Le système éducatif sénégalais sécrète-t-il réellement nos valeurs ancestrales de « JOM », de « KERSA » et de « NGOR » ? Au regard de ce qui se passe dans le paysage politico-médiatique, tout porte à opposer une réponse négative à cette interrogation. Pourtant, originellement, les valeurs civiques distillées par l’école semblent être la locomotive inlassable des valeurs morales instillées par notre société. D’ailleurs, elles constituent le souffle qui assure la survie de l’idéale morale même du Sénégal des profondeurs. Notre expérience propre nous montre qu’aucun d’entre nous n’a assisté aux instances délibérantes qui définirent pour la première fois nos valeurs et règles sociétales.
Ce sont là des valeurs que notre espace commun sécrète depuis la nuit des temps. Nous les avons assimilées dans notre capital symbolique et elles se manifestent à travers notre habitus, pour parler comme Bourdieu. Pour cette raison, les valeurs morales constituent le ciment, le socle sur lequel doit s’ériger l’ensemble des valeurs civiques définies à l’intérieur de la société. Pour cela, la situation de certaines personnes aux prises avec la réalité, ayant pris la parole ces derniers temps sur la place publique, nous a amené à interroger le degré de pénétration de nos enseignements au niveau des apprenants, mais aussi à mesurer l’impact de la greffe des valeurs de la République dans le système scolaire. L’École sénégalaise est une école de la République ! Toutefois, des illustrations prises au hasard retiennent facilement l’attention.
D’abord, nous en prenons une, révélant un comportement qui apparaît comme anti-modèle au regard de notre patrimoine culturel traditionnel. Les règles de comportement de Kersa et de Dëggu nous commandent, au-delà de la solidarité nécessaire entre des personnes d’une même équipe, une assumation collective des erreurs et imperfections découlant de l’exercice commun de nos responsabilités. Ce sont ces mêmes règles qui exigent de tout membre d’un même groupe un comportement solidaire dans l’action et les résultats. Pourquoi donc, au nom d’intérêts crypto-personnels ou d’envies individuelles bassement matérialistes, une frange de la classe politique s’est-elle autorisée à ruer dans les caniveaux, comme jamais dans l’histoire de notre pays un citoyen-père de famille n’a eu la folle outrecuidance de le faire ? Nous pouvons comprendre que certaines personnes puissent avoir l’injure facile. D’ailleurs, qui n’a jamais injurié de sa vie ? En écoutant des « audios » circulant à travers les réseaux sociaux, toute personne imbue d’un tout petit peu de sagesse a eu mal dans sa peau. Notre sénégalité a été atteinte. Serait-ce donc un mode de défense puisé de la kyrielle de ressources inculquées tacitement par notre système scolaire ? Où est-ce que ces femmes et hommes à l’injure collée aux lèvres ont-ils été éduqués ou même instruits, pour avoir la capacité à plonger si facilement et si profondément dans les abîmes de l’outrage et de l’insulte ? Les valeurs acquises à l’intérieur des frontières de l’école pourvoyeuse de modèle ne peuvent être inextinguibles au point de déteindre malheureusement sur le débat public. Nous y sommes passés, et savons que, sous l’angle de la reproduction des inégalités, l’école sénégalaise n’a pas le monopole de l’enseignement à deux vitesses. En tout état de cause, les personnalités politiques caractérielles qui choisissent de se laisser submerger par les réflexes d’autodéfense appris à l’école de la vie posent souvent un réel dilemme au peuple sénégalais.
Et pourtant dans leurs discours, les maîtres mots sont toujours « loyauté », « fidélité », « engagement », mais très rarement « discipline » ou « sérieux ». L’école des traditions sénégalaises serre les dents et s’abstient de verser des larmes à chacune des sorties médiatiques de certains de nos hommes politiques. La République est en souffrance dans notre pays, c’est un secret de polichinelle. Et nous savons tout aussi bien qu’il n’appartient pas au Président de la République d’éduquer ses compagnons, car à partir de quarante ans, nul ne peut changer un homme. Mais alors, pourquoi ne pas changer simplement de camp, si l’on trouve que l’élan et le chemin empruntés par le Président de la République ne nous conviennent plus ?
