Exclusif / turbulences dans le transport aérien : 15,7 milliards de francs CFA de l’Asecna volatilisés en 2017

ECONOMIE
Lundi 24 Juin 2019

Les rapports d’audit que JA s’est procurés attestent de la gestion budgétaire catastrophique de l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (Asecna) dans dix-sept pays africains. Créée à Saint-Louis-du-Sénégal, en 1959, à l’initiative de la France, celle-ci est la plus ancienne organisation africaine de coopération. L’Asecna gère 57 tours de contrôle, 25 aéroports internationaux, 76 aéroports régionaux et nationaux.

Depuis six ans, des sommes considérables ont disparu, vraisemblablement détournées. Ayant eu accès en exclusivité aux trois derniers rapports d'audit annuel, confidentiels, de l'Agence qui couvre 17 Etats, le journal, dans son édition du 23 juin, a réussi à dévoiler ce scandale sur la base de ces documents.

Le journal panafricain a révélé l'évaporation de plusieurs dizaines de milliards F CFA des comptes de L’Asecna. Ordres de paiements et règlements en espèces sans justificatifs, clients non identifiés, factures volatilisées. Outre une gestion budgétaire catastrophique, l'évaporation depuis au moins six ans de sommes considérables : 15,7 milliards de francs CFA (24 millions d'euros) pour la seule année 2017. « La gestion pour le moins archaïque de l'agence, en particulier son informatisation encore très insuffisante, a sans nul doute favorisé ces dérives. L'insuffisance, voire l'absence, de contrôle interne et de validation hiérarchique, aussi », explique Jeune Afrique dans son enquête.

L’on se souvient des enveloppes qu’un employé de l’Asecna venait chaque mois retirer auprès d’un chef d’escale. Des millions de francs CFA, cet ancien responsable d’une compagnie locale en a vu passer beaucoup. Vraiment beaucoup. Rien, estime-t-il, n’aurait été possible sans la complicité du président de sa compagnie. On le croit sur parole. La manœuvre avait le mérite de la simplicité. L’agent de l’Asecna entrait dans l’ordinateur, faisait disparaître certaines opérations et ne facturait qu’une partie des taxes de survol à la compagnie.
En échange, il touchait une commission, le transporteur s’estimant heureux de n’avoir pas à régler l’intégralité de son dû. « C’était en somme une commission sur une non-facturation », plaisante notre homme, qui jure que ces pratiques délictueuses n’ont, jusqu’à aujourd’hui, jamais cessé. Et dire que les acteurs de ce crime économique sont toujours en poste. Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’un cas isolé, mais de plusieurs services et instances de l’Asecna.
 «La gestion pour le moins archaïque de l’agence, en particulier son informatisation encore très insuffisante, a sans nul doute favorisé ces dérives. L’insuffisance, voire l’absence, de contrôle interne et de validation hiérarchique, aussi», explique Jeune Afrique dans son enquête.
Où sont passés ces fonds ? Qui sont les responsables ? Pourquoi les directeurs généraux et les dix-sept ministres des Transports de la zone n’ont-ils pas réagi alors qu’ils étaient informés depuis des années ? À qui ont profité ces détournements ?
 
Avec JA