Mais beaucoup de ces derniers, à l’image de Alioune, trouvent que les bêtes sont hors de prix. Vêtu d’un tee-shirt, Alioune, la trentaine, a jeté son dévolu sur un mouton qu’il veut emporter à 90.000 FCFA. Niet, a dit Modou Sow, le propriétaire, en lui faisant savoir qu’il ne cédera son beau mouton à la robe tachetée de noir qu’au prix de 120.000 FCFA.
Econduit comme Alioune, ce père de famille surpris en plein marchandage d’un mouton n’a pu s’empêcher de lâcher dans un souffle : « A vrai dire les moutons sont chers ».
Plus patiemment et déterminé à engager l’épreuve des nerfs avec les vendeurs de mouton, ce vieil homme qui dit s’appeler ‘’Diop’’ compte sillonner le foirail de long en large et sous le chaud soleil jusqu’à obtenir la bête dont il rêve. Faisant preuve de sagesse, il soutient qu’il «est plus sûr d’acheter dès maintenant», au lieu d’espérer que les vendeurs par crainte de mévente baissent les prix à la veille de la Tabaski.
Autre foirail même cherté des moutons. Au boulevard du Centenaire de la commune de Dakar, Aly Fall, revendeur de son état, sent qu’il lui sera difficile cette année de faire de bonnes affaires. « Ça fait deux heures que je suis là à discuter avec lui pour qu’il me cède ce mouton à 150.000 FCFA », confie Ady Fall, en désignant du menton un vendeur malien avec qui il est en négociations.
Lunettes de soleil aux yeux et bonnet Cabral sur la tête, Ady a beau marchander via un français approximatif et forces gestes, mais son vis-à-vis n’a voulu rien entendre que 190.000 FCFA. De guerre lasse, Ady s’en est allé vers d’autres vendeurs plus flexibles.
Pour sûr, Ady ne fera pas son beurre sur Baba Sall, vendeur de Bali-Bali, moutons de race aux longues oreilles et à la taille imposante. Arrivé de Diéma (région de Kayes, à 345 km de Bamako), après un voyage de deux jours qui lui a coûté 500.000 FCFA pour le transport de ses bêtes, il affiche des prix allant de 200 à 300.000 FCFA.
«Ce sont de très bons moutons qui n’ont rien à envier aux Ladum (autre mouton de race très prisé) sauf que ce dernier a plus d’aura », clame fièrement Baba Sall, histoire de légitimer ses prix de vente.
Qu’il soit un Bali-Bali ou un Laadum, les Dakarois ont dans l’ensemble besoin de 260.000 moutons pour perpétuer l’acte d’Abraham consistant à immoler un bélier le jour de la Tabaski.
A l’échelle nationale, le Sénégal sacrifiera le jour j 750.000 bêtes, selon Aminata Mbengue Ndiaye, la ministre de l’Elevage et des Productions animales qui lors d’un conseil interministériel consacré à la Tabaski avait annoncé qu’il y avait 202.334 moutons sur le marché sénégalais à la date du 16 août.
Pour combler le gap, le Sénégal va importer quelque 350.000 moutons du Mali et de la Mauritanie, a ajouté la ministre avant de faire part d’une circulaire du Premier ministre suspendant tous les taxes et droits pour faciliter l’entrée des bêtes sur le territoire national.
Selon les données de la Cellule des études et de la planification (CEP) de la direction de l’Elevage publiées en 2015, le Sénégal comptait 6.264.000 ovins. En outre pour les quatre premiers mois de cette année, le bulletin mensuel (avril 2017) de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) a fait état de 117563 d’abattages contrôlés de moutons.
L’élevage occupe près de 60% des ménages agricoles du Sénégal (Recensement général de la population et de l'habitat, de l'agriculture et de l'élevage 2013) mais ne contribue qu’à hauteur de 4,3% du Produit intérieur brut (PIB).
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