Mais chose curieuse, au nom de la défense de «l’islam en péril », des zélotes ont tenté de justifier l’inqualifiable acte du Serigne Daara. Sur les réseaux sociaux, dans les médias, dans les discussions de salon, on note la montée d’un populisme religieux de la part de Torquemada tropicaux, qui usent d’invectives et d’insultes grossières pour tenter d’intimider, à coups de fatwas, tous ceux qui ne pensent pas comme eux. Il se trouve que je suis originaire d’une contrée où l’islam a droit de cité depuis le 11e siècle. Mon propre père est un pur produit des « foyers ardents » comme tout jeune foutanke de l’époque. Pourtant, c’est avec un grand soulagement qu’il a fréquenté l’école de Matam, quand l’occasion lui en a été donné. Il était tellement traumatisé par l’éducation prodiguée par son maître, qui se trouvait être son propre oncle, qu’il nous a racontés une anecdote qui en dit long sur les misères endurées par les petits talibés : un jour que cet oncle était parti en voyage à Kaolack, lui et ses amis avaient formé un cercle et psalmodié des incantations, priant de toutes leurs petites forces que celui-ci ne revienne pas au village.
Coïncidence ou pas, le thierno tortionnaire ne remit effectivement jamais plus les pieds dans son bled. Pourtant, malgré ce passé douloureux, mon père, tout Directeur d’école qu’il fut par la suite, jusqu’à sa disparition, tint à ce que tous ses enfants aient une éducation religieuse correcte. Mais, en veillant scrupuleusement à ce qu’ils ne subissent jamais les mêmes affres que lui dans son apprentissage du Coran. Que ce soit chez les Serigne Daara, les curés, les moines tibétains ou les Adventistes du Septième jour, toutes les religions sécrètent des saints et des salopards. On peut être un excellent exégète de la Bible et être un trousseur de nonnes, tout comme on peut-être un hafiz du Coran et avoir des penchants pédophiles. La religion est une affaire de mesure et de discernement. Et, de toute façon, Dieu reconnaîtra toujours les siens...
Barka Ba