«Khalifa sera bien présent pour la présidentielle de 2019. Nous n’avons pas entendu le droit aujourd’hui. Nous avons vu des magistrats prostitués qui ont accepté de baisser leurs pantalons pour satisfaire certaines personnes.» «Je reprends Trump, c'est une justice de merde».
Voilà les propos considérés de vocabulaire scatologique et licencieux par le Procureur de la République qui valent au maire de Mermoz et lieutenant fidèle de Khalifa Sall sa comparution aujourd’hui au tribunal des flagrants délits. Nous osons croire que ces 6 mois avancés dans les officines du palais de justice ne lui seront pas appliquées parce que cela procèderait encore de la mise à nu d’une justice à géométrie variable. Parce que rien d’insultant et de sordide ne se trouve dans le texte émis dans un contexte social tendu où l’émotion créée par la condamnation de Khalifa Sall a laissé déborder chez Dias la lave d’une rancœur vindicative mal ou difficilement contenable. Dans ce cas-ci, l’exigence contextuelle et la densité émotionnelle voudraient que l’on sauve l’esprit de ses propos plutôt que se focaliser sur la littéralité apparente de certains mots jugés outrageants.
Après le procès de Khalifa Sall, place à la paranoïa de l’autorité judiciaire. Inquiet de tout ce qui se dit, de tout ce qui bouge, elle est prête à user du marteau-pilon de son pouvoir de répression pour écraser la liberté d’expression de toutes ces têtes de gondole comme Barthélémy Dias que sont ceux et celles qui ne partagent leurs décisions de justice. Ou tout cela ne serait-il qu’une stratégie de diversion hautement pensé par la camarilla présidentielle pour déplacer l’axe de la contestation sur la nouvelle affaire Dias ?
Nous nous indignons de cette indignation sélective de Serigne Bassirou Guèye et de cette bronca de l'ensemble de l'institution judiciaire à travers sa structure syndicale l’Union des magistrats du Sénégal (UMS), formalisée par les propos « outrageants ». Pourtant des propos gravissimes, humiliants et rabaissants ont toujours été débités contre les magistrats sans que l’un d’eux ne moufte mot.
Le 26 mars 2018, dans une missive cathartique, le parquetier Ibrahima Hamidou Dème quittait avec fracas le Conseil supérieur de la magistrature en ces termes : « une justice qui a perdu sa crédibilité et son autorité, qui ne joue plus son rôle de gardienne des libertés individuelles, de régulateur social et d'équilibre des pouvoirs, fragilisée, voire malmenée de l'intérieur comme de l’extérieur, qui a démissionné, qui a une culture de soumission ». Le 29 mars 2018, Souleymane Teliko, président de l’UMS, n’avait-il déclaré que «personne ne peut contester, aujourd’hui, le manque d’indépendance de la justice. Tout le monde sait que quand l’exécutif a la mainmise sur la carrière d’un magistrat, indirectement, il a une mainmise sur le fonctionnement de la justice» ?
Quelle différence de fond y a-t-il entre les propos de Barth et ceux des magistrats Dème et Téliko, lesquels dénoncent avec un ton et des outils linguistiques différents la soumission de la justice au pouvoir exécutif ?
Et où était l’UMS quand le président Abdoulaye Wade, clef de voute des institutions, flétrissait sans aménités, à l’occasion du 53e congrès de l’Union internationale des magistrats (UIM) tenus à Dakar le 06 novembre 2010, la culture voire le culte de la soumission des magistrats ? «Les juges ne veulent pas s’affranchir de la tutelle de l’Exécutif. On peut tout faire pour que le magistrat soit indépendant mais, psychologiquement, les magistrats ne veulent pas être indépendants, c’est comme des esclaves. On les libère, ils font 200 mètres et ils reviennent pour dire : je ne sais où aller», avait-il raillé.
Dans le livre «Un président ne devrait pas dire ça» des journalistes d'investigation Gérard Davet et Fabrice Lhomme, François Hollande, alors président français, y a confessé la lâcheté de la justice française : «Cette institution, qui est une institution de lâcheté… Parce que c’est quand même ça, tous ces procureurs, tous ces hauts magistrats, on se planque, on joue les vertueux… On n’aime pas le politique. La justice n’aime pas le politique …». L’autorité judiciaire française incarnée par le premier président de la Cour de cassation et le procureur général ont dû obliger le président François Hollande à s'excuser dans une lettre adressée aux magistrats.
