Bamba Dièye, honorable député et passionné opposant

POLITIQUE
Vendredi 10 Aout 2018

Il apparaît clairement que l'honorable Cheikh Bamba Dieye a sacrifié ses mandats moraux sur l'autel de ses intérêts et désirs - C'est là la raison de cette paradoxale prétention d'être restaurateur de la dignité des institutions


"Lii mana nekk mooy ñoom ñu am li ñu bëgg dëkk bi takk, wala ñuñ ñu am li ñu bëgg, dëkk bi tegu ci yoon", dixit l'honorable Cheikh Bamba Dièye. 

J'ai choisi d'entamer une analyse de la communication de l'honorable  Bamba Dièye par cette fallacieuse assertion aux antipodes du canon de la décence avec laquelle il a clôturé. J'ouvre là une parenthèse pour expliquer pourquoi je la qualifie ainsi - juste parce qu'il s'est permis tout au long de son discours d'affubler le président élu par plus de la majorité de ses concitoyens de "président de l'association des malfaiteurs". Ce faisant il autorise tout autre citoyen à coller un sobriquet à n'importe lequel de ses collègues sans souci. Je relève cette anomie mais pour ma part, je m'en tiens à son titre d'honorable député par respect aux institutions qui lui seraient "si chères" et aussi pour ne pas m'écarter des motifs de mon analyse. 

Faire dans l'absolu et damner tout autre alternative que la sienne, les vouer autant qu'elles sont à l'enfer, relève d'une imposture bien connue en rhétorique. C'est de la pure chimère que cette allégation comme quoi si Macky gagnait les élections, et si seulement si, le pays s'enflammerait ; l'objectivité voudrait que l'on intègre plusieurs hypothèses dont celles-ci :

1) Macky peut bel et bien sortir vainqueur des élections avec des salves d'applaudissement et de réjouissances publiques, n'entraînant pas le moindre trouble. 
2) La victoire de l'opposition pourrait tout aussi bien créer un embrasement social, pour quelque autre motif que ce soit. 

Par conséquent cette allégation n'a aucune valeur sinon que d'être un indicateur de plus d'une pathologie qui affecte le locuteur : l'égocentrisme ! Le contenu illusoire du discours est truffé de marques d'égo qui le vicient. Je, j'ai, je... Exemple: "À l'assemblée je m'étais opposé à la levée de l'immunité" - était-il le seul ? Que d'intolérance et de surestimation de soi ! 

Et l'imposture continue en cette allégation : “Je ne vais pas répondre à la convocation car ne voulant pas leur faciliter l'exercice du même traitement infligé à un autre collègue; parce que mon interpellation n'est que le prolongement du cas Khalifa Sall”. Bon sang Khalifa Sall est attrait devant les tribunaux pour un motif donné et voilà que pour un motif bien différent lui est convoqué et, veut nous faire croire que parce qu'ils sont tous deux députés les faits constitutifs des différentes affaires ne doivent point être tenus en compte quels qu'ils soient, délictuels ou criminels peu importe, il faut juste retenir que tout cela est arbitraire et descendre dans la rue. Qu'est-ce qui empêcherait alors de voir en deux maçons qui se retrouvent au tribunal, l'un pour avoir violé une fille mineure, l'autre pour avoir volé du ciment à son patron, un complot contre la corporation des ouvriers du bâtiment. 

C'est de l'imposture encore une fois et cela n'a rien à voir avec le fait de tirer Khalifa Sall d'affaire, tout au contraire, c'est une façon de l'enterrer en même temps que Karim. Cette nouvelle initiative qui consiste à amalgamer les cas Khalifa et Karim dans une même communication soi-disant de soutien n'est pas anodine, elle relève du réalisme politique et d'un souci tactique de repositionnement personnel, face à de nouvelles candidatures troublantes. La tactique dictée par le timing consiste à prendre les devants, jouer sur les attraits émotionnels, après avoir bien assumé dans sa conscience, qu'à six mois des élections, les décisions judiciaires pour les concernés sont irréversibles et le peuple ira voter le 24 février comme d'habitude.

Il apparaît donc clairement que l'honorable Cheikh Bamba Dieye a sacrifié  ses mandats moraux sur l'autel de ses intérêts et désirs. C'est là la raison de cette paradoxale prétention d'être restaurateur de la dignité des institutions tout en les minant dans une trivialité incongrue qui dénote l'insanité.

Ce que l'honorable semble ignorer, c'est qu'en tant que société humaine nous baignons dans une culture qui nous affecte tous, au-delà de ce qui est seulement perceptible. A cette culture est inhérent un manuel de survie non édité ni édicté, qui lui est propre. Nous sommes presques tous habilités à vivre et se mouvoir à travers ses règles séculaires et lignes directrices, jusqu'à nous réaliser. Cependant le manuel n'est pas dépourvu de contraintes, il en est de celles qui s'appliquent de sorte que l'on ne puisse pas toujours faire ce que l'on veut et n'importe quoi. Alors à force de cultiver un caractère et des passions inconsistants avec le contexte, l'on finit par perdre ses repères et se heurter aux rigueurs de cette culture qui est nôtre.
Une dernière remarque qui n'honore pas davantage l'honorable député est cette autre allégation : "Si Macky Sall est courageux, je ne passerai pas la nuit chez moi."

Qu'il aille et passe une nuit non hantée par Macky Sall s'il le peut. Macky n'exerce ni le judiciaire, ni le législatif et quotidiennement les centaines d'agents compétents de ces institutions respectables le prouvent par leurs diligences dans leurs activités respectives.

IBE NIANG ARDO, éditorialiste seneplus