Officiellement Mamadou Badio Camara n’est plus président de la Cour suprême depuis le 8 février, jour de ses 68 ans. Mais en l’absence d’un Conseil supérieur de la magistrature (CSM) qui décide de la carrière des juges, il tient encore son poste. Il est enthousiaste comme au premier jour au point que certains de ses collègues le soupçonnent de manœuvrer pour obtenir un prolongement en vertu des pouvoirs de monarque dévolu au chef de l’Etat par la loi d’habilitation récemment votée pour permettre à Macky Sall de faire face au coronavirus.
En tout état de cause, une telle éventualité risque de faire trembler le temple de Thémis où le moral est désormais très bas pour ceux qui doivent quitter leur poste au bout de 65 ans, et qui rêvent d’être propulsés à la tête d’une juridiction afin d’obtenir 3 ans supplémentaires. Il y a aussi ceux qui veulent changer de cap ou qui sont en poste depuis plus de cinq ans et qui rêvent d’une promotion.
En vertu de l’article 65 de la loi organique numéro 2017- 10 du 17 janvier 2017, seuls le Procureur Général près la Cour Suprême (Cheikh T. Coulibaly), les 5 Premiers Présidents des Cours d’appel (Demba Kandj Dakar, Henry Grégoire DiopThiès, Cheikh Ndiaye Saint-Louis, Ousmane Kane Kaolack, Bassirou Sèye Ziguinchor) et leurs Procureurs Généraux (Lansané Diaby Dakar, Cheikh Tidiane Diallo Thiès Assane Ndiaye-Ziguinchor, Aly Ciré Ba Saint-Louis, Alfouseynou Diallo Kaolack), les 4 Présidents de chambres de la Cour suprême et enfin du Premier Avocat Général près la Cour Suprême, Youssoupha Mbodj, peuvent trôner à la Cour suprême.
Succession de Badio Camara : Cheikh Tidiane Coulibaly en pole position
D’après nos sources, le frère du porte-parole de la présidence de la République, Cheikh Tidiane Coulibaly, pourrait quitter le parquet général pour devenir le premier président à l’image de Badio Camara qui fut Procureur général pendant que Pape O Sakho était premier Président de la Cour suprême. Il devrait être remplacé par Demba Kandji à son poste.
Juge du siège, il devra flirter avec le parquet pour la première fois de sa carrière. D’aucuns soutiennent cependant que Badio Camara aimerait que son poulain Abdoulaye Ndiaye lui succède. Ce dernier cumule actuellement le poste de Président de chambre et de Secrétaire général de la Cour suprême. Originaire de la région de Fatick comme le chef de l’Etat, Abdoulaye Ndiaye est le frère de Cheikh Ndiaye, président de la Cour d’appel de Saint-Louis qui peut lui-même valablement devenir premier président de la cour suprême et d’Alioune Ndiaye, le président du Tribunal de commerce.
Toujours parmi les potentiels successeurs de Badio Camara, on peut citer l’actuel procureur général de la Cour d’appel de Thiès. Né en 1953, Cheikh Tidiane Diallo est également sur la short list. Son président Henry Grégoire Diop, quoique remplissant les critères, est malade mais aussi boucle ses 68 ans en juin.
Tout compte fait, le choix du premier président devrait entraîner un chamboulement au niveau des cours d’appel avec la possibilité pour certains magistrats à la veille de la retraite de bénéficier d’une rallonge s’ils sont promus procureur général ou premier président de Cour d’appel. A cela s’ajoutent ceux-là qui sont bloqués à la tête de juridictions depuis plus de 5 ans maintenant. Il en est ainsi du procureur de la République de Dakar en poste depuis plus de cinq ans. Serigne Bassirou Guèye devrait être sanctionné positivement pour le travail de titan qu’il abat à la tête du parquet de Dakar.
De même que Demba Traoré qui dirige le parquet de Tamba de main de maître depuis près d’une décennie. Ce ne serait que justice pour eux de devenir procureur général de Cour d’appel et bénéficier de fait de la rallonge de trois ans de l’âge de la retraite controversée de 68 ans. Surtout que d’après nos sources, une fois à la retraite, le magistrat qui démarre avec plus d’un million de salaire se retrouve avec des miettes d’autant que même la fameuse indemnité de judicature de 800 000 détaxés lui sera retirée. C’est d’ailleurs pourquoi de plus en plus, certains juges préfèrent rejoindre le barreau après quelques années de métiers ou l’administration centrale moins rigide et plus avantageuse.
L'As