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Toutes les jointures sont ancrées dans les entrailles de la relation ou, plus exactement, dans les tréfonds de l’osmose entre le Sénégal et La Mauritanie. Tout a collé voire soudé les deux pays : La géographie, la religion et les trois séquences essentielles de l’Histoire (avec un grand H) que sont les phases précoloniale, coloniale et postcoloniale. A l’apogée du colonialisme français, les deux territoires ont pratiquement partagé la même chaine de commandement et le même personnel administratif. Les vestiges sont encore visibles à Saint-Louis. Je recommande aux uns et aux autres, le livre du Commandant François Beslay intitulé « Les Reguibats ». Cet officier français a commandé les méharistes et les goumiers dans le désert mauritanien, après la Seconde Guerre, avant de contribuer, par le biais de l’assistance technique, à la création de l’armée mauritanienne en 1960. Armée qu’il a momentanément commandée. Son ouvrage est une mine d’informations qui démontre combien la Mauritanie fut rattachée à l’Afrique Occidentale Française (AOF) et, surtout intégrée au giron administratif franco-sénégalais.
Après la domination étrangère rigoureusement partagée (la longue nuit coloniale) les deux Etats émancipés ont fait solidairement irruption dans le concert des nations libres. Le Sénégal, membre du « Groupe de Monrovia » – par opposition au « Groupe de Casablanca » – repoussa diplomatiquement les velléités annexionnistes du Maroc, en direction de la jeune et frêle République Islamique de Mauritanie. Même si la position du Sénégal était aveuglément alignée sur celle de la France désireuse de créer une entité mauritanienne, afin de faire main basse sur le minerai de fer de Zouerate via la MIFERMA, la posture de Dakar a aidé indiscutablement au sauvetage de la Mauritanie, des visées expansionnistes de Rabat. Donc à l’avènement d’une Mauritanie indépendante. A une époque où la Guinée de Sékou Touré, le Mali de Modibo Keita et le GPRA algérien étaient chaudement en faveur des thèses de Mohamed V, père du futur Hassan II. Dans la tourmente (une tension croissante prévaut actuellement entre les deux pays), il est sain, judicieux et utile de revisiter les étapes et les repères historiques, pour mieux mettre le cap sur l’avenir qui imposera, tôt ou tard, la coopération dans la paix.
A cet égard, rappelons que le Président Mocktar Ould Daddah, artisan de l’indépendance de la Mauritanie, a fait son stage d’avocat dans le cabinet de Maitre Boissier Palun, membre fondateur et argentier du BDS, c’est-à-dire l’ancêtre du PS de Léopold Sédar Senghor et d’Ousmane Tanor Dieng. Ce brassage entre les élites pionnières explique l’étroitesse légendaire des relations longtemps émaillées de de confiance entre le Sénégal et la Mauritanie. Il est clair que l’amitié entre les deux premiers Présidents du Sénégal et de la Mauritanie a hâté la naissance de l’Organisation des Etats Riverains du Fleuve Sénégal (OERS) qui a cédé la place à la très exemplaire OMVS. Mieux, ces liens-là ont des volets secrets et moins secrets qui, à deux reprises, ont mis la Mauritanie à l’abri de la déstabilisation et/ou de l’effondrement. Le défunt Président Mocktar Ould Daddah révèle dans ses « Mémoires », un geste très amical de son homologue sénégalais, feu le Président Senghor, qui, au cours d’une brève escale sur l’aéroport de Nouakchott, lui conseilla de faire attention vis-à-vis du nouvel ambassadeur de France d’alors, Jean-François Deniau, muni d’un agenda caché. Le même Senghor – décidément solidaire de la Mauritanie – convaincra Valéry Giscard d’Estaing, d’utiliser les bombardiers « Jaguar » pré-positionnés à Dakar, contre les colonnes mobiles du Polisario, sur le point de submerger les unités de l’armée mauritanienne.
