«M. Kandji est membre des magistrats corrompus devant l’éternel et un de ceux qui font la honte du pays et de la justice sénégalaise. Le juge Malick Lamotte fait partie des complices de Macky Sall (et comme) membre éminent de l’association des malfaiteurs contre le maire de la ville de Dakar Khalifa Sall. Macky Sall est le président des associations de malfaiteurs du Sénégal parce qu’il a trié sur le volet les magistrats les plus corrompus au Sénégal pour juger Khalifa Sall. Si Macky est courageux, je ne dois pas passer la nuit chez moi. S’il a emprisonné Khalifa Sall, c’est parce qu’il veut s’accrocher au pouvoir, car il sait que si Khalifa se présente, il ne sera jamais réélu». Voilà les propos tenus, lors d’un meeting de soutien au maire de Dakar Khalifa Sall, le 28 juillet, à Dalifort par le leader du FSD/BJ, Cheikh Bamba Dièye. Des propos qui ont provoqué le courroux de l’Union des magistrats du Sénégal (UMS) et du ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall. D’ailleurs, cette algarade qualifiée d’ « irresponsable » par le Garde des Sceaux a valu au député Cheikh Bamba Dièye une convocation le 4 août dernier à la Division des investigations criminelles (Dic). Le parlementaire ayant invoqué son immunité parlementaire n’a pas déféré à la convocation de ladite police judiciaire.
Une indignation sélective de l’UMS
A la suite du Pr Ismaïla Madior Fall, Souleymane Teliko, président de l’UMS, s’est indigné de cette sortie de l’ancien maire de Saint-Louis en ces termes : « Il est inadmissible que des hommes qui aspirent à diriger un pays, contribuent à ce point, à fragiliser l’institution judiciaire. Les propos de Cheikh Bamba Dièye sont intolérables et ne devraient pas rester impunis. L’UMS estprête à soutenir toute action initiée par un magistrat qui se sent visé par ces attaques. » En dépit des menaces d’une action judiciaire à son encontre, le leader du FSD/BJ ne démord pas et persiste et signe dans ces propos. Les propos de Cheikh Bamba Dièye, analysés sous un certain angle, sont effectivement outrageants à l’endroit des juges qui sont nommément cités mais il faut aller au-delà de l’aspect ad hominem pour en avoir une compréhension plus exacte. Pour cause, cette diatribe de Cheikh Bamba Dièye contre certains magistrats et contre la justice in globo, met à nu le malaise d’une justice qui peine à se démêler des tentacules asphyxiantes d’un Exécutif hyperpuissant. Certes,le texte du leader du FSD/BJ est condamnable au premier degré mais si on l’analyse selon le contexte politicojudiciaire qui en est le prétexte, on peut tempérer les ardeurs et mettre un bémol aux vociférations d’indignation des magistrats.
La menace d’une sanction exemplaire brandie par Souleymane Téliko trahit l’existence de cette justice à deux vitesses que flétrissent quotidiennement les Sénégalais. Si l’ancien ministre de la Communication du président Sall doit être condamné pour ses propos qui ciblent nommément deux juges, faudrait-il alors guillotiner Moustapha Cissé Lo ? Pour cause, le vice-président de l’Assemblée nationale a tenu les propos gravissimessuivants qui jettent l’opprobre sur toute la magistrature sénégalaise : « Tous les citoyens ne sont pas traités sur un pied d’égalité. Les enfants des personnalités commettent souvent des choses répréhensibles mais ils ne sont pas emprisonnés. C’est presque leur jeu favori.Une personne habitant Touba a détourné une centaine de millions appartenant à la dame Oumy Thiam. Malheureusement, elle continue de vaquer librement à ses occupations.Des gens qui ont détourné 100 mille francs Cfa purgent des peines en prison. Il n’y a pas de justice au Sénégal. C’est regrettable, mais le fait existe bel et bien. Les magistrats ne jugent pas équitablement et dansleur intime conviction. Ils font n’importe quoi.Lesjuges ne rendent pasles décisions correctement. »
Comme réaction timorée, voici le laconique communiqué servi le 12 mars 2018 par le bureau de l’UMS : « De tels propos, venant d’une personne incarnant desinstitutions aussi respectables que l’Assemblée nationale et le Parlement de la CEDEAO, constituent, outre leur caractère outrageant, des dérapages inadmissibles et un manquement grave aux principes qui régissent les rapports entre les institutions de la République. L’UMS les condamne vigoureusement et appelle tout le monde au sens de la mesure et au respect du a nos institutions. »
C’était tout ! Où était l’UMS pendant que les députés se comportaient comme des hors-la loi en cassant un arrêt daté du 23 septembre 2015 de la Cour suprême dont le seul tort est d’avoir annulé l’arrêté d’exclusion illégal des élèves-instituteurs ? Une résolution de soutien en faveur du ministre de l’Education nationale a été votée le 28 décembre 2015 par les parlementaires présents à la séance plénière pour rejeter la décision de la plus haute juridiction de ce pays. Dans une démocratie quise respecteet où la séparation des pouvoirs et l’indépendance de la justice sont une réalité, le couple exécutif-législatif ne contrôle pas le judiciaire et, par voie de conséquence, ne connait pas de la compétence de juger ou de déjuger une décision de justice.
