Tout le débat sur l’éligibilité de Khalifa SALL en 2024 porte sur l’interprétation de l’article L.31 du code électoral. Pour savoir si Khalifa Sall est éligible aux présidentielles de 2024, il ne s’agit pas d’avoir une lecture littérale de l’article L.31 du Code électoral, mais d’en avoir une lecture dynamique (par une mise en perspective de l'article L.31 dudit code avec les principes fondamentaux de la Constitution, et le droit fondamental de candidater à une élection présidentielle). L’article L.31 du code électoral qui prescrit la radiation automatique d’un condamné des listes électorales, sans décision expresse du juge résulte d'une interprétation fausse et totalement erronée.
Pour une raison simple : l’article L.31 du code électoral est inconstitutionnel. Au Sénégal, le droit à l’éligibilité et la jouissance des droits civiques, civils et politiques s’apprécient, au regard de 3 textes : le code pénal, le code électoral, et la Constitution (dont le Préambule proclame l’attachement du Sénégal aux instruments régionaux et internationaux qui font partie intégrante du droit positif national). En vertu de la hiérarchie des normes, les dispositions du code pénal et du code pénal doivent être conformes à la Charte suprême ».
A - La recevabilité de la candidature à l’élection présidentielle au regard du Code pénal
Pour apprécier la recevabilité d’une candidature, à une élection il faut se référer aux articles 34 et 35, et 730 du code de procédure pénale. L’article 34 du code électoral dispose que « Les tribunaux jugeant correctionnellement pourront, dans certains cas, interdire, en tout ou en partie, l'exercice de droits civiques, civils et de famille suivants (vote et éligibilité). L’article 35 est plus précis puisqu’il souligne « que les tribunaux ne pourront prononcer l’interdiction mentionnée à l’article 34 que lorsqu’elle aura été autorisée ou ordonnée par une disposition particulière de la loi ».
Une lecture combinée des articles 34 et 35 du code pénal sénégalais permet de constater, que s’agissant de Khalifa SALL, aucun juge n’a prononcé une interdiction d’inscription sur une liste électorale ou une incapacité d’exercer une fonction élective ». Il est constant que Khalifa SALL n’a été privé ni de ses droits civiques (au regard des dispositions de l’article 27 du code pénal, seule une condamnation à une peine d’emprisonnement criminelle, emporte la dégradation civique), ni de ses droits civils et de famille. En effet, ni le jugement du Tribunal de Grande Instance de Dakar du 30 mars 2018, ni l’arrêt N°454 de la Cour d’appel de Dakar du 30 aout 2018, ni l’arrêt N°001 de la Cour suprême du 03 janvier 2019 n’ont prononcé une privation des droits civils et politiques à son encontre.
Khalifa Ababacar SALL a acquis la qualité d'électeur le 17 juillet 2018, après la clôture de la révision exceptionnelle des listes électorales, conformément au décret n°2018-476 du 20 février 2018. Dès lors, son statut d’électeur ne peut être remis en cause que par une radiation des listes électorales. Or, l’article 730 du Code de Procédure pénale dispose « qu’une copie de chaque fiche constatant une décision entraînant la privation des droits électoraux est adressée par le greffier compétent à l’autorité chargée d’établir les listes électorales ». Les dispositions de l’article 730 du code pénal sénégalais sont claires, nettes et précises : seules les décisions adressées par le greffier, constatant la privation des droits électoraux, permettent de refuser l’inscription d’un citoyen sénégalais majeur sur les listes électorales. En aucun cas, Il n’appartient à l’autorité administrative d’interpréter la loi ou de se substituer au Juge pour radier d’office, un citoyen des listes électorales (un acte totalement illégal).
B - La recevabilité de la candidature au regard de l’article L.31 du Code électoral
L’article L.31 du code électoral dispose que « Ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale » :
1) les individus condamnés pour crime
2) ceux condamnés à une peine d’emprisonnement sans sursis ou à une peine d’emprisonnement avec sursis d’une durée supérieure à un mois… et en général pour l’un des délits passibles d’une peine supérieure à 5 ans d’emprisonnement….
En réalité, l’article L.31 du code électoral fait l’objet d’une interprétation mensongère de la part des partisans du régime. En effet, les dispositions de l’article sont générales (indéfinies) et induisent pour les condamnés visés par cet article « une inéligibilité perpétuelle ». Dans son rapport de la « Mission d’audit du Fichier électoral » du 26 février 2018, les experts de l’Union Européenne (cf page 27, l’article 5.2.2 intitulé « les incapacités électorales liées à des infractions »), les experts de l’Union Européenne ont recommandé au Sénégal de réviser les articles L.31 et L.32 du Code électoral, qui reprennent mot pour mot la formulation des articles L.26 et L. 27 de la version du Code électoral de 2007, « en prenant en considération que la proportion de la suppression de ce droit (d’un citoyen condamné) soit appropriée au délit et à la peine et que les dispositions du Code électoral soient en harmonie avec le Code pénal ».