L’illustration suivante est un modèle de comportement qui est en train de se poser en s’opposant à certaines antivaleurs qui essayent de se frayer un passage à l’intérieur de notre société. Le Ngor commande une obligation de solidarité entre parents, amis ou proches, quelques soit le niveau ou l’appartenance sociale que nous revendiquons. C’est à travers cette manifestation de solidarité que le respect et le niveau d’estime d’une relation interindividuelle sont jugés. Et c’est de cela qu’il s’agit lorsque nous apprécions l’engagement de la Première Dame du Sénégal dont l’exemplarité à tout point de vue n’est plus à démontrer. Manifester son soutien permanent, indéfectible et inébranlable au Président de la République demeure son objectif. D’ailleurs, dans le registre des outrages, certains cagoulards ne ratent aucune occasion pour jeter l’opprobre sur elle. Et pourtant, « ils jasent, médisent et blasphèment », mais sans rien changer dans le comportement immaculé de la Première Dame. Nous ne nous lasserons de le dire, jamais dans l’histoire de notre pays, l’épouse d’un Chef de l’Etat n’a essuyé autant de médisances, de calomnies et de fausses imputations. Mais, aujourd’hui plus que jamais, elle reste discrète, engagée et présente aux côtés du Président. Elle affiche continuellement le sourire face aux ignominieuses inventions de ses détracteurs.
Ainsi donc, en comparant à l’analyse, ne serait-ce que les deux modèles évoqués plus haut, nous sommes en droit de nous interroger sur le mode de transmission des valeurs prônées par notre république. Les apprenons-nous réellement à l’école, entre quatre murs ? Ou les assimilons-nous en apprenant rigoureusement l’hymne national (différemment de beaucoup d’enseignants qui peinent encore à utiliser les mots justes de ce texte, sans faire « rougir le lion ») ?
Fondamentalement, nous estimons que pour mieux comprendre la République, il suffit de cerner les valeurs de liberté, de respect de la différence et de laïcité. Le vocable signifie « ce qui appartient à tous ». Donc, tout ce qui relève de la République est un bien commun et milite en faveur de l’intérêt général. Mais les biens appartenant à tout le monde sont gérés, par délégation, par un gouvernement. Dès lors, l’enseignement des valeurs républicaines au Sénégal pourrait avoir plusieurs entrées. Nous n’en choisirons que deux : une entrée par l’école et une autre par le mouvement associatif (à travers les mouvements à foulard, ou les dahiras par exemple). Pour la première entrée, cela a toujours été compliqué du fait d’un manque de suivi et d’assiduité.
D’ailleurs quels sont les élèves qui ont suivi des cours d’éducation ou instruction civique ? Et même, compte non tenu de ce manquement lié à la négligence et au relâchement d’un maître ou d’un professeur, un problème de choix de procédés et méthodes se pose. Comment peut-on arriver à enseigner les valeurs républicaines à des élèves, en 2020 ? En tout cas, nous retenons bien à ce sujet, des témoignages d’enseignants sur la difficulté liée à l’enseignement de cette discipline de première importance. Nous ne sommes pas en train de dire que c’est la raison pour laquelle certains adultes sont régulièrement épinglés par la censure sociale du fait d’une légèreté dans le discours ou d’un irrespect notoire par rapport aux institutions de la République. Ce que nous visons à ce propos, est de l’ordre de l’interrogation : l’École nationale a-t-elle partiellement raté sa mission de promotion des valeurs civiques au point que certains adultes mal formés (ou déformés) en perdent le la, de temps à autre ? Les tout-petits et les adolescents de la génération 2.0 ne sont plus vraiment sensibles aux sermons. Tout ce qui pourrait ressembler à des prêches les répugne. Les enfants de 2020 sont imperméables à tout ce qui a allure de cours magistral.