Récemment, le ministre Mansour Faye a tenu des propos désobligeants à l’encontre des juges de la CEDEAO dont fait partie notre compatriote Aliou Sall. L’UMS qui s’indigne à la moindre incartade des opposants de Macky Sall a fait profil bas. Dans sa chronique du 13 décembre 2017, le journaliste Pape Alé Niang a déclaré que l’arrestation de Khalifa Sall a été concoctée au palais présidentiel au cours d’une réunion tenue en présence de Macky Sall et d’Oumar Youm, directeur de cabinet. Auraient assisté à ce conclave, Samba Sall, doyen des juges, Serigne Bassirou Guèye, procureur de la République, juge Maguette Diop, Antoine Diome, Agent judiciaire de l’Etat, Malick Lamotte, Demba Kandji, Lansana Diaby, Procureur général de la Cour d’Appel de Dakar, Gallo Syr Diagne, président Chambre d’accusation, Cheikh Tidiane Coulibaly, procureur général de la Cour Suprême, Mamadou Badio Camara, président de la Cour Suprême, Pape Oumar Sakho, président du Conseil constitutionnel. En guise de réaction à cette accusation gravissime de Pape Alé Niang, la structure dirigée par le président Souleymane Téliko, qui n’est pas une juridiction, avait publié un communiqué dans lequel elle avait à son tour accusé le journaliste de «vouloir jeter l’anathème sur la corporation des juges et des procureurs de la Justice sénégalaise». Selon ce communiqué, tous les collègues incriminés que «l’UMS a pu interpeller ont tous formellement démenti avoir pris part à une telle rencontre». Par conséquent, l’UMS disait donc condamner «fermement de tels propos qui, non seulement, portent atteinte gravement à l’honorabilité des magistrats, mais aussi contribue à jeter le discrédit sur l’Institution judiciaire tout entière».
Accusation ne saurait être plus grave que ces propos de Pape Alé qui touchent le gratin judiciaire du Sénégal. Et bizarrement tous ces magistrats constituent la chaine judiciaire qui est intervenue dans l’exécution politique définitive du maire de Dakar. Il ne reste que Cheikh Tidiane Coulibaly et Mamadou Badio, respectivement procureur général et président de Cour suprême pour donner le coup de grâce qui consacrera l’enterrement politique du député-maire de Dakar conformément au souhait du patron de la magistrature nationale, le président Macky Sall.
Cheikh Bamba Dièye a dit tout haut ce que les Sénégalais pensent tout bas
Et c’est en se fondant sur l’ensemble des éléments qui mettent à nu cette justice à deux vitesses réprimant les opposants du président et passant l’éponge sur toutes les exactions de ses partisans et alliés qu’il faut analyser la déclaration du député Cheikh Bamba Dièye. Une déclaration que beaucoup de Sénégalais partagent, du reste. Pour cause, depuis 1960, jamais nos compatriotes n’avaient assisté à pareil acharnement judiciaire contre les hommes politiques de l’opposition ou contre des citoyens qui ne s’adaptent pas au moule sacrosaint de l’establishment apériste. Il suffit de faire un tour dans les réseaux sociaux pour se rendre compte du nombre inestimable de Sénégalais qui adhèrent aux propos critiques du parlementaire. Il est à souligner que la corruption judiciaire entre dans deux catégories : l’ingérence politique du pouvoir exécutif ou législatif dans les procédures judiciaires, d’une part, et la pratique des pots-de-vin, d’autre part.