Où était l’UMS, quand, en 2011, le procureur de la République Ousmane Diagne, avait avoué, lors de la publication de deux réquisitoires sur l’affaire Bara Tall, qu’il y a eu des pressions dans ledit dossier ? La Gazette dirigée par Abdoulatif Coulibaly avait écrit ceci : «Le parquet du tribunal régional hors classe de Dakar a sorti deux réquisitoires pour le patron de Jean Lefebvre Sénégal. Le premier substitut du procureur de la République, Ibrahima Ndoye, avait dans son réquisitoire définitif du 26 avril 2010 demandé un non-lieu total contre les prévenus. Ensuite, Ousmane Diagne, procureur de la République, a ordonné le 1er juillet 2010 au juge d’instruction du 2e cabinet de renvoyer Bara Tall et ses coaccusés au tribunal régional hors classe de Dakar statuant en matière correctionnelle pour y être jugés conformément à la loi».
Quelle a été la réaction de l’UMS, à part un communiqué de principe, quand Moustapha Diop, l’alors ministre délégué auprès du ministre de la Femme, de l'Enfant et de la Famille, chargé de la Microfinance et de l'Economie solidaire, a tenu des propos injurieux à l’endroit des magistrats de cette chambre les traitant de « petits magistrats de rien du tout» et qualifié la Cour des comptes de «Cour de règlement des comptes» ?
Où étaient le procureur de la République et l’UMS quand le député vice-président de l’Assemblée nationale et président du Parlement de la Cedeao, Moustapha Cissé Lo, martelait le 23 décembre 2013 avec amertume que «Macky Sall a la possibilité d’emprisonner qui il veut. Il suffit juste que l’envie l’en démange, qu’il saisisse le procureur de la République qui t’arrête » avant d’ajouter le 09 mars 2018 à Diourbel que « les magistrats ne jugent pas équitablement et dans leur intime conviction, qu’ils font n'importe quoi et que les juges ne rendent pas les décisions correctement» ?
Aujourd’hui on poursuit Barthélémy Dias du délit d’outrages à magistrat. Si l’outrage est défini juridiquement comme le «délit par lequel on met en cause l'honneur d'un personnage officiel dans ses fonctions», on pourrait alors accuser ce même procureur de la République d’avoir manqué de respect à l’institution judiciaire qu’il incarne puisqu’il s’était autorisé à des critiques sur une décision rendue par ses collègues juges dans l’affaire d’Aïda Ndiongue. En effet, il avait qualifié la décision de relaxe de l’ex-sénatrice libérale et Cie, «d’illégale et même troublante». L’UMS (dirigée par Abdoul Aziz Seck), dans sa célérité légendaire à produire des communiqués de principe, avait estimé que «si la loi, notamment le Code de procédure pénale en ses articles 483 et suivants, reconnait au procureur de la République la faculté de faire appel contre les jugements rendus en matière correctionnelle, elle ne lui reconnaît nullement le droit de commenter par voie de presse, une décision de justice, en employant notamment des termes de nature à porter atteinte à l’honorabilité des magistrats ayant rendu la décision et à jeter le discrédit sur l’institution judiciaire».
C’est donc dire que l’UMS, avant de s’indigner des propos anodins d’un simple justiciable au point de traduire le traduire devant une juridiction de jugement doit balayer devant la porte du palais de justice salie impunément par ces multiples attaques sus-évoquées contre les magistrats.
Après la condamnation de Karim Wade, ses partisans en l’occurrence Toussaint Manga, Cheikh Sène, Moussa Mané, Serigne Abo Mbacké Thiam et Abdourahmane Ly ont été placés en détention préventive pendant onze mois pour troubles à l’ordre public avant d'être libérés. Il faut éviter la répétition de l’histoire qui risque de se muer en tragédie. Dans ce climat tendu par la condamnation du maire de Dakar, il ne faut pas que le procureur de la République en rajoute une louche d’huile sur le feu en donnant asymétriquement aux peccadilles du maire de Mermoz, exaspéré par le sort de son mentor, une gravité qu’elles n’ont pas. Il est inutile vouloir jouer aux prolongations du procès en faisant emprisonner inutilement Dias fils.
Quant au délit relatif à l’appel de Dias à l’insurrection non suivi d’effet, il convient de rappeler que le candidat Macky Sall avait appelé à juste raison en 2011 les forces de défense et de sécurité à se ranger du côté du peuple quand le président a voulu imposer son projet de loi scélérate du 23 juin. Pourtant, l’alors procureur de la République, Ousmane Diagne, n’avait pas convoqué celui qui allait être aujourd’hui le patron de cette magistrature.