Or, enseigner, c’est avant tout capter l’attention de l’élève. Cette dernière se définit comme la sélection distincte et claire d’une sollicitation parmi bien d’autres, par l’esprit à un moment donné. Et l’expérience récente montre que lorsqu’il est invité à prendre une part active dans l’élaboration d’un projet de classe ou dans le déroulement d’une activité extra muros, l’enfant arrive à mobiliser l’ensemble de ses facultés pour appréhender son objet à l’effet de mieux le réaliser. Cette entrée par l’institution scolaire pour promouvoir les valeurs de la République est une aubaine, puisqu’elle est aussi une entrée par le « modèle ». Or, notre pays n’en manque pas. Un regard furtif dans le passé non lointain de nos ancêtres permet de s’en convaincre. Le champ de notre histoire commune est jalonné d’hommes et de femmes de qualité supérieure (n’ayons pas la complexe de le déclarer) à proposer à nos enfants, puisque la grandeur de leurs œuvres ne s’éteindra jamais. Nous pouvons en citer à foison, et ce sont ceux-là nos repères. Alors, sans être exhaustif, nous dirons que Lat Dior, Elh. Omar Tall, Cheikh Ahmadou Bamba, Alboury Ndiaye, Elh. Malick Sy, Aline Sitoé, Njëmbët Mbodj sont là pour nous rappeler que leurs actions ont facilité l’avènement de la République.
L’autre entrée par laquelle l’enseignement des valeurs républicaines pourrait passer reste le mouvement associatif qui s’avère plus proche des masses populaires. Malheureusement, au Sénégal très peu d’associations s’occupent de la formation de leurs membres. Elles sont pour la plupart, inscrites dans des stratégies individuelles de sortie de crise, pressées qu’elles sont, par les différents marasmes économiques et difficultés conjoncturelles. La seule catégorie sur laquelle, l’État pourrait s’appuyer pour remplir cette mission est constituée par les « mouvements à foulards », c’est-à-dire les scouts, les éclaireurs et guides, les pionniers, la Croix rouge, mais aussi les dahiras. A ce propos, l’État du Sénégal doit être plus regardant quant aux missions dédiées à ces différents ensembles, pour plus d’efficacité et d’efficience. Étant donné que certains d’entre eux vivent des subventions de l’État (hormis les dahiras), leur objectif d’assistance et d’accompagnement doit être clairement défini. Ces associations étant pour la plupart d’entre elles, d’obédience confessionnelle, il n’y a vraiment qu’un pas à franchir entre la morale religieuse proposée par ces instances et la morale laïque porteuse des valeurs de la République. La morale laïque est fondée sur la neutralité de l'État et sur le principe de l'égalité, sans exclusive, des citoyens devant la loi. Elle est en tension permanente avec les pratiques de non transparence, de mal gouvernance, d’impunité ou de non imputabilité. Aussi, comment une personnalité de l’État nourrie à la morale républicaine peut-elle ne pas obtempérer lorsqu’il s’agit de se soumettre au principe de déclaration de patrimoine ? Toute la question est là. Et nous sommes parfaitement en phase, avec ceux qui pensent que notre République est mal en point.
Cependant, si nous savons le « comment », il nous faut savoir quel contenu donner à cet enseignement. Mona Ozouf, l’auteure de Pour rendre la vie plus légère déclare d’emblée qu’« il n’y a rien de moins limpide que l’idée républicaine», tout en reconnaissant que «Les valeurs républicaines sont difficiles à penser et à accorder les unes avec les autres». Pour illustration, nous revendiquons tous l’égalité des chances de réussite à l’école, mais savons bien que chaque nouvelle innovation concourt à accroître les inégalités entre apprenants nantis et élèves issus de familles à revenus modestes. Nous sommes d’avis qu’il serait difficile voire impossible d’expliquer cela à un enfant.
L’école ne tient pas toujours ses promesses. Il se pose dès lors, un problème de cohérence interne entre les valeurs enseignées et la réalité pratique. Dans l’ « entrée par les modèles », l’exemplarité doit être de rigueur. Il ne s’agit plus d’enseigner ou apprendre des valeurs pour ensuite les fouler sans arrêt au pied. Il faut habituer les enfants aux partages et aux débats d’idées. Des discussions doivent être organisées régulièrement dans les classes autour de la patience, du courage, du respect, de la coopération, de l’honnêteté, de la responsabilité, etc.