Ces faits – parmi d’autres – ont valeur de vraies jointures. Malheureusement, elles n’ont pas empêché la fracture béante saignante et abyssale de 1989-1990 qui, tel un ressort définitivement brisé, a créé un état de cancérisation dans la relation sénégalo-mauritanienne. Une dégradation amplifiée par des péripéties anciennes et des phénomènes nouveaux, tous porteurs de tensions voire de clash. Sinon de potentiels casus belli. En effet, l’arrivée des militaires en 1978 (coup d’Etat militaire du 10 juillet contre Ould Daddah) a secoué l’axe Dakar-Nouakchott. En 1979, le Colonel Mohamed Khouna Ould Haïdallah (tombeur du Colonel Moustapha Ould Saleck, bourreau du Colonel Bouceif et pro-algérien notoire) a soudainement alarmé Dakar. Affolé par la perspective d’avoir une frontière commune avec l’Algérie de Houari Boumediene, via une Mauritanie infiltrée et dominée par le Polisario, le Président Senghor – un an avant son départ du pouvoir – nourrit l’idée d’un glacis (une sorte de cordon sanitaire) le long du Fleuve Sénégal.
A cet effet, les services secrets sénégalais ont enrôlé un MDL de la Gendarmerie mauritanienne du nom de A…D. La mission du sous-officier mauritanien et déserteur a été de créer le Front de Libération du Fouta, du Walo et du Guidimakha : le WALFOUGUI. La manœuvre avait pour but, de favoriser la naissance – sur une ligne qui va du barrage de Diama à la ville de Sélibaby – d’un Etat-tampon, fantoche et protecteur du Sénégal (un glacis) dans le cas de figure où l’Algérie via le Polisario et avec la complicité du Colonel Haïdallah, prendrait le contrôle de la Mauritanie. Une éventualité cauchemardesque pour le premier chef de l’Etat du Sénégal dont les rapports avec l’Algérien Boumediene ont toujours été exécrables. Voilà l’épisode le plus secret de la relation sénégalo-mauritanienne. Très peu connu du grand public. Des acteurs politiques de premier plan l’ignorent également. Pour la petite histoire, c’est un proche collaborateur du Président Senghor, Djibril Yade (le père de la ministre française Rama Yade) qui assurait les contacts et le suivi entre le Secrétaire général du fameux WALFOUGUI et le Palais présidentiel du Sénégal, durant les années 1979 et 1980.
Il va sans dire qu’un tel grenouillage – même vital et prospectif pour les intérêts géopolitiques du Sénégal – mit en grande colère, le Comité Militaire de Salut National présidé par le Colonel Haïdallah. Ce dernier confiera à un ancien ministre ouest-africain : « Le Sénégal doit se rappeler qu’il a un ventre mou qui s’appelle la Casamance. Par conséquent, il ne peut pas conspirer impunément contre la Mauritanie ». Bien entendu, la Mauritanie n’a pas créé la rébellion en Casamance, mais elle a joué sa partition déstabilisatrice, sous les régimes successifs des Présidents Ould Haïdallah et Ould Taya. Est-ce un hasard si le réveil militaire du MFDC a commencé, en décembre 1982 ? Soit deux ans avant la chute du Président Haïdallah en 1984.
Par ailleurs, la détérioration des relations entre les deux Etats a également été marquée, le 11 mars 1981, par la tentative de coup d’Etat d’inspiration marocaine, conduite, à partir du territoire sénégalais, par les Colonels exilés et factieux, Salem Ould Sidi et Mohamed Bah Ould Kader. Bref, des secousses, des tensions, des coups obliques et réciproques qui ont culminé, en 1989, avec la crise ayant installé les deux pays au bord de la guerre. Au chapitre des ripostes appropriées, le Président Ould Taya reçut, en 2000, l’ennemi du Sénégal en Guinée-Bissau (feu le Général Ansoumane Mané) à la « Maison Brune », le Palais présidentiel. Audience tenue en présence de feu le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, directeur de la Sûreté nationale. Toute une dune d’antécédents qui obstruent durablement l’horizon de la coopération bilatérale. Et, parfois multilatérale puisque la Mauritanie s’oppose fermement à l’arrivée du Sénégal dans le G 5 Sahel. Tout comme, elle a roulé pour Yaya Jammeh contre la CEDEAO et, singulièrement contre le Sénégal, lors de la crise gambienne.
En vérité, Nouakchott a tiré les leçons traumatisantes de la fracture des années 89-90, puis élaboré une « doctrine sénégalaise » faite de rancœurs, de vigilance et de précautions. Les commerçants maures qui, jadis essaimèrent jusque dans les plus petits hameaux du Sénégal, ont disparu du panorama, malgré la normalisation matérialisée par la reprise des relations diplomatiques. Par petites vagues, des Mauritaniens fortunés débarquent au Sénégal, pour des soins médicaux ou des opérations commerciales de courte durée. A l’occasion de la Tabaski, des éleveurs franchissent le fleuve et écoulent vite les animaux puis rentrent. Quant aux camélidés (les chameaux), ils sont désormais aiguillonnés vers les pâturages situés en territoire malien. Voilà qui n’augure rien de rassurant autour de l’exploitation conjointe de ce pétrole et de ce gaz trop périlleusement limitrophes des deux pays. Une conjoncture gazière et pétrolière opportunément choisie par l’Etat-major des armées mauritaniennes, pour édifier un double port de guerre et de pêche à Ndiago, en bordure de la frontière.