Par conséquent, quand Cheikh Bamba Dièye parle de juges corrompus, il ne faut pas a priori penser que Demba Kandj et Malick Lamotte ont reçu des pots-de-vin pour condamner Khalifa Sall. Il sous-entend plutôt qu’ilsse sont pliés au diktatdes pouvoirs exécutif et législatif dans la procédure judiciaire enclenchée depuis le déclenchement de l’action publique par la police judiciaire (sur injonction du procureur de la République) en passant par l’inculpation puis le placement sous mandat de dépôt par juge d’instruction jusqu’à la condamnation par le Lamotte et la confirmation, à coup presque sûr, de la peine prononcée en première instance par Demba Kandj. Si le président Téliko lui-même déclare qu’« avec ce qu’on entend, depuis un certain moment, la situation dépasse les limites du raisonnable (…) ces attaques constituent des atteintes intolérables à la dignité de la justice, qu’elles contribuent à fragiliser », c’est parce que cette justice a fini de s’auto-décrédibiliser par ses pratiques iniques. D’ailleurs, le patron de l’UMS a reconnu, dans son discours introspectif voire cathartique tenuce samedi 4 août à Saly, lors de l’assemblée ordinaire de sa structure, que la justice à deux vitesses en pratique dans notre paysfait le lit de toute la palanquée de critiques formulées contre les magistrats. C’est en cela qu’il faut analyser ses propos : « Nous avons le devoir d’assumer notre part de responsabilité dans tout ce qui advient au sein de l’institution judiciaire…La considération et le respect auxquels nous avons droit nous sont accordés sous réserve de l’application scrupuleuse des principes qui garantissent la tenue d’un procès juste et équitable. C’est le droit pour chaque magistrat de traiter le dossier qui lui est soumis conformément à la loi et à sa conscience mais c’est notre devoir à nous tous de veiller à ce que rien ne soit de nature à susciter suspicion et rupture de confiance. Or, il nous faut reconnaitre que les activités et déclarations politiques que certains de nos collègues font en violation flagrante de notre statut, la sélectivité dans le traitement des dossiers, le rythme particulier auxquelles sont soumises certaines affaires, les postures et positions de certains d’entre nous contribuent à conforter dans l’esprit de nos concitoyens le sentiment d’une justice à deux vitesse et aux ordres. Rien ne peut justifier que la justice de notre pays soit à ce point indexée. Pour mettre fin à ces dérives, il nous faut donc, parallèlement aux condamnations et poursuites judiciaires, apprendre à nous conformer davantage à notre serment. »
Il apparait que la justice sénégalaise telle qu’elle fonctionne estsujette à moultcritiques. Si elle n’est pas suspectée de laxisme, elle est accusée de partialité. Même les magistrats partagent et reconnaissent eux-mêmes ce sentiment de malaise et ces manquements qui discréditent la justice. La démission du procureur Dème de la magistrature, la sortie de l’intrépide juge Yaya Dia déclarant valide la candidature de Karim Wade à la présidentielle là où les « Sages » du Conseil constitutionnel lui porteront l’estocade et la révolte de jeunes magistrats qui risque de sourdre très prochainement sont autant d’éléments qui prouvent ce manque de dignité de la justice. Par conséquent, si l’institution judiciaire a perdu son honorabilité, c’est parce que la magistrature s’est transmuée en « mackystrature » et qu’une bonne partie de ses éléments a troqué sa robe noire contre des camisoles marron-beige. Car depuis l’accession de Macky Sall à la présidence de la République, le pouvoir judiciaire est utilisé la plupart du temps pour des règlements de comptes politiques qui se concluent par l’embastillement des responsables de l’opposition ciblés. Karim Wade, Oumar Sarr, El Hadj Amadou Sall, les jeunes karimistes, Bamba Fall, Barthélémy Dias, Toussaint Manga et les partisans de Khalifa Sall ne diront pas le contraire.