En définitive, il urge de remettre à l’école nationale la charge de la remise à leur juste place de nos valeurs ancestrales dans les comportements citoyens. Ainsi, la prise en charge des valeurs civiques sera, non pas une refondation des valeurs, mais une promotion ininterrompue, en les replaçant dans les pratiques de tous les jours. Ce n’est que dans cette optique que la crise des valeurs pourrait être surmontée.
Lamine Aysa FALL
Citoyen de Thiès-Ville
lamineaysa@gmail.com
Ce sont là des valeurs que notre espace commun sécrète depuis la nuit des temps. Nous les avons assimilées dans notre capital symbolique et elles se manifestent à travers notre habitus, pour parler comme Bourdieu. Pour cette raison, les valeurs morales constituent le ciment, le socle sur lequel doit s’ériger l’ensemble des valeurs civiques définies à l’intérieur de la société. Pour cela, la situation de certaines personnes aux prises avec la réalité, ayant pris la parole ces derniers temps sur la place publique, nous a amené à interroger le degré de pénétration de nos enseignements au niveau des apprenants, mais aussi à mesurer l’impact de la greffe des valeurs de la République dans le système scolaire. L’École sénégalaise est une école de la République ! Toutefois, des illustrations prises au hasard retiennent facilement l’attention.
D’abord, nous en prenons une, révélant un comportement qui apparaît comme anti-modèle au regard de notre patrimoine culturel traditionnel. Les règles de comportement de Kersa et de Dëggu nous commandent, au-delà de la solidarité nécessaire entre des personnes d’une même équipe, une assumation collective des erreurs et imperfections découlant de l’exercice commun de nos responsabilités. Ce sont ces mêmes règles qui exigent de tout membre d’un même groupe un comportement solidaire dans l’action et les résultats. Pourquoi donc, au nom d’intérêts crypto-personnels ou d’envies individuelles bassement matérialistes, une frange de la classe politique s’est-elle autorisée à ruer dans les caniveaux, comme jamais dans l’histoire de notre pays un citoyen-père de famille n’a eu la folle outrecuidance de le faire ? Nous pouvons comprendre que certaines personnes puissent avoir l’injure facile. D’ailleurs, qui n’a jamais injurié de sa vie ? En écoutant des « audios » circulant à travers les réseaux sociaux, toute personne imbue d’un tout petit peu de sagesse a eu mal dans sa peau. Notre sénégalité a été atteinte. Serait-ce donc un mode de défense puisé de la kyrielle de ressources inculquées tacitement par notre système scolaire ? Où est-ce que ces femmes et hommes à l’injure collée aux lèvres ont-ils été éduqués ou même instruits, pour avoir la capacité à plonger si facilement et si profondément dans les abîmes de l’outrage et de l’insulte ? Les valeurs acquises à l’intérieur des frontières de l’école pourvoyeuse de modèle ne peuvent être inextinguibles au point de déteindre malheureusement sur le débat public. Nous y sommes passés, et savons que, sous l’angle de la reproduction des inégalités, l’école sénégalaise n’a pas le monopole de l’enseignement à deux vitesses. En tout état de cause, les personnalités politiques caractérielles qui choisissent de se laisser submerger par les réflexes d’autodéfense appris à l’école de la vie posent souvent un réel dilemme au peuple sénégalais.
Et pourtant dans leurs discours, les maîtres mots sont toujours « loyauté », « fidélité », « engagement », mais très rarement « discipline » ou « sérieux ». L’école des traditions sénégalaises serre les dents et s’abstient de verser des larmes à chacune des sorties médiatiques de certains de nos hommes politiques. La République est en souffrance dans notre pays, c’est un secret de polichinelle. Et nous savons tout aussi bien qu’il n’appartient pas au Président de la République d’éduquer ses compagnons, car à partir de quarante ans, nul ne peut changer un homme. Mais alors, pourquoi ne pas changer simplement de camp, si l’on trouve que l’élan et le chemin empruntés par le Président de la République ne nous conviennent plus ?
