Les chapelles religieuses sont toutes fondées par des panégyristes du Prophète dont l’adoration de Dieu et la glorification de son Envoyé ont fondé la gloire éternelle. Ils ont héroïquement servi leur peuple, en résistant pour certains avec tact et avec vista à toutes les formes d’injustice orchestrées par les colonisateurs d’alors. Ils ont montré la voie de la liberté et chacun par son exemplarité propre à son statut de leader universel a enseigné la vertu la droiture le pardon l’entraide la solidarité et le respect. Ces saints hommes furent les poètes de leurs contemporains.
Aujourd’hui plus que jamais, le Sénégal a besoin de redécouvrir leurs écrits et de construire de nouveaux modèles de citoyens à partir de leurs souvenirs encore vivaces et pieusement entretenus par leurs descendants. Il est vrai que «le monde est certes vieux, mais l’avenir sort toujours du passé».
Il est temps que notre Histoire soit remise au goût du jour et que nos vertus fondatrices et autres us et coutumes qui ont sanctifié les noms des héros que nous célébrons fassent l’objet d’une réappropriation par nos élites politiques. Nos ancêtres nous ont enseigné le dialogue sincère. Le sens de l’honneur et le respect de la parole donnée.
La médiation ne fut jamais un vain mot sous nos tropiques, et s’il est vrai que la figure de celui qui la conduit doit faire l’objet d’un consensus fort entre toutes les parties pour crédibiliser sa démarche et légitimer son action, il n’en demeure pas moins qu’il ne faut point l’idéaliser au point de vouloir en faire la réincarnation de Al Amine, un des noms du Prophète qui faisait l’unanimité sur sa probité bien avant que d’avoir son statut intemporel.
Vouloir un dialogue en détenant la réalité légitime du pouvoir, c’est déjà faire preuve à mon avis de modestie et d’ouverture. C’est faire montre de considération envers tous les acteurs avec lesquels l’on partage le terrain politique, et qui sont tous mus par le même engagement patriotique au service des intérêts exclusifs du peuple sénégalais.
Tout finit autour de la table des négociations. Une fois en effet que tous les contentieux ont été vidés par l’autorité judiciaire suprême et qu’il ne reste plus que le constat de l’imperfection de toute œuvre humaine qu’il faut sans cesse embellir, l’on se rend compte objectivement que la seule alternative du dialogue s’impose comme l’unique cadre qui permette de corriger les dysfonctionnements du processus électoral, d’améliorer les règles du jeu politique, et d’apaiser en conséquence les ressentiments ressassés par des acteurs insatisfaits des conditions dans lesquelles ils ont participé aux joutes électorales passées.
Il y a un temps de la Justice. Il y a un temps de la Politique.
L’un est un pouvoir autonome servi par des magistrats dont il n’est pas permis de douter de l’intégrité morale, de l’impartialité et de leur sens élevé de l’honneur. Nul n’a le monopole de l’équité et en l’espèce nos magistrats sont des patriotes conscients que la paix sociale et la notion d’Etat de droit sont fortement ancrés dans notre conscience collective, car chacun d’entre nous est convaincu que la Justice reste le socle de notre sécurité et notre ultime recours en lequel chaque sénégalais a et doit avoir confiance, si nous estimons que nos droits ont été violés.
L’autre est un moment précis dans la vie de notre Nation qui détermine le sens de notre vivre ensemble et permet de choisir en conséquence ceux qui sont censés le réaliser. Entre les deux, l’on ne peut faire l’économie d’un dialogue surtout qu’il s’inscrit sous les auspices d’une volonté clairement exprimée par une partie, le pouvoir, de diriger le Sénégal dans la paix et la cohésion des cœurs, pour bâtir un modèle social où les mots émergence, solidarité et développement auront tout leur sens.
Ne nous leurrons pas. N’attendons pas un homme providentiel pour présider ce dialogue. Il n’existe pas. Il ne viendra pas. Et pour parler comme Rousseau, quiconque sera choisi, si l’un des protagonistes de ce dialogue le conteste, qu’il se lève, et qu’il dise, le front haut, s’il l’ose : «Je suis meilleur que cet homme-là» !
Notre poète des temps modernes, quant à lui, c’est le Président. Il définit la politique de la Nation sous le sceau de sa vision. C’est sa prérogative personnelle. Et personne n’est inutile à la manœuvre ; c’est le sens qu’il faut prêter à sa devise, qui commande son appel solennel au dialogue : «Le Sénégal de tous, le Sénégal pour tous» ! Tâchons de dialoguer alors, pour ne pas faire tanguer le navire, et pouvoir lui dire, au Président, d’une seule et même voix audible, s’il y a lieu : «Attention, tempête en vue !»
Abdou Diao, expert en communication