L’Histoire ne se répète pas mais elle bégaie. Le Sénégal de Macky Sall n’accueille aucune instance dirigeante ou active des Forces de Libération Africaines de Mauritanie (les FLAM) qui, d’ailleurs, ne sont plus brûlantes. Elles sont en voie d’extinction sur l’échiquier politique et sur l’autel d’une collusion démocratique avec la dictature militaire bellement parée des oripeaux de la démocratie. Par contre, une poignée d’opposants irréductibles et de personnalités mal vues par le Général Abdelaziz, déambulent souvent à Dakar, pour des raisons et des motifs variés. Des gens que les services de renseignement mauritaniens surveillent à distance, tandis que la sécurité du Sénégal veille sur tout et tous, conformément à sa mission permanente.
Parmi ceux-là, figure l’opposant banquier et milliardaire Ould Bouamatou (réfugié au Maroc) qui fait des va-et-vient entre Rabat et Dakar où il dispose d’une villa à Fann-Résidence. Il est catalogué comme le Fethullah Gulen de la Mauritanie qui financerait tout et tous (les manifestations, les sénateurs congédiés, les journalistes etc.) contre le Président Mohamed Ould Abdelaziz. L’autre bête noire que Nouakchott localise, de temps à autre, à Dakar, est le fameux Limame Chaffi, toujours ami et conseiller de l’ex-Président Blaise Compaoré. Une fraction de sa famille et de ses biens immobiliers se trouvent à Dakar. D’après certaines sources, il convoierait des tonnes de riz vers le Sénégal. Récemment, Limame Chaffi a été signalé dans le sud de la Libye où il a accompli une mission de réconciliation entre deux tribus Toubou, à la demande du Qatar. Mission, semble-t-il, bien payée en dollars. Un trésor de guerre politique qui truffe d’inquiétudes, les journées du Président mauritanien. Tel est l’arrière-plan de la glaciation des rapports entre le Sénégal et la Mauritanie. Finalement, le séjour de l’anti-esclavagiste Biram Dah Ould Abeid et sa conférence de presse avortée, sont les deux gouttes d’eau qui ont fait déborder un vase déjà rempli de ressentiments vifs et anciens, à l’endroit du Sénégal.
Après la domination étrangère rigoureusement partagée (la longue nuit coloniale) les deux Etats émancipés ont fait solidairement irruption dans le concert des nations libres. Le Sénégal, membre du « Groupe de Monrovia » – par opposition au « Groupe de Casablanca » – repoussa diplomatiquement les velléités annexionnistes du Maroc, en direction de la jeune et frêle République Islamique de Mauritanie. Même si la position du Sénégal était aveuglément alignée sur celle de la France désireuse de créer une entité mauritanienne, afin de faire main basse sur le minerai de fer de Zouerate via la MIFERMA, la posture de Dakar a aidé indiscutablement au sauvetage de la Mauritanie, des visées expansionnistes de Rabat. Donc à l’avènement d’une Mauritanie indépendante. A une époque où la Guinée de Sékou Touré, le Mali de Modibo Keita et le GPRA algérien étaient chaudement en faveur des thèses de Mohamed V, père du futur Hassan II. Dans la tourmente (une tension croissante prévaut actuellement entre les deux pays), il est sain, judicieux et utile de revisiter les étapes et les repères historiques, pour mieux mettre le cap sur l’avenir qui imposera, tôt ou tard, la coopération dans la paix.