L’illustration suivante est un modèle de comportement qui est en train de se poser en s’opposant à certaines antivaleurs qui essayent de se frayer un passage à l’intérieur de notre société. Le Ngor commande une obligation de solidarité entre parents, amis ou proches, quelques soit le niveau ou l’appartenance sociale que nous revendiquons. C’est à travers cette manifestation de solidarité que le respect et le niveau d’estime d’une relation interindividuelle sont jugés. Et c’est de cela qu’il s’agit lorsque nous apprécions l’engagement de la Première Dame du Sénégal dont l’exemplarité à tout point de vue n’est plus à démontrer. Manifester son soutien permanent, indéfectible et inébranlable au Président de la République demeure son objectif. D’ailleurs, dans le registre des outrages, certains cagoulards ne ratent aucune occasion pour jeter l’opprobre sur elle. Et pourtant, « ils jasent, médisent et blasphèment », mais sans rien changer dans le comportement immaculé de la Première Dame. Nous ne nous lasserons de le dire, jamais dans l’histoire de notre pays, l’épouse d’un Chef de l’Etat n’a essuyé autant de médisances, de calomnies et de fausses imputations. Mais, aujourd’hui plus que jamais, elle reste discrète, engagée et présente aux côtés du Président. Elle affiche continuellement le sourire face aux ignominieuses inventions de ses détracteurs.
Ainsi donc, en comparant à l’analyse, ne serait-ce que les deux modèles évoqués plus haut, nous sommes en droit de nous interroger sur le mode de transmission des valeurs prônées par notre république. Les apprenons-nous réellement à l’école, entre quatre murs ? Ou les assimilons-nous en apprenant rigoureusement l’hymne national (différemment de beaucoup d’enseignants qui peinent encore à utiliser les mots justes de ce texte, sans faire « rougir le lion ») ?
Fondamentalement, nous estimons que pour mieux comprendre la République, il suffit de cerner les valeurs de liberté, de respect de la différence et de laïcité. Le vocable signifie « ce qui appartient à tous ». Donc, tout ce qui relève de la République est un bien commun et milite en faveur de l’intérêt général. Mais les biens appartenant à tout le monde sont gérés, par délégation, par un gouvernement. Dès lors, l’enseignement des valeurs républicaines au Sénégal pourrait avoir plusieurs entrées. Nous n’en choisirons que deux : une entrée par l’école et une autre par le mouvement associatif (à travers les mouvements à foulard, ou les dahiras par exemple). Pour la première entrée, cela a toujours été compliqué du fait d’un manque de suivi et d’assiduité.
D’ailleurs quels sont les élèves qui ont suivi des cours d’éducation ou instruction civique ? Et même, compte non tenu de ce manquement lié à la négligence et au relâchement d’un maître ou d’un professeur, un problème de choix de procédés et méthodes se pose. Comment peut-on arriver à enseigner les valeurs républicaines à des élèves, en 2020 ? En tout cas, nous retenons bien à ce sujet, des témoignages d’enseignants sur la difficulté liée à l’enseignement de cette discipline de première importance. Nous ne sommes pas en train de dire que c’est la raison pour laquelle certains adultes sont régulièrement épinglés par la censure sociale du fait d’une légèreté dans le discours ou d’un irrespect notoire par rapport aux institutions de la République. Ce que nous visons à ce propos, est de l’ordre de l’interrogation : l’École nationale a-t-elle partiellement raté sa mission de promotion des valeurs civiques au point que certains adultes mal formés (ou déformés) en perdent le la, de temps à autre ? Les tout-petits et les adolescents de la génération 2.0 ne sont plus vraiment sensibles aux sermons. Tout ce qui pourrait ressembler à des prêches les répugne. Les enfants de 2020 sont imperméables à tout ce qui a allure de cours magistral.
Or, enseigner, c’est avant tout capter l’attention de l’élève. Cette dernière se définit comme la sélection distincte et claire d’une sollicitation parmi bien d’autres, par l’esprit à un moment donné. Et l’expérience récente montre que lorsqu’il est invité à prendre une part active dans l’élaboration d’un projet de classe ou dans le déroulement d’une activité extra muros, l’enfant arrive à mobiliser l’ensemble de ses facultés pour appréhender son objet à l’effet de mieux le réaliser. Cette entrée par l’institution scolaire pour promouvoir les valeurs de la République est une aubaine, puisqu’elle est aussi une entrée par le « modèle ». Or, notre pays n’en manque pas. Un regard furtif dans le passé non lointain de nos ancêtres permet de s’en convaincre. Le champ de notre histoire commune est jalonné d’hommes et de femmes de qualité supérieure (n’ayons pas la complexe de le déclarer) à proposer à nos enfants, puisque la grandeur de leurs œuvres ne s’éteindra jamais. Nous pouvons en citer à foison, et ce sont ceux-là nos repères. Alors, sans être exhaustif, nous dirons que Lat Dior, Elh. Omar Tall, Cheikh Ahmadou Bamba, Alboury Ndiaye, Elh. Malick Sy, Aline Sitoé, Njëmbët Mbodj sont là pour nous rappeler que leurs actions ont facilité l’avènement de la République.
