la conséquence de la proximité du combat que Yakham a mené aux côtés de son ami de longue date, son camarade Aliou Sall (frère du Président et maire de Guédiawaye). C’est pour dire si Yakham ne serait pas victime de ce que l’on appelle les Faucons? Et pour dire clairement les choses, c’est Aliou Fall (journaliste) de la Fondation Servir le Sénégal, une très vieille connaissance, qui a eu à dire que c’est moi qui suis derrière cet article. Et ce n’est pas la première fois.
Il est allé dire cela à qui ?
Il est allé dire ça à la Première Dame, Marième Faye Sall. Et ça a suscité un petit bémol jusqu’à ce que ça parvienne à ma famille qui m’a demandé des explications. Et je suis tombé des nues au moment où j’étais en train d’œuvrer dans un sens de parfaite loyauté, positif, je me suis abstenu de tout commentaire négatif. J’ai appelé un à un toutes les figures politiques de Dakar-Plateau et il n’y avait même pas raison de s’agiter. J’ai été aux côtés du Président Sall depuis deux décennies. J’ai fait mon entrée en politique depuis trois ans et la politique n’a jamais déterminé mes rapports avec le Président Sall. Et elle ne les déterminera jamais. Puisqu’avant tout, le président de la République est un grand frère, un aîné, une référence pour moi. Mais, nous sommes faits de chair et d’os, nous sommes des humains et j’ai encaissé jusqu’à ce que la coupe soit pleine. Je mets en parallèle l’année dernière, aujourd’hui, quand on parle de Yakham Mbaye, peut-être trois articles de presse sur cinq, c’est pour me stigmatiser, me pointer du doigt comme un insulteur. Alors que tout le monde sait dans ce pays, cet enregistrement traficoté, de faussaires, qu’on m’attribue, tenant des propos injurieux, sur l’honneur, ça n’a jamais été mon cas. Ils ont réussi peut-être à 40% à imiter ma voix, mais la voix de mon meilleur ami avec qui je parlais, est méconnaissable de tout le monde. Ce n’était pas une sale besogne de l’opposition, ça venait de l’intérieur de mon parti. J’ai saisi la justice, les gens étaient démasqués et on m’a contraint à renoncer à l’action judiciaire. Et aujourd’hui, mon honneur en pâtit. Alors, qu’est-ce que je vais faire? Au nom de mon engagement, de ma loyauté, vous pensez que je vais continuer à être là, impuissant pour que des gens œuvrent quotidiennement à me détruire. Me détruire physiquement, je n’ai pas peur, mais quand on atteint l’honneur d’un homme, il est fini.
Mais avant de poser cet acte, vous aviez eu à parler avec le Président ou d’autres responsables?
Le Président, on s’est parlé après ma décision.
Mais est-ce qu’il a accepté votre démission?
Non, il ne l’a pas acceptée. On a longuement parlé. Le Président, je lui dois énormément. Et jamais pour le reste de ma vie, on ne m’entendra élever le plus petit mot négatif contre lui. Il n’y est absolument pour rien.
Vous avez démissionné de l’Apr ?
L’Apr date de neuf ans. 14 ans avant, quand l’Apr naissait en 2008, j’étais aux côtés de Macky. La politique n’a pas déterminé nos relations, ne doit les déterminer et ne les déterminera jamais. J’ai beaucoup plus œuvré pour le Président Macky Sall étant en dehors de l’Apr et avant d’être membre de l’Apr. Donc, ce n’est pas aujourd’hui que l’Apr déterminera mon existence.
Qu’est-ce que vous allez faire maintenant?
Je ne me vois pas retourner dans la presse. Mais, servir le président de la République ne signifie pas forcément qu’on doit être à l’Apr.
La presse et vous, c’est donc fini ?
Comme je l’ai dit, je ne vais pas retourner dans la presse. Il y a des centaines de milliers de Sénégalais qui œuvrent pour la réussite de la mission confiée au Président Macky Sall. Donc, servir le chef de l’Etat ne signifie être membre de l’Apr.
Avez-vous contacté Alioune Fall pour en avoir le cœur net à propos des accusations ?
Il fait partie de ce cercle de personnes qui rendent de très mauvais services au président de la République. Ils ne sont comptables de rien. Ils ne sont responsables de rien, mais ils sont dans tout.
Mais vous avez de très bonnes relations avec la Première Dame ?
J’ai d’excellentes relations avec elle.
Pourquoi vous ne lui avez pas parlé, pour arrondir les angles, avant de prendre cette décision?
Le mal était déjà fait. Je vous dis que l’année dernière, il n y a même pas encore une année, on avait balancé sur la place publique un enregistrement dans lequel on entendait un soi-disant Yaxam Mbaye insulter. Cet enregistrement n’est pas l’œuvre de l’opposition.
Connaissez-vous les faucons dont vous parlez ?
Oui mais on se connaît.
Et pourquoi ne les citez-vous pas ?
Ce n’est pas la peine, mais je cite Alioune Fall. Et je le défie de me démentir. C’est lui qui a propagé au sein de notre famille, l’information selon laquelle je suis derrière l’article de L’As. Et je sais que ce n’est que le début. Peut-être demain, ils me colleront la paternité d’un crime ou autre. Parce que manifestement, je les obsède. Parce que moi, j’ai œuvré pour être indépendant, libre, mais tout en me conformant aux exigences du protocole de la République. Mais, la politique, les prébendes, l’argent n’ont pas dénaturé mes engagements. Qu’est-ce qu’on retient de Yaxam politiquement parlant? Le créateur de la dynastie Faye-Sall. Le terme dynastie Faye-Sall n’est pas mon œuvre. Je ne l’ai pas créé. Celui qui a prononcé le fameux terme dans une interview dans Libération, il est là dans la majorité présidentielle. Maintenant, il a d’autres convictions, il n’est plus en opposition. Mais, le terme a été vulgarisé par Libération qui a publié cette interview et j’ai assumé ma responsabilité dans la publication. Mon compagnonnage avec le chef de l’Etat, Macky Sall, commence en 2014, alors que j’ai été de tous les combats : avant la création de l’Apr et au moment de la création de l’Apr. Seulement, j’ai toujours été dans l’ombre. Je n’étais pas dans le besoin.
Quand je quittais le journal le Populaire en démissionnant, c’est parce que ma posture, mon engagement auprès du président de la République, n’était plus conforme à la conduite de ce journal. Je l’ai fait de manière indépendante et libre. Je n’étais pas dans le besoin et j’ai traversé le désert. C’était une période dure. Et quand le Président Sall a gagné les élections présidentielles de 2012 dans sa bonté, il m’a proposé de venir à ses côtés. Nous en avions discuté et j’avais préféré continuer la gestion du journal Libération. Et ces mêmes personnes qui œuvrent aujourd’hui contre moi, manœuvraient en 2012. Ils avaient profité en 2012, de mon inexpérience en politique pour m’éloigner du chef de l’Etat. Je ne vais pas leur donner cette opportunité.
Aujourd’hui, ma décision de quitter l’Apr n’est pas synonyme de séparation avec le Président Sall. Parce que ce qui me lie avec lui est supérieur à la politique. Je peux toujours être à ses côtés, le servir en tant que petit frère, le servir en tant que Sénégalais, le servir de manière loyale, en étant indépendant et libre. Pour démentir ceux qui sont en train d’agiter qu’une grosse récompense m’attend à gauche et à droite. Cela peut les obséder parce qu’ils ont faim. Mais moi, ça ne m’obsède pas. Parce que je n’ai pas faim.