A cet égard, rappelons que le Président Mocktar Ould Daddah, artisan de l’indépendance de la Mauritanie, a fait son stage d’avocat dans le cabinet de Maitre Boissier Palun, membre fondateur et argentier du BDS, c’est-à-dire l’ancêtre du PS de Léopold Sédar Senghor et d’Ousmane Tanor Dieng. Ce brassage entre les élites pionnières explique l’étroitesse légendaire des relations longtemps émaillées de de confiance entre le Sénégal et la Mauritanie. Il est clair que l’amitié entre les deux premiers Présidents du Sénégal et de la Mauritanie a hâté la naissance de l’Organisation des Etats Riverains du Fleuve Sénégal (OERS) qui a cédé la place à la très exemplaire OMVS. Mieux, ces liens-là ont des volets secrets et moins secrets qui, à deux reprises, ont mis la Mauritanie à l’abri de la déstabilisation et/ou de l’effondrement. Le défunt Président Mocktar Ould Daddah révèle dans ses « Mémoires », un geste très amical de son homologue sénégalais, feu le Président Senghor, qui, au cours d’une brève escale sur l’aéroport de Nouakchott, lui conseilla de faire attention vis-à-vis du nouvel ambassadeur de France d’alors, Jean-François Deniau, muni d’un agenda caché. Le même Senghor – décidément solidaire de la Mauritanie – convaincra Valéry Giscard d’Estaing, d’utiliser les bombardiers « Jaguar » pré-positionnés à Dakar, contre les colonnes mobiles du Polisario, sur le point de submerger les unités de l’armée mauritanienne.
Ces faits – parmi d’autres – ont valeur de vraies jointures. Malheureusement, elles n’ont pas empêché la fracture béante saignante et abyssale de 1989-1990 qui, tel un ressort définitivement brisé, a créé un état de cancérisation dans la relation sénégalo-mauritanienne. Une dégradation amplifiée par des péripéties anciennes et des phénomènes nouveaux, tous porteurs de tensions voire de clash. Sinon de potentiels casus belli. En effet, l’arrivée des militaires en 1978 (coup d’Etat militaire du 10 juillet contre Ould Daddah) a secoué l’axe Dakar-Nouakchott. En 1979, le Colonel Mohamed Khouna Ould Haïdallah (tombeur du Colonel Moustapha Ould Saleck, bourreau du Colonel Bouceif et pro-algérien notoire) a soudainement alarmé Dakar. Affolé par la perspective d’avoir une frontière commune avec l’Algérie de Houari Boumediene, via une Mauritanie infiltrée et dominée par le Polisario, le Président Senghor – un an avant son départ du pouvoir – nourrit l’idée d’un glacis (une sorte de cordon sanitaire) le long du Fleuve Sénégal.
A cet effet, les services secrets sénégalais ont enrôlé un MDL de la Gendarmerie mauritanienne du nom de A…D. La mission du sous-officier mauritanien et déserteur a été de créer le Front de Libération du Fouta, du Walo et du Guidimakha : le WALFOUGUI. La manœuvre avait pour but, de favoriser la naissance – sur une ligne qui va du barrage de Diama à la ville de Sélibaby – d’un Etat-tampon, fantoche et protecteur du Sénégal (un glacis) dans le cas de figure où l’Algérie via le Polisario et avec la complicité du Colonel Haïdallah, prendrait le contrôle de la Mauritanie. Une éventualité cauchemardesque pour le premier chef de l’Etat du Sénégal dont les rapports avec l’Algérien Boumediene ont toujours été exécrables. Voilà l’épisode le plus secret de la relation sénégalo-mauritanienne. Très peu connu du grand public. Des acteurs politiques de premier plan l’ignorent également. Pour la petite histoire, c’est un proche collaborateur du Président Senghor, Djibril Yade (le père de la ministre française Rama Yade) qui assurait les contacts et le suivi entre le Secrétaire général du fameux WALFOUGUI et le Palais présidentiel du Sénégal, durant les années 1979 et 1980.
Il va sans dire qu’un tel grenouillage – même vital et prospectif pour les intérêts géopolitiques du Sénégal – mit en grande colère, le Comité Militaire de Salut National présidé par le Colonel Haïdallah. Ce dernier confiera à un ancien ministre ouest-africain : « Le Sénégal doit se rappeler qu’il a un ventre mou qui s’appelle la Casamance. Par conséquent, il ne peut pas conspirer impunément contre la Mauritanie ». Bien entendu, la Mauritanie n’a pas créé la rébellion en Casamance, mais elle a joué sa partition déstabilisatrice, sous les régimes successifs des Présidents Ould Haïdallah et Ould Taya. Est-ce un hasard si le réveil militaire du MFDC a commencé, en décembre 1982 ? Soit deux ans avant la chute du Président Haïdallah en 1984.