Le magistrat, plus précisément le Procureur qui représente la société, doit jouer le rôle qui est le sien fondamentalement dans la société c’est-à-dire apaiser la société surtout en cette veille du vote du projet de loi controversé sur le parrainage, lequel risque de plonger le pays dans l’embrasement du 23 juin 2011. Autrement dit, plutôt que de jouer au pyromane, Serigne Bassirou Guèye serait mieux inspiré d’être un sapeur-pompier…
Serigne Saliou Guèye
Voilà les propos considérés de vocabulaire scatologique et licencieux par le Procureur de la République qui valent au maire de Mermoz et lieutenant fidèle de Khalifa Sall sa comparution aujourd’hui au tribunal des flagrants délits. Nous osons croire que ces 6 mois avancés dans les officines du palais de justice ne lui seront pas appliquées parce que cela procèderait encore de la mise à nu d’une justice à géométrie variable. Parce que rien d’insultant et de sordide ne se trouve dans le texte émis dans un contexte social tendu où l’émotion créée par la condamnation de Khalifa Sall a laissé déborder chez Dias la lave d’une rancœur vindicative mal ou difficilement contenable. Dans ce cas-ci, l’exigence contextuelle et la densité émotionnelle voudraient que l’on sauve l’esprit de ses propos plutôt que se focaliser sur la littéralité apparente de certains mots jugés outrageants.
Après le procès de Khalifa Sall, place à la paranoïa de l’autorité judiciaire. Inquiet de tout ce qui se dit, de tout ce qui bouge, elle est prête à user du marteau-pilon de son pouvoir de répression pour écraser la liberté d’expression de toutes ces têtes de gondole comme Barthélémy Dias que sont ceux et celles qui ne partagent leurs décisions de justice. Ou tout cela ne serait-il qu’une stratégie de diversion hautement pensé par la camarilla présidentielle pour déplacer l’axe de la contestation sur la nouvelle affaire Dias ?
Nous nous indignons de cette indignation sélective de Serigne Bassirou Guèye et de cette bronca de l'ensemble de l'institution judiciaire à travers sa structure syndicale l’Union des magistrats du Sénégal (UMS), formalisée par les propos « outrageants ». Pourtant des propos gravissimes, humiliants et rabaissants ont toujours été débités contre les magistrats sans que l’un d’eux ne moufte mot.
Le 26 mars 2018, dans une missive cathartique, le parquetier Ibrahima Hamidou Dème quittait avec fracas le Conseil supérieur de la magistrature en ces termes : « une justice qui a perdu sa crédibilité et son autorité, qui ne joue plus son rôle de gardienne des libertés individuelles, de régulateur social et d'équilibre des pouvoirs, fragilisée, voire malmenée de l'intérieur comme de l’extérieur, qui a démissionné, qui a une culture de soumission ». Le 29 mars 2018, Souleymane Teliko, président de l’UMS, n’avait-il déclaré que «personne ne peut contester, aujourd’hui, le manque d’indépendance de la justice. Tout le monde sait que quand l’exécutif a la mainmise sur la carrière d’un magistrat, indirectement, il a une mainmise sur le fonctionnement de la justice» ?
Quelle différence de fond y a-t-il entre les propos de Barth et ceux des magistrats Dème et Téliko, lesquels dénoncent avec un ton et des outils linguistiques différents la soumission de la justice au pouvoir exécutif ?
Et où était l’UMS quand le président Abdoulaye Wade, clef de voute des institutions, flétrissait sans aménités, à l’occasion du 53e congrès de l’Union internationale des magistrats (UIM) tenus à Dakar le 06 novembre 2010, la culture voire le culte de la soumission des magistrats ? «Les juges ne veulent pas s’affranchir de la tutelle de l’Exécutif. On peut tout faire pour que le magistrat soit indépendant mais, psychologiquement, les magistrats ne veulent pas être indépendants, c’est comme des esclaves. On les libère, ils font 200 mètres et ils reviennent pour dire : je ne sais où aller», avait-il raillé.
Dans le livre «Un président ne devrait pas dire ça» des journalistes d'investigation Gérard Davet et Fabrice Lhomme, François Hollande, alors président français, y a confessé la lâcheté de la justice française : «Cette institution, qui est une institution de lâcheté… Parce que c’est quand même ça, tous ces procureurs, tous ces hauts magistrats, on se planque, on joue les vertueux… On n’aime pas le politique. La justice n’aime pas le politique …». L’autorité judiciaire française incarnée par le premier président de la Cour de cassation et le procureur général ont dû obliger le président François Hollande à s'excuser dans une lettre adressée aux magistrats.