Ainsi cette ingérence du politique dans le traitement de certains dossiers judiciaires pour des raisons liées à l’impératif de l’élection sans anicroche du président Sall au premier tour de la présidentielle de 2019 n’est rien d’autre qu’une corruption. C’est là tout le sens des propos du député Cheikh Bamba Dièye. Et s’il y en a qui se sentent morveux, eh bien… qu’ils se mouchent !
Serigne Saliou Guèye
Une indignation sélective de l’UMS
A la suite du Pr Ismaïla Madior Fall, Souleymane Teliko, président de l’UMS, s’est indigné de cette sortie de l’ancien maire de Saint-Louis en ces termes : « Il est inadmissible que des hommes qui aspirent à diriger un pays, contribuent à ce point, à fragiliser l’institution judiciaire. Les propos de Cheikh Bamba Dièye sont intolérables et ne devraient pas rester impunis. L’UMS estprête à soutenir toute action initiée par un magistrat qui se sent visé par ces attaques. » En dépit des menaces d’une action judiciaire à son encontre, le leader du FSD/BJ ne démord pas et persiste et signe dans ces propos. Les propos de Cheikh Bamba Dièye, analysés sous un certain angle, sont effectivement outrageants à l’endroit des juges qui sont nommément cités mais il faut aller au-delà de l’aspect ad hominem pour en avoir une compréhension plus exacte. Pour cause, cette diatribe de Cheikh Bamba Dièye contre certains magistrats et contre la justice in globo, met à nu le malaise d’une justice qui peine à se démêler des tentacules asphyxiantes d’un Exécutif hyperpuissant. Certes,le texte du leader du FSD/BJ est condamnable au premier degré mais si on l’analyse selon le contexte politicojudiciaire qui en est le prétexte, on peut tempérer les ardeurs et mettre un bémol aux vociférations d’indignation des magistrats.
La menace d’une sanction exemplaire brandie par Souleymane Téliko trahit l’existence de cette justice à deux vitesses que flétrissent quotidiennement les Sénégalais. Si l’ancien ministre de la Communication du président Sall doit être condamné pour ses propos qui ciblent nommément deux juges, faudrait-il alors guillotiner Moustapha Cissé Lo ? Pour cause, le vice-président de l’Assemblée nationale a tenu les propos gravissimessuivants qui jettent l’opprobre sur toute la magistrature sénégalaise : « Tous les citoyens ne sont pas traités sur un pied d’égalité. Les enfants des personnalités commettent souvent des choses répréhensibles mais ils ne sont pas emprisonnés. C’est presque leur jeu favori.Une personne habitant Touba a détourné une centaine de millions appartenant à la dame Oumy Thiam. Malheureusement, elle continue de vaquer librement à ses occupations.Des gens qui ont détourné 100 mille francs Cfa purgent des peines en prison. Il n’y a pas de justice au Sénégal. C’est regrettable, mais le fait existe bel et bien. Les magistrats ne jugent pas équitablement et dansleur intime conviction. Ils font n’importe quoi.Lesjuges ne rendent pasles décisions correctement. »
Comme réaction timorée, voici le laconique communiqué servi le 12 mars 2018 par le bureau de l’UMS : « De tels propos, venant d’une personne incarnant desinstitutions aussi respectables que l’Assemblée nationale et le Parlement de la CEDEAO, constituent, outre leur caractère outrageant, des dérapages inadmissibles et un manquement grave aux principes qui régissent les rapports entre les institutions de la République. L’UMS les condamne vigoureusement et appelle tout le monde au sens de la mesure et au respect du a nos institutions. »
C’était tout ! Où était l’UMS pendant que les députés se comportaient comme des hors-la loi en cassant un arrêt daté du 23 septembre 2015 de la Cour suprême dont le seul tort est d’avoir annulé l’arrêté d’exclusion illégal des élèves-instituteurs ? Une résolution de soutien en faveur du ministre de l’Education nationale a été votée le 28 décembre 2015 par les parlementaires présents à la séance plénière pour rejeter la décision de la plus haute juridiction de ce pays. Dans une démocratie quise respecteet où la séparation des pouvoirs et l’indépendance de la justice sont une réalité, le couple exécutif-législatif ne contrôle pas le judiciaire et, par voie de conséquence, ne connait pas de la compétence de juger ou de déjuger une décision de justice.