L’autre entrée par laquelle l’enseignement des valeurs républicaines pourrait passer reste le mouvement associatif qui s’avère plus proche des masses populaires. Malheureusement, au Sénégal très peu d’associations s’occupent de la formation de leurs membres. Elles sont pour la plupart, inscrites dans des stratégies individuelles de sortie de crise, pressées qu’elles sont, par les différents marasmes économiques et difficultés conjoncturelles. La seule catégorie sur laquelle, l’État pourrait s’appuyer pour remplir cette mission est constituée par les « mouvements à foulards », c’est-à-dire les scouts, les éclaireurs et guides, les pionniers, la Croix rouge, mais aussi les dahiras. A ce propos, l’État du Sénégal doit être plus regardant quant aux missions dédiées à ces différents ensembles, pour plus d’efficacité et d’efficience. Étant donné que certains d’entre eux vivent des subventions de l’État (hormis les dahiras), leur objectif d’assistance et d’accompagnement doit être clairement défini. Ces associations étant pour la plupart d’entre elles, d’obédience confessionnelle, il n’y a vraiment qu’un pas à franchir entre la morale religieuse proposée par ces instances et la morale laïque porteuse des valeurs de la République. La morale laïque est fondée sur la neutralité de l'État et sur le principe de l'égalité, sans exclusive, des citoyens devant la loi. Elle est en tension permanente avec les pratiques de non transparence, de mal gouvernance, d’impunité ou de non imputabilité. Aussi, comment une personnalité de l’État nourrie à la morale républicaine peut-elle ne pas obtempérer lorsqu’il s’agit de se soumettre au principe de déclaration de patrimoine ? Toute la question est là. Et nous sommes parfaitement en phase, avec ceux qui pensent que notre République est mal en point.
Cependant, si nous savons le « comment », il nous faut savoir quel contenu donner à cet enseignement. Mona Ozouf, l’auteure de Pour rendre la vie plus légère déclare d’emblée qu’« il n’y a rien de moins limpide que l’idée républicaine», tout en reconnaissant que «Les valeurs républicaines sont difficiles à penser et à accorder les unes avec les autres». Pour illustration, nous revendiquons tous l’égalité des chances de réussite à l’école, mais savons bien que chaque nouvelle innovation concourt à accroître les inégalités entre apprenants nantis et élèves issus de familles à revenus modestes. Nous sommes d’avis qu’il serait difficile voire impossible d’expliquer cela à un enfant.
L’école ne tient pas toujours ses promesses. Il se pose dès lors, un problème de cohérence interne entre les valeurs enseignées et la réalité pratique. Dans l’ « entrée par les modèles », l’exemplarité doit être de rigueur. Il ne s’agit plus d’enseigner ou apprendre des valeurs pour ensuite les fouler sans arrêt au pied. Il faut habituer les enfants aux partages et aux débats d’idées. Des discussions doivent être organisées régulièrement dans les classes autour de la patience, du courage, du respect, de la coopération, de l’honnêteté, de la responsabilité, etc.
En définitive, il urge de remettre à l’école nationale la charge de la remise à leur juste place de nos valeurs ancestrales dans les comportements citoyens. Ainsi, la prise en charge des valeurs civiques sera, non pas une refondation des valeurs, mais une promotion ininterrompue, en les replaçant dans les pratiques de tous les jours. Ce n’est que dans cette optique que la crise des valeurs pourrait être surmontée.
Lamine Aysa FALL
Citoyen de Thiès-Ville
lamineaysa@gmail.com