Si aucune loi n’interdit à un fonctionnaire ou autre membre de l’Administration publique, outre les douaniers, magistrats et les inspecteurs généraux d’État, d’avoir des activités politiques au nom de la liberté d’association, leur implication politique peut être sujette à discussion, notamment quand il s’agit de légiférer sur des aspects concernant leur corps d’origine.
Au Sénégal, la classe politique ou le personnel politique, pour asseoir ses politiques publiques, s’est longtemps appuyé sur l’Administration publique. Cette situation a poussé de jeunes cadres de l’Administration au-devant de la scène politique. Cette immixtion de fonctionnaires ou de cadres de la Fonction publique est aussi consécutive de l’importance des énarques dans la vie politico administrative du Sénégal. Ainsi, dès la fin des années 60, l’instauration du parti unique favorise rapidement l’ascension de jeunes fonctionnaires qui vont s’imposer au sommet de l’État avec Abdou Diouf, ancien gouverneur du Sine-Saloum et de jeunes cadres comme Moustapha Niasse et Djibo Ka qui vont s’imposer petit à petit au sein de l’UPS et plus tard du Parti socialiste.
Cette élite administrative va rapidement phagocyter l’élite politique avec l’épanouissement du système clientéliste sous Abdou Diouf. L’accession à certains postes de la haute administration permettant à tout fonctionnaire d’atteindre un certain niveau de richesse exceptionnel, ceux-ci peuvent dès lors entretenir leur clientèle politique. Cette tendance va connaitre son paroxysme sous Abdoulaye Wade où nombre de technocrates ont été forcés et se sont sentis obligés de s’engager politiquement, pour ne pas perdre leur poste. Le mouvement de fond s’est poursuivi avec l’actuel régime où beaucoup de fonctionnaires s’engagent pour avoir des avantages, mais aussi favoriser leur avancement au sein de la haute administration.
La nomination de Mamadou Guèye, jeune maire de Djeddah Thiaroye comme directeur des Domaines en février dernier, a fait jaser au sein de l’administration des impôts et des domaines. Beaucoup de ses détracteurs ont rapidement fait le lien entre cette promotion et son engagement politique au sein de l’APR. Ils ont fait remarquer que des profils plus anciens ont été zappés au profit de l’ex-chef du Centre des moyennes entreprises numéro un de la Direction générale des Impôts et des Domaines. Aujourd’hui, le constat est que les directeurs de sociétés publiques, les responsables de départements ministériels, les directeurs, les directeurs d’agences nationales se sont lancés à corps perdu dans la chose politique.
En outre, à l’heure de la floraison des partis politiques (près de 270), la politique apparait comme un moyen rapide d’ascension sociale et d’accès aux privilèges, une fois arrivé au pouvoir. De ce fait, les fonctionnaires semblent décidés à être partie prenante de ce système qui permet aux administrateurs de vassaliser l’outil politique.
Sources: Enquete
*Le titre est de l'essentiel.sn