Récemment, le ministre Mansour Faye a tenu des propos désobligeants à l’encontre des juges de la CEDEAO dont fait partie notre compatriote Aliou Sall. L’UMS qui s’indigne à la moindre incartade des opposants de Macky Sall a fait profil bas. Dans sa chronique du 13 décembre 2017, le journaliste Pape Alé Niang a déclaré que l’arrestation de Khalifa Sall a été concoctée au palais présidentiel au cours d’une réunion tenue en présence de Macky Sall et d’Oumar Youm, directeur de cabinet. Auraient assisté à ce conclave, Samba Sall, doyen des juges, Serigne Bassirou Guèye, procureur de la République, juge Maguette Diop, Antoine Diome, Agent judiciaire de l’Etat, Malick Lamotte, Demba Kandji, Lansana Diaby, Procureur général de la Cour d’Appel de Dakar, Gallo Syr Diagne, président Chambre d’accusation, Cheikh Tidiane Coulibaly, procureur général de la Cour Suprême, Mamadou Badio Camara, président de la Cour Suprême, Pape Oumar Sakho, président du Conseil constitutionnel. En guise de réaction à cette accusation gravissime de Pape Alé Niang, la structure dirigée par le président Souleymane Téliko, qui n’est pas une juridiction, avait publié un communiqué dans lequel elle avait à son tour accusé le journaliste de «vouloir jeter l’anathème sur la corporation des juges et des procureurs de la Justice sénégalaise». Selon ce communiqué, tous les collègues incriminés que «l’UMS a pu interpeller ont tous formellement démenti avoir pris part à une telle rencontre». Par conséquent, l’UMS disait donc condamner «fermement de tels propos qui, non seulement, portent atteinte gravement à l’honorabilité des magistrats, mais aussi contribue à jeter le discrédit sur l’Institution judiciaire tout entière».
Accusation ne saurait être plus grave que ces propos de Pape Alé qui touchent le gratin judiciaire du Sénégal. Et bizarrement tous ces magistrats constituent la chaine judiciaire qui est intervenue dans l’exécution politique définitive du maire de Dakar. Il ne reste que Cheikh Tidiane Coulibaly et Mamadou Badio, respectivement procureur général et président de Cour suprême pour donner le coup de grâce qui consacrera l’enterrement politique du député-maire de Dakar conformément au souhait du patron de la magistrature nationale, le président Macky Sall.
Cheikh Bamba Dièye a dit tout haut ce que les Sénégalais pensent tout bas
Et c’est en se fondant sur l’ensemble des éléments qui mettent à nu cette justice à deux vitesses réprimant les opposants du président et passant l’éponge sur toutes les exactions de ses partisans et alliés qu’il faut analyser la déclaration du député Cheikh Bamba Dièye. Une déclaration que beaucoup de Sénégalais partagent, du reste. Pour cause, depuis 1960, jamais nos compatriotes n’avaient assisté à pareil acharnement judiciaire contre les hommes politiques de l’opposition ou contre des citoyens qui ne s’adaptent pas au moule sacrosaint de l’establishment apériste. Il suffit de faire un tour dans les réseaux sociaux pour se rendre compte du nombre inestimable de Sénégalais qui adhèrent aux propos critiques du parlementaire. Il est à souligner que la corruption judiciaire entre dans deux catégories : l’ingérence politique du pouvoir exécutif ou législatif dans les procédures judiciaires, d’une part, et la pratique des pots-de-vin, d’autre part.
