La Gauche, ce phœnix qui renaît toujours de ses cendres (Par Idrissa Diongue)

TRIBUNE LIBRE
Lundi 5 Décembre 2022

 Au Sénégal, le socialisme semble à l’agonie. Si l’on s’en tient aux derniers scores enregistrés par les partis se réclamant encore de cette idéologie, l’heure semble grave. A l’origine de ce coup de jarnac figure en bonne place, la posture suiviste choisie et assumée par la plupart des partis de Gauche.

Ce «socialisme historique» s’est dissout dans le cadre d’une coalition, contre nature, où toutes les idéologies se côtoient, au nom parfois de prébendes. Une coalition hétéroclite nouant et dénouant des alliances au gré des intérêts de l’heure. Se réclamer de la Gauche devrait pourtant consister à parler au «peuple» en élargissant l’assise.

S’il veut être issu de la Gauche, le prochain Président de la République du Sénégal devra mettre en avant, dans son message, le «vote efficace», à travers «un bloc républicain» réunissant des compatriotes de tous bords. Les sénégalais s’identifient pour l’essentiel, dans un discours modéré et moins radical.

Le référent de Gauche doit à tout prix refaire spectaculairement surface. En ce sens, il est nécessaire, de mettre en avant, un socialisme, plus ou moins nourri des expériences passées, porté par des courants politiques divers, dont l’essence demeure la promotion de l’équité sociale.

Une crise cyclique

Tous les partis d’obédience socialiste ou sociaux-démocrates ont traversé ces dernières années de profondes crises. Leur affaiblissement a donné lieu à des pronostics de disparition, à plus ou moins court terme. La mort annoncée n’a pourtant jamais eu lieu.

L’orientation politique de ces partis, par rapport à ce qu’ils défendaient, il y a encore une trentaine d’années, loin des préoccupations des populations, a fait petit à petit éroder leur capital sympathie.

Il faut dès lors compiler la Gauche radicale qui est née au Sénégal, ces dernières années, incarnée par de jeunes loups, aux ambitions justifiées, avec l’autre franche plus modérée. Cette approche permet de rassembler autour de l’essentiel, toutes les forces vives, pour atteindre l’objectif fixé.

Le socialisme lui-même peut connaître des fortunes étonnantes mais finit toujours par refaire surface. Prenons l’exemple des États-Unis où quasiment tabou depuis la guerre froide, le socialisme est devenu à la mode, dans l’aile Gauche des démocrates autour de Bernie Sanders, depuis une dizaine d’années. Il ne serait pas étonnant que le prochain Président démocrate des USA soit issu de ce courant. Au Brésil, Lula a assuré son retour. En France, un bloc « de raison » autour de Melenchon aurait pu faire revenir la Gauche au pouvoir.

Capacité d’adaptation

Le socialisme a continué à asseoir son assise en dehors du champ des partis politiques classiques. Les syndicats, les lanceurs d’alertes, la société civile continuent de l’incarner.

Les débats ont migré dans la société civile, chez les lanceurs d’alertes, dans des mouvements citoyens qui ont un rôle de vigie, et de manière très significative, sur les réseaux sociaux.

Certains «stratèges» choisissent d’investir ces canaux qui incarnent pour eux l’espoir. Il faut y voir une quête de sens et comprendre que les idées progressistes ne sont l’apanage d’aucun appareil.

La Gauche, si elle veut reconquérir le pouvoir, doit concentrer toutes ses énergies, autour d’une personnalité de consensus. Son expérience, sa légitimité et ses talents de négociateur feront le reste. Ce candidat de consensus, saura mettre sur pied, une véritable «machine de conquête» construite sur des codes de la présidentialisation (en mobilisant le vote «utile» et «efficace»). Aussi, l’élection présidentielle favorise t-elle, la personnalisation. C’est un rendez-vous d’un homme avec un peuple.

Il est temps de former un «bloc populaire» puissant en capacité de structurer et de traduire une alternative de raison. Une Gauche forte, autour d’une personnalité consensuelle, sur la base de retrouvailles sincères peut déboucher, sur une victoire éclatante.


Idrissa Diongue