Par ailleurs, la détérioration des relations entre les deux Etats a également été marquée, le 11 mars 1981, par la tentative de coup d’Etat d’inspiration marocaine, conduite, à partir du territoire sénégalais, par les Colonels exilés et factieux, Salem Ould Sidi et Mohamed Bah Ould Kader. Bref, des secousses, des tensions, des coups obliques et réciproques qui ont culminé, en 1989, avec la crise ayant installé les deux pays au bord de la guerre. Au chapitre des ripostes appropriées, le Président Ould Taya reçut, en 2000, l’ennemi du Sénégal en Guinée-Bissau (feu le Général Ansoumane Mané) à la « Maison Brune », le Palais présidentiel. Audience tenue en présence de feu le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, directeur de la Sûreté nationale. Toute une dune d’antécédents qui obstruent durablement l’horizon de la coopération bilatérale. Et, parfois multilatérale puisque la Mauritanie s’oppose fermement à l’arrivée du Sénégal dans le G 5 Sahel. Tout comme, elle a roulé pour Yaya Jammeh contre la CEDEAO et, singulièrement contre le Sénégal, lors de la crise gambienne.
En vérité, Nouakchott a tiré les leçons traumatisantes de la fracture des années 89-90, puis élaboré une « doctrine sénégalaise » faite de rancœurs, de vigilance et de précautions. Les commerçants maures qui, jadis essaimèrent jusque dans les plus petits hameaux du Sénégal, ont disparu du panorama, malgré la normalisation matérialisée par la reprise des relations diplomatiques. Par petites vagues, des Mauritaniens fortunés débarquent au Sénégal, pour des soins médicaux ou des opérations commerciales de courte durée. A l’occasion de la Tabaski, des éleveurs franchissent le fleuve et écoulent vite les animaux puis rentrent. Quant aux camélidés (les chameaux), ils sont désormais aiguillonnés vers les pâturages situés en territoire malien. Voilà qui n’augure rien de rassurant autour de l’exploitation conjointe de ce pétrole et de ce gaz trop périlleusement limitrophes des deux pays. Une conjoncture gazière et pétrolière opportunément choisie par l’Etat-major des armées mauritaniennes, pour édifier un double port de guerre et de pêche à Ndiago, en bordure de la frontière.
L’Histoire ne se répète pas mais elle bégaie. Le Sénégal de Macky Sall n’accueille aucune instance dirigeante ou active des Forces de Libération Africaines de Mauritanie (les FLAM) qui, d’ailleurs, ne sont plus brûlantes. Elles sont en voie d’extinction sur l’échiquier politique et sur l’autel d’une collusion démocratique avec la dictature militaire bellement parée des oripeaux de la démocratie. Par contre, une poignée d’opposants irréductibles et de personnalités mal vues par le Général Abdelaziz, déambulent souvent à Dakar, pour des raisons et des motifs variés. Des gens que les services de renseignement mauritaniens surveillent à distance, tandis que la sécurité du Sénégal veille sur tout et tous, conformément à sa mission permanente.
Parmi ceux-là, figure l’opposant banquier et milliardaire Ould Bouamatou (réfugié au Maroc) qui fait des va-et-vient entre Rabat et Dakar où il dispose d’une villa à Fann-Résidence. Il est catalogué comme le Fethullah Gulen de la Mauritanie qui financerait tout et tous (les manifestations, les sénateurs congédiés, les journalistes etc.) contre le Président Mohamed Ould Abdelaziz. L’autre bête noire que Nouakchott localise, de temps à autre, à Dakar, est le fameux Limame Chaffi, toujours ami et conseiller de l’ex-Président Blaise Compaoré. Une fraction de sa famille et de ses biens immobiliers se trouvent à Dakar. D’après certaines sources, il convoierait des tonnes de riz vers le Sénégal. Récemment, Limame Chaffi a été signalé dans le sud de la Libye où il a accompli une mission de réconciliation entre deux tribus Toubou, à la demande du Qatar. Mission, semble-t-il, bien payée en dollars. Un trésor de guerre politique qui truffe d’inquiétudes, les journées du Président mauritanien. Tel est l’arrière-plan de la glaciation des rapports entre le Sénégal et la Mauritanie. Finalement, le séjour de l’anti-esclavagiste Biram Dah Ould Abeid et sa conférence de presse avortée, sont les deux gouttes d’eau qui ont fait déborder un vase déjà rempli de ressentiments vifs et anciens, à l’endroit du Sénégal.