Meurtre de Bineta Camara : le comble de l'horreur

TRIBUNE LIBRE
Mardi 21 Mai 2019

Bineta Camara, une voilée respectueuse habitant le quartier Sara Guilèle de Tambacounda a été retrouvée violés puis assassinée. L’information a fini de gâcher la journée à plus d’un Sénégalais. Certains comme moi vont jusqu’à vouloir dire des choses qui dépassent leur pensée.


Franchement,  le Sénégal est un pays complexe. Aussi religieux que permissif. Aussi moderne que traditionnel. Pudique et à la fois pervers. Il regorge de saints, mais compte aussi des pervers de tout acabit. Chaque année, des cas de viols et des meurtres crapuleux se comptent par centaines. Un maître coranique qui se laisse tenter par Satan. Un professeur qui oublie son sacerdoce, ne se concentrant que sur les rondeurs naissantes d’une élève précoce. Un oncle qui profite de l’absence de la famille pour profiter de la peur révérencieuse que sa nièce a à son endroit. Un homme de tenue qui bafoue la loi qu’il est chargé de protéger uniquement pour satisfaire sa libido. Un père qui confond sa fille à sa femme… Des cas de viol pareils noircissent tous les jours les pages «faits divers» des journaux.

Comme les viols, les morts d’homme sont tout aussi «banalisés». Les agresseurs sévissent et ôtent des vies pour se remplir les poches. La route continue de faire d’innombrables victimes surtout lors des grandes manifestations religieuses, du fait de l’indiscipline des « chauffards ».

Mais le fait nouveau, c’est le «raffinement dans la barbarie» et le sadisme sans limite de certains crimes auxquels on assiste. Au Sénégal, on peut maintenant se permettre de violer une voilée en plein mois de ramadan avant de la tuer. On peut découper une pauvre dame en 13 morceaux (Fama Niane). On peut zigouiller une innocente femme et lui crever les yeux (Mously Lô).  On peut dépiécer une pauvre dame de 62 ans, vendeuse de cacahuètes et  enterrer ses boyaux sur place, après avoir empilé les parties de son corps dans des bassines en caoutchouc (Maïmouna Dione). Tout ceci n’est pas sorti du synopsis d’un film d’horreur. Ce sont des horreurs « made in Sénégal », perpétrées par des gus sans foi, ni loi.

Le comble, c’est que l’indignation des Sénégalais ne dure que le temps d’une rose, comme si plus rien ne nous étonne.  Désolé de le dire, mais tous nos repères moraux foutent le camp.

Il y avait des gens  comme moi qui croyaient (bêtement ?) qu’un malfaiteur, aussi sadique soit-il, ne s’en prendrait jamais aux personnes qui ne savent pas se défendre. Je pensais naïvement que le plus endurci des criminels aurait des scrupules face à un malade, un enfant, un handicapé, une femme enceinte ou un vieillard.

Je ne savais pas que les délinquants «de type nouveau», ceux qui ont signé le meurtre de Bineta Camara, ceux qui ont liquidé le boutiquier handicapé de Saint-Louis et ceux qui ont violé tour à tour une épileptique de 80 ans à Thiaroye Guinaw-rail, n’ont cure de ces considérations de «faux durs». Ni les supplications du jeune boutiquier, qui n’a pas de vigueur aux pieds pour courir ou se défendre, ni la condition de mère Ndioufa, une dame âgée, vivant seule dans des conditions misérables et malade de surcroit, ni le voile de Bineta Camara et le mois béni de Ramadan n’ont refroidi les ardeurs meurtrières et libidinales de ces connards. Ils ont liquidé froidement la pauvre Bineta après l’avoir souillée. Toute honte bue.

C’est aussi ça le Sénégal. «Pays de la téranga» où les gens sont capables du meilleur,  comme ils peuvent faire du mal aussi facilement qu’ils sirotent leurs «trois normaux».

Daouda MINE / Igfm