La MAFE a relevé des inhérences entre le code pénal et le code électoral (cf page 27). Mieux, dans l’article 5.3.1 intitulé « l’effectivité des incapacités électorales » - cf page 29 du rapport, les experts de l’Union Européenne ont rappelé clairement les dispositions légales qui régissent la privation des droits électoraux, précisant que l’article 730 du Code de procédure pénale du Sénégal dispose qu’une « copie de chaque fiche constatant une décision entraînant la privation des droits électoraux est adressée par le greffe compétent à l’autorité chargée d’établir les listes électorales ». Le rapport de la MAFE confirme que la radiation des listes électorales d’un condamné visé à l’article L.31, ne saurait en aucun cas revêtir un caractère automatique.
En France, la question a été tranchée par le Conseil Constitutionnel en 2010 : la radiation automatique des listes électorales, en cas de condamnation pour certains délits caractérisés a été jugé contraire à la Constitution et au principe d’individualisation des peines. Il faut une décision expresse du juge pour prescrire l’inéligibilité et surtout en fixer la durée. Le Conseil constitutionnel français, dans sa décision n° 2010-6/QPC du 11 juin 2010 a déclaré que les dispositions de l’article 7 de la loi 95-65 sont contraires à la constitution française, en ce qu’elles violent les termes de l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme , aux motifs que « le principe d’individualisation des peines qui découle de cet article (article 8), implique que la peine emportant l’interdiction d’être inscrit sur une liste électorale et l’incapacité d’exercer une fonction électorale qui en résulte ne puisse être appliquée que si le juge l’a expressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ».
La décision n°2010-6/QPC du 11 juin 2010 confirme que la déchéance des droits électoraux n'est plus automatique : elle doit nécessairement résulter d'une décision d'un juge, qui peut la prononcer pour une durée maximale de cinq ans dans le cas d'un délit, dix ans dans le cas d'un crime. L’interdiction de s’inscrire sur une liste électorale constitue une peine, et toute peine entraine l’application de l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme aux termes duquel « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Exemple, en mars 2018, le maire de Saint-Lizier (Ariège), a été condamné à cinq mois de prison avec sursis pour des faits de prise illégale d’intérêts, d’abus de confiance et d’escroquerie. Malgré les faits, le juge n’a pas estimé pertinent de rendre l’élu inéligible.
L’article 7 du code électoral français abrogé par le Conseil Constitutionnel est l’équivalent (copie conforme) de l’article L.31 du code électoral sénégalais. Il est donc définitivement établi que l’article L.31 du Code électoral du Sénégal est inconstitutionnel car le PREAMBULE de la Constitution sénégalaise précise que « Le Peuple du Sénégal affirme « son adhésion à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 et aux instruments internationaux adoptés par l’Organisation des Nations Unies et l’Organisation de l’Unité africaine, notamment la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 ».
En l’état actuel, la législation sénégalaise ne pose aucune interdiction d’exercer une fonction publique à la suite d’une condamnation pour délit. La condamnation de Khalifa Sall n’est ni un obstacle, ni un empêchement pour sa candidature aux présidentielles de 2024. Khalifa SALL n’a besoin d’aucune loi d’amnistie, puisque l’article L.31 du code électoral sénégalais est inconstitutionnel. Définitivement.
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr
Annexes
Communique du Conseil Constitutionnel français suite à sa Décision n° 2010-6/7 QPC du 11 juin 2010
Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 7 mai 2010, par la Cour de cassation, dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par Monsieur A et autres. Cette question était relative à la conformité de l'article L. 7 du code électoral.
Le Conseil constitutionnel a jugé que l’article L. 7 du code électoral est contraire à la Constitution. L'article L. 7 du code électoral impose la radiation des listes électorales des personnes dépositaires de l'autorité publique, chargées d'une mission de service public ou investies d'un mandat électif public lorsqu'elles commettent certaines infractions. Cette radiation emporte une incapacité d'exercer une fonction publique élective d'une durée égale à 5 ans. Le Conseil constitutionnel a repris un précédent exactement transposable (n° 99-410 DC du 15 mars 1999). Aux termes de cette jurisprudence, la radiation des listes électorales constitue une sanction ayant le caractère d'une punition. Cette peine est attachée de plein droit à diverses condamnations pénales sans que le juge qui décide de ces mesures ait à la prononcer expressément et sans qu'il puisse en faire varier la durée. Dès lors, cette peine accessoire, à la fois automatique et insusceptible d'être individualisée, méconnaît le principe d'individualisation des peines. Elle est donc contraire à la Constitution. L'abrogation de l'article L. 7 du code électoral prend effet dès la publication de la décision du Conseil constitutionnel.
