«Quand un ministre de l'Inférieur et un gardien de la Confusion tiennent un pays, l'heure devient grave. (...)». C’est une partie de votre discours devant vos disciples et sympathisants. Vous m’avez rappelé mes années universitaires, quand la poche était vide, on sortait cette phrase : «l’heure est grave». Effectivement, elle l’est aujourd’hui. L’heure est d’autant plus grave que c’est vous qui avez dit ce que les médias ont rapporté.
En cette nuit honorable, bénéfique, on s’attendait à un autre que ce discours. Je m’attendais à ce que vous rappeliez la vie du Prophète afin que les musulmans saisissent et s’approprient une de ses innombrables valeurs et la suive afin qu’ils connaissent la félicité en suivant les pas de notre Prophète Mouhammad (saws). Votre sortie a raté. Pardon. Ou bien, il fallait tout simplement appeler à un Meeting politico-religieux.
La nuit du Mawlid’In’Nabii (saws) est un «champ». Et tous les fidèles musulmans qui acceptent et partagent cette pratique étaient en «course». Mais, le «Champs de courses de Tivaouane», lieu symbolique, a été transformé en esplanade de meeting politique ou de déclarations douteuses, de par leur caractère invérifiables pour les esprits citriques. Si votre objectif était de faire parler de vous, la communication a réussi. Bravo !
A vous entendre, c’est donc vous qui avez fait partir Abdou Diouf, en 2000, du pouvoir. Souffrez que je conteste votre affirmation. En 2000, il y a juste dix-sept ans, ce sont les sénégalais, las d’un système qui les plongeait, année après année, dans les précipices de la pauvreté, de la violence (série d’agressions), du recul social donc, et autres difficultés, qui l’ont fait partir par les urnes. En atteste les résultats des élections.
Mais supposons que ce soit vous qui l’avez fait partir. Pourquoi attendre que le peuple en ait vraiment marre, pour intervenir mystiquement ? Pourquoi attendre que des milliers de sénégalais (parmi eux vos disciples peut-être) vivant en Casamance soient tués, que des centaines de milliers d’autres soient déplacés, que l’économie soit détruite, entre autres interrogations, pour intervenir et faire partir Diouf ?
«Je ne le dis pas par vanité». C’est la suite votre propos. Pourquoi cette précision ? Saviez-vous, logiquement, que votre propos sonnait mal et douteux dans l’opinion sénégalaise ? Cette précision vous inculpe dans «l’esprit» de l’opinion publique sénégalaise qui n’est pas composée que de vos disciples et sympathisants qui peuvent consommer, sans transformer, sans adapter et sans modération, vos propos.
Ainsi vous avez également fait partir George Bush Junior, quand vous avez constaté qu’il causait des préjudices aux musulmans. Vous avez, là aussi, attendu que ses deux mandats constitutionnels s’achèvent, huit longues années, pour neutraliser son «esprit protecteur» et intervenir pour le faire partir. Combien de musulmans l’ont maudit, insulté, lu le Coran contre lui ? Il a terminé ses deux mandats tout de même.
C’est donc Serigne Moustapha Sy, qui, en 2012, a fait partir Abdoulaye Wade. Soufrez que je considère vos propos comme injurieux aux yeux de l’opinion publique sénégalaise. Qui n’a pas suivi le feuilleton ayant précédé le départ de Wade du pouvoir au Sénégal et un peu partout à travers le monde ? Là aussi, vous avez attendu que le peuple ait souffert, qu’il y ait de morts, avant d’intervenir. Que dites-vous de ma carte d’électeur ?
Vous avez déclaré que «Jammeh» fait partie de vos victimes. Ici aussi, vous avez attendu vingt-deux ans de violence, d’arrestations et d’emprisonnements arbitraires, de disparitions d’opposants, d’assassinats de journalistes et d’opposants pour intervenir. Mieux, après que les gambiens aient choisi un autre dirigeant. Le départ de Jammeh du pouvoir a été possible grâce à la pression exercée par les forces de la Cedeao, sous la direction de Macky Sall.