Où était l’UMS, quand, en 2011, le procureur de la République Ousmane Diagne, avait avoué, lors de la publication de deux réquisitoires sur l’affaire Bara Tall, qu’il y a eu des pressions dans ledit dossier ? La Gazette dirigée par Abdoulatif Coulibaly avait écrit ceci : «Le parquet du tribunal régional hors classe de Dakar a sorti deux réquisitoires pour le patron de Jean Lefebvre Sénégal. Le premier substitut du procureur de la République, Ibrahima Ndoye, avait dans son réquisitoire définitif du 26 avril 2010 demandé un non-lieu total contre les prévenus. Ensuite, Ousmane Diagne, procureur de la République, a ordonné le 1er juillet 2010 au juge d’instruction du 2e cabinet de renvoyer Bara Tall et ses coaccusés au tribunal régional hors classe de Dakar statuant en matière correctionnelle pour y être jugés conformément à la loi».
Quelle a été la réaction de l’UMS, à part un communiqué de principe, quand Moustapha Diop, l’alors ministre délégué auprès du ministre de la Femme, de l'Enfant et de la Famille, chargé de la Microfinance et de l'Economie solidaire, a tenu des propos injurieux à l’endroit des magistrats de cette chambre les traitant de « petits magistrats de rien du tout» et qualifié la Cour des comptes de «Cour de règlement des comptes» ?
Où étaient le procureur de la République et l’UMS quand le député vice-président de l’Assemblée nationale et président du Parlement de la Cedeao, Moustapha Cissé Lo, martelait le 23 décembre 2013 avec amertume que «Macky Sall a la possibilité d’emprisonner qui il veut. Il suffit juste que l’envie l’en démange, qu’il saisisse le procureur de la République qui t’arrête » avant d’ajouter le 09 mars 2018 à Diourbel que « les magistrats ne jugent pas équitablement et dans leur intime conviction, qu’ils font n'importe quoi et que les juges ne rendent pas les décisions correctement» ?
Aujourd’hui on poursuit Barthélémy Dias du délit d’outrages à magistrat. Si l’outrage est défini juridiquement comme le «délit par lequel on met en cause l'honneur d'un personnage officiel dans ses fonctions», on pourrait alors accuser ce même procureur de la République d’avoir manqué de respect à l’institution judiciaire qu’il incarne puisqu’il s’était autorisé à des critiques sur une décision rendue par ses collègues juges dans l’affaire d’Aïda Ndiongue. En effet, il avait qualifié la décision de relaxe de l’ex-sénatrice libérale et Cie, «d’illégale et même troublante». L’UMS (dirigée par Abdoul Aziz Seck), dans sa célérité légendaire à produire des communiqués de principe, avait estimé que «si la loi, notamment le Code de procédure pénale en ses articles 483 et suivants, reconnait au procureur de la République la faculté de faire appel contre les jugements rendus en matière correctionnelle, elle ne lui reconnaît nullement le droit de commenter par voie de presse, une décision de justice, en employant notamment des termes de nature à porter atteinte à l’honorabilité des magistrats ayant rendu la décision et à jeter le discrédit sur l’institution judiciaire».
C’est donc dire que l’UMS, avant de s’indigner des propos anodins d’un simple justiciable au point de traduire le traduire devant une juridiction de jugement doit balayer devant la porte du palais de justice salie impunément par ces multiples attaques sus-évoquées contre les magistrats.
Après la condamnation de Karim Wade, ses partisans en l’occurrence Toussaint Manga, Cheikh Sène, Moussa Mané, Serigne Abo Mbacké Thiam et Abdourahmane Ly ont été placés en détention préventive pendant onze mois pour troubles à l’ordre public avant d'être libérés. Il faut éviter la répétition de l’histoire qui risque de se muer en tragédie. Dans ce climat tendu par la condamnation du maire de Dakar, il ne faut pas que le procureur de la République en rajoute une louche d’huile sur le feu en donnant asymétriquement aux peccadilles du maire de Mermoz, exaspéré par le sort de son mentor, une gravité qu’elles n’ont pas. Il est inutile vouloir jouer aux prolongations du procès en faisant emprisonner inutilement Dias fils.
Quant au délit relatif à l’appel de Dias à l’insurrection non suivi d’effet, il convient de rappeler que le candidat Macky Sall avait appelé à juste raison en 2011 les forces de défense et de sécurité à se ranger du côté du peuple quand le président a voulu imposer son projet de loi scélérate du 23 juin. Pourtant, l’alors procureur de la République, Ousmane Diagne, n’avait pas convoqué celui qui allait être aujourd’hui le patron de cette magistrature.
Le magistrat, plus précisément le Procureur qui représente la société, doit jouer le rôle qui est le sien fondamentalement dans la société c’est-à-dire apaiser la société surtout en cette veille du vote du projet de loi controversé sur le parrainage, lequel risque de plonger le pays dans l’embrasement du 23 juin 2011. Autrement dit, plutôt que de jouer au pyromane, Serigne Bassirou Guèye serait mieux inspiré d’être un sapeur-pompier…
Serigne Saliou Guèye