Toutes les personnes ayant été condamnées à cette peine automatique recouvrent la capacité de s’inscrire sur les listes électorales, dans les conditions déterminées par la loi.
Liens utiles relatifs à la Jurisprudence du Conseil Constitutionnel du 11 juillet 2010
https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2010/20106_7QPC.htm https://www.lagazettedescommunes.com/40269/les-peines-dineligibilite-prononcees-en-vertu-de-larticle-l7-du-code-electoral-sont-annulees/
Comparaison des articles L.7 du Code électoral (France) et L.31 du code électoral (Sénégal)
Code électoral Français, art. L7 (abrogé par le Conseil Constitutionnel) : Ne doivent pas être inscrites sur la liste électorale, pendant un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive, les personnes condamnées pour l'une des infractions prévues par les articles 432-10 à 432-16, 433-1, 433-2, 433-3 et 433-4 du code pénal ou pour le délit de recel de l'une de ces infractions, défini par les articles 321-1 et 321-2 du code pénal
Code électoral Sénégalais, art. L.31 actuellement en vigueur « Ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale »1) les individus condamnés pour crime ; 2) ceux condamnés à une peine d’emprisonnement sans sursis ou à une peine d’emprisonnement avec sursis d’une durée supérieure à un mois, assortie ou non d’une amende, et en général pour l’un des délits passibles d’une peine supérieure à cinq (05) ans d’emprisonnement….
La comparaison des articles L.7 du Code électoral (France) et L.31 du code électoral (Sénégal) permet d’aboutir à un constat accablant. En France, l’article L.7 abrogé par le code électoral prescrivait un délai de 5 ans à compter de la condamnation définitive. Ce qui n’a pas empêché son abrogation par le Conseil Constitutionnel français au motif que la radiation revêtait un caractère automatique et n’a pas été prononcé expressément par le Juge. Au Sénégal, l’article L.31 ne fixe aucun délai, créé la radiation automatique et perpétuelle pour certains condamnés et n’est pas en conformité avec l’article 730 du code pénal. L’article L.31 est inconstitutionnel.
Pour une raison simple : l’article L.31 du code électoral est inconstitutionnel. Au Sénégal, le droit à l’éligibilité et la jouissance des droits civiques, civils et politiques s’apprécient, au regard de 3 textes : le code pénal, le code électoral, et la Constitution (dont le Préambule proclame l’attachement du Sénégal aux instruments régionaux et internationaux qui font partie intégrante du droit positif national). En vertu de la hiérarchie des normes, les dispositions du code pénal et du code pénal doivent être conformes à la Charte suprême ».
A - La recevabilité de la candidature à l’élection présidentielle au regard du Code pénal
Pour apprécier la recevabilité d’une candidature, à une élection il faut se référer aux articles 34 et 35, et 730 du code de procédure pénale. L’article 34 du code électoral dispose que « Les tribunaux jugeant correctionnellement pourront, dans certains cas, interdire, en tout ou en partie, l'exercice de droits civiques, civils et de famille suivants (vote et éligibilité). L’article 35 est plus précis puisqu’il souligne « que les tribunaux ne pourront prononcer l’interdiction mentionnée à l’article 34 que lorsqu’elle aura été autorisée ou ordonnée par une disposition particulière de la loi ».
Une lecture combinée des articles 34 et 35 du code pénal sénégalais permet de constater, que s’agissant de Khalifa SALL, aucun juge n’a prononcé une interdiction d’inscription sur une liste électorale ou une incapacité d’exercer une fonction élective ». Il est constant que Khalifa SALL n’a été privé ni de ses droits civiques (au regard des dispositions de l’article 27 du code pénal, seule une condamnation à une peine d’emprisonnement criminelle, emporte la dégradation civique), ni de ses droits civils et de famille. En effet, ni le jugement du Tribunal de Grande Instance de Dakar du 30 mars 2018, ni l’arrêt N°454 de la Cour d’appel de Dakar du 30 aout 2018, ni l’arrêt N°001 de la Cour suprême du 03 janvier 2019 n’ont prononcé une privation des droits civils et politiques à son encontre.