Ainsi, M. Sy, vous avez le «Rawhane» ou Esprit protecteur de Macky Sall entre vos mais. Un esprit que vous pouvez dompter puis faire partir le Président que les sénégalais ont majoritairement élu en 2012, en toute démocratie, dans un contexte socio-politico-religieux chargé. La menace est inacceptable dans une république démocratique. Nous ferons face. Je vous suggère donc de retirer vos propos.
Si vous lisez le Qur’an, le livre Saint que nous partageons donc, vous devez savoir ceci : «Dis: O Allah, Maître de l’autorité absolue. Tu donnes l’autorité à qui Tu veux, et Tu arraches l’autorité à qui Tu veux; et Tu donnes la puissance à qui Tu veux, et Tu humilies qui Tu veux. Le bien est en Ta main et Tu es Omnipotent». [Coran 3: 26] ». Ici, Allah enseigne que c’est lui donne et reprend le pouvoir.
Quant à Macky Sall qui peut être votre prochaine cible, s’il ne libère pas Khalifa Sall, l’homonyme d’un des vénérables guides de Tivaouane, je lui rappelle pour le reconforter, en tant que musulman : «Certes ceux auxquels l'on disait : "Les gens se sont rassemblés contre vous; craignez-les" - cela accrut leur foi - et ils dirent : Allâh nous suffit ; Il est notre meilleur garant». (Sourate Al Imran verset 173-174).
Je terminerai par vous dire que vous avez déçu. En ce sens que tous ceux qui étaient devant vous, ne sont pas dupes et savent que os propos sont «invérifiables». Allez comprendre le sens caché de cette phrase. Ils ne sont pas tous contre Macky Sall que vous semblez menacer. Pire, vous prenez le contrepied de votre nouveau Khalife qui a prédit un second mandat en faveur de Macky. Une énième division à Tivaouane.
Dans sa Lettre à César, roi de Rome, Mouhammad (saws), Notre Bien Aimé, a dit, après ceci : «Au nom de Dieu, L’infiniment Miséricordieux, le très Miséricordieux. Lettre de Muhammad, le serviteur et le Messager de Dieu à Héraclius, empereur de Rome. Que la paix soit sur ceux qui suivent la voie droite. Accepte de te soumettre. Embrasse l’Islam et Dieu te récompensera deux fois. Si tu te détournes et refuses, tu porteras les péchés des Romains».
Ici, il s’agit d’une invitation, dans la Paix, de voie droite et de récompense divine. Aucune menace parce qu’Il sait qu’Allah guide qui Il veut et égare qui Il veut. L’exemple de son oncle Abou Tâlib, père du quatrième Khalife, Seydina Aliou, le Brave et l’Erudit, est assez illustratif. On peut en citer d’autres, des centaines, où Mouhammad a fait preuve de miséricorde plutôt que de se venger, à plus forte raison de menacer.
Vous avez procédé à un détournement d’objectif spirituel. Ce rassemblement n’était pas une tribune politique. Il était sous la bannière de l’Islam et de sa branche Tidjaniyya. Cette nuit devait être une nuit de rappel et de prières. Une nuit d’enseignements et de recueillements. Une nuit de grâces et non de diatribes contre les politiques. Je signale que vous vous êtes mis à dos vos sympathisants qui militent dans le parti au pouvoir.
Ce matin (samedi), dans un bus, vos propos étaient le principal sujet de débat. «Il ne devait pas le dire», «il a trop dit», «il cherche à se faire remarquer», «il a pris le contre-pied du Khalife », «Tivaouane sera à jamais divisé»… Chacun y allait de son commentaire. Quant à moi, je vous adresse cette lettre pour vous dire que je ne partage pas vos propos, vous dire que le peuple seul élit et remercie ses dirigeants. Was’salaam !
Mamadou Lamine BA
Citoyen sénégalais
Journaliste communicant
Email : ballamine@gmail.com
Tel : 77 999 32 55