Par conséquent, quand Cheikh Bamba Dièye parle de juges corrompus, il ne faut pas a priori penser que Demba Kandj et Malick Lamotte ont reçu des pots-de-vin pour condamner Khalifa Sall. Il sous-entend plutôt qu’ilsse sont pliés au diktatdes pouvoirs exécutif et législatif dans la procédure judiciaire enclenchée depuis le déclenchement de l’action publique par la police judiciaire (sur injonction du procureur de la République) en passant par l’inculpation puis le placement sous mandat de dépôt par juge d’instruction jusqu’à la condamnation par le Lamotte et la confirmation, à coup presque sûr, de la peine prononcée en première instance par Demba Kandj. Si le président Téliko lui-même déclare qu’« avec ce qu’on entend, depuis un certain moment, la situation dépasse les limites du raisonnable (…) ces attaques constituent des atteintes intolérables à la dignité de la justice, qu’elles contribuent à fragiliser », c’est parce que cette justice a fini de s’auto-décrédibiliser par ses pratiques iniques. D’ailleurs, le patron de l’UMS a reconnu, dans son discours introspectif voire cathartique tenuce samedi 4 août à Saly, lors de l’assemblée ordinaire de sa structure, que la justice à deux vitesses en pratique dans notre paysfait le lit de toute la palanquée de critiques formulées contre les magistrats. C’est en cela qu’il faut analyser ses propos : « Nous avons le devoir d’assumer notre part de responsabilité dans tout ce qui advient au sein de l’institution judiciaire…La considération et le respect auxquels nous avons droit nous sont accordés sous réserve de l’application scrupuleuse des principes qui garantissent la tenue d’un procès juste et équitable. C’est le droit pour chaque magistrat de traiter le dossier qui lui est soumis conformément à la loi et à sa conscience mais c’est notre devoir à nous tous de veiller à ce que rien ne soit de nature à susciter suspicion et rupture de confiance. Or, il nous faut reconnaitre que les activités et déclarations politiques que certains de nos collègues font en violation flagrante de notre statut, la sélectivité dans le traitement des dossiers, le rythme particulier auxquelles sont soumises certaines affaires, les postures et positions de certains d’entre nous contribuent à conforter dans l’esprit de nos concitoyens le sentiment d’une justice à deux vitesse et aux ordres. Rien ne peut justifier que la justice de notre pays soit à ce point indexée. Pour mettre fin à ces dérives, il nous faut donc, parallèlement aux condamnations et poursuites judiciaires, apprendre à nous conformer davantage à notre serment. »
Il apparait que la justice sénégalaise telle qu’elle fonctionne estsujette à moultcritiques. Si elle n’est pas suspectée de laxisme, elle est accusée de partialité. Même les magistrats partagent et reconnaissent eux-mêmes ce sentiment de malaise et ces manquements qui discréditent la justice. La démission du procureur Dème de la magistrature, la sortie de l’intrépide juge Yaya Dia déclarant valide la candidature de Karim Wade à la présidentielle là où les « Sages » du Conseil constitutionnel lui porteront l’estocade et la révolte de jeunes magistrats qui risque de sourdre très prochainement sont autant d’éléments qui prouvent ce manque de dignité de la justice. Par conséquent, si l’institution judiciaire a perdu son honorabilité, c’est parce que la magistrature s’est transmuée en « mackystrature » et qu’une bonne partie de ses éléments a troqué sa robe noire contre des camisoles marron-beige. Car depuis l’accession de Macky Sall à la présidence de la République, le pouvoir judiciaire est utilisé la plupart du temps pour des règlements de comptes politiques qui se concluent par l’embastillement des responsables de l’opposition ciblés. Karim Wade, Oumar Sarr, El Hadj Amadou Sall, les jeunes karimistes, Bamba Fall, Barthélémy Dias, Toussaint Manga et les partisans de Khalifa Sall ne diront pas le contraire.
Ainsi cette ingérence du politique dans le traitement de certains dossiers judiciaires pour des raisons liées à l’impératif de l’élection sans anicroche du président Sall au premier tour de la présidentielle de 2019 n’est rien d’autre qu’une corruption. C’est là tout le sens des propos du député Cheikh Bamba Dièye. Et s’il y en a qui se sentent morveux, eh bien… qu’ils se mouchent !
Serigne Saliou Guèye