Khalifa Ababacar SALL a acquis la qualité d'électeur le 17 juillet 2018, après la clôture de la révision exceptionnelle des listes électorales, conformément au décret n°2018-476 du 20 février 2018. Dès lors, son statut d’électeur ne peut être remis en cause que par une radiation des listes électorales. Or, l’article 730 du Code de Procédure pénale dispose « qu’une copie de chaque fiche constatant une décision entraînant la privation des droits électoraux est adressée par le greffier compétent à l’autorité chargée d’établir les listes électorales ». Les dispositions de l’article 730 du code pénal sénégalais sont claires, nettes et précises : seules les décisions adressées par le greffier, constatant la privation des droits électoraux, permettent de refuser l’inscription d’un citoyen sénégalais majeur sur les listes électorales. En aucun cas, Il n’appartient à l’autorité administrative d’interpréter la loi ou de se substituer au Juge pour radier d’office, un citoyen des listes électorales (un acte totalement illégal).
B - La recevabilité de la candidature au regard de l’article L.31 du Code électoral
L’article L.31 du code électoral dispose que « Ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale » :
1) les individus condamnés pour crime
2) ceux condamnés à une peine d’emprisonnement sans sursis ou à une peine d’emprisonnement avec sursis d’une durée supérieure à un mois… et en général pour l’un des délits passibles d’une peine supérieure à 5 ans d’emprisonnement….
En réalité, l’article L.31 du code électoral fait l’objet d’une interprétation mensongère de la part des partisans du régime. En effet, les dispositions de l’article sont générales (indéfinies) et induisent pour les condamnés visés par cet article « une inéligibilité perpétuelle ». Dans son rapport de la « Mission d’audit du Fichier électoral » du 26 février 2018, les experts de l’Union Européenne (cf page 27, l’article 5.2.2 intitulé « les incapacités électorales liées à des infractions »), les experts de l’Union Européenne ont recommandé au Sénégal de réviser les articles L.31 et L.32 du Code électoral, qui reprennent mot pour mot la formulation des articles L.26 et L. 27 de la version du Code électoral de 2007, « en prenant en considération que la proportion de la suppression de ce droit (d’un citoyen condamné) soit appropriée au délit et à la peine et que les dispositions du Code électoral soient en harmonie avec le Code pénal ».
La MAFE a relevé des inhérences entre le code pénal et le code électoral (cf page 27). Mieux, dans l’article 5.3.1 intitulé « l’effectivité des incapacités électorales » - cf page 29 du rapport, les experts de l’Union Européenne ont rappelé clairement les dispositions légales qui régissent la privation des droits électoraux, précisant que l’article 730 du Code de procédure pénale du Sénégal dispose qu’une « copie de chaque fiche constatant une décision entraînant la privation des droits électoraux est adressée par le greffe compétent à l’autorité chargée d’établir les listes électorales ». Le rapport de la MAFE confirme que la radiation des listes électorales d’un condamné visé à l’article L.31, ne saurait en aucun cas revêtir un caractère automatique.
En France, la question a été tranchée par le Conseil Constitutionnel en 2010 : la radiation automatique des listes électorales, en cas de condamnation pour certains délits caractérisés a été jugé contraire à la Constitution et au principe d’individualisation des peines. Il faut une décision expresse du juge pour prescrire l’inéligibilité et surtout en fixer la durée. Le Conseil constitutionnel français, dans sa décision n° 2010-6/QPC du 11 juin 2010 a déclaré que les dispositions de l’article 7 de la loi 95-65 sont contraires à la constitution française, en ce qu’elles violent les termes de l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme , aux motifs que « le principe d’individualisation des peines qui découle de cet article (article 8), implique que la peine emportant l’interdiction d’être inscrit sur une liste électorale et l’incapacité d’exercer une fonction électorale qui en résulte ne puisse être appliquée que si le juge l’a expressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ».
La décision n°2010-6/QPC du 11 juin 2010 confirme que la déchéance des droits électoraux n'est plus automatique : elle doit nécessairement résulter d'une décision d'un juge, qui peut la prononcer pour une durée maximale de cinq ans dans le cas d'un délit, dix ans dans le cas d'un crime. L’interdiction de s’inscrire sur une liste électorale constitue une peine, et toute peine entraine l’application de l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme aux termes duquel « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Exemple, en mars 2018, le maire de Saint-Lizier (Ariège), a été condamné à cinq mois de prison avec sursis pour des faits de prise illégale d’intérêts, d’abus de confiance et d’escroquerie. Malgré les faits, le juge n’a pas estimé pertinent de rendre l’élu inéligible.
L’article 7 du code électoral français abrogé par le Conseil Constitutionnel est l’équivalent (copie conforme) de l’article L.31 du code électoral sénégalais. Il est donc définitivement établi que l’article L.31 du Code électoral du Sénégal est inconstitutionnel car le PREAMBULE de la Constitution sénégalaise précise que « Le Peuple du Sénégal affirme « son adhésion à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 et aux instruments internationaux adoptés par l’Organisation des Nations Unies et l’Organisation de l’Unité africaine, notamment la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 ».
En l’état actuel, la législation sénégalaise ne pose aucune interdiction d’exercer une fonction publique à la suite d’une condamnation pour délit. La condamnation de Khalifa Sall n’est ni un obstacle, ni un empêchement pour sa candidature aux présidentielles de 2024. Khalifa SALL n’a besoin d’aucune loi d’amnistie, puisque l’article L.31 du code électoral sénégalais est inconstitutionnel. Définitivement.
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr
Annexes
Communique du Conseil Constitutionnel français suite à sa Décision n° 2010-6/7 QPC du 11 juin 2010
Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 7 mai 2010, par la Cour de cassation, dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par Monsieur A et autres. Cette question était relative à la conformité de l'article L. 7 du code électoral.
Le Conseil constitutionnel a jugé que l’article L. 7 du code électoral est contraire à la Constitution. L'article L. 7 du code électoral impose la radiation des listes électorales des personnes dépositaires de l'autorité publique, chargées d'une mission de service public ou investies d'un mandat électif public lorsqu'elles commettent certaines infractions. Cette radiation emporte une incapacité d'exercer une fonction publique élective d'une durée égale à 5 ans. Le Conseil constitutionnel a repris un précédent exactement transposable (n° 99-410 DC du 15 mars 1999). Aux termes de cette jurisprudence, la radiation des listes électorales constitue une sanction ayant le caractère d'une punition. Cette peine est attachée de plein droit à diverses condamnations pénales sans que le juge qui décide de ces mesures ait à la prononcer expressément et sans qu'il puisse en faire varier la durée. Dès lors, cette peine accessoire, à la fois automatique et insusceptible d'être individualisée, méconnaît le principe d'individualisation des peines. Elle est donc contraire à la Constitution. L'abrogation de l'article L. 7 du code électoral prend effet dès la publication de la décision du Conseil constitutionnel.
Toutes les personnes ayant été condamnées à cette peine automatique recouvrent la capacité de s’inscrire sur les listes électorales, dans les conditions déterminées par la loi.
Liens utiles relatifs à la Jurisprudence du Conseil Constitutionnel du 11 juillet 2010
https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2010/20106_7QPC.htm https://www.lagazettedescommunes.com/40269/les-peines-dineligibilite-prononcees-en-vertu-de-larticle-l7-du-code-electoral-sont-annulees/
Comparaison des articles L.7 du Code électoral (France) et L.31 du code électoral (Sénégal)
Code électoral Français, art. L7 (abrogé par le Conseil Constitutionnel) : Ne doivent pas être inscrites sur la liste électorale, pendant un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive, les personnes condamnées pour l'une des infractions prévues par les articles 432-10 à 432-16, 433-1, 433-2, 433-3 et 433-4 du code pénal ou pour le délit de recel de l'une de ces infractions, défini par les articles 321-1 et 321-2 du code pénal
Code électoral Sénégalais, art. L.31 actuellement en vigueur « Ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale »1) les individus condamnés pour crime ; 2) ceux condamnés à une peine d’emprisonnement sans sursis ou à une peine d’emprisonnement avec sursis d’une durée supérieure à un mois, assortie ou non d’une amende, et en général pour l’un des délits passibles d’une peine supérieure à cinq (05) ans d’emprisonnement….
La comparaison des articles L.7 du Code électoral (France) et L.31 du code électoral (Sénégal) permet d’aboutir à un constat accablant. En France, l’article L.7 abrogé par le code électoral prescrivait un délai de 5 ans à compter de la condamnation définitive. Ce qui n’a pas empêché son abrogation par le Conseil Constitutionnel français au motif que la radiation revêtait un caractère automatique et n’a pas été prononcé expressément par le Juge. Au Sénégal, l’article L.31 ne fixe aucun délai, créé la radiation automatique et perpétuelle pour certains condamnés et n’est pas en conformité avec l’article 730 du code pénal. L’article L.31 est inconstitutionnel.