Comme nous l’écrivions dans notre avant-dernière édition, le déjà ex-député Seydina Fall alias Bougazelli a bel et bien été démissionné par le pouvoir. Un pouvoir qui n’a pas ménagé sa peine pour, à défaut d’extirper cet élément central de l’Alliance Pour la République (APR) des griffes des gendarmes, à tout le moins essayer de lui sauver la face. Et se protéger lui-même en tant que pouvoir. Aussitôt la nouvelle de l’arrestation du député connue, des secteurs du pouvoir ont donc tenté de manœuvrer pour tirer le «frère» Bougazelli d’affaire. Hélas, quand les éléments du dossier leur ont été communiqués — notamment la vidéo de l’arrestation la main…dans le sac de faux billets de banque du tonitruant député ! —, on a compris que les carottes étaient cuites. Il n’était tout simplement pas possible, malgré la meilleure volonté du monde, d’éviter la prison au député de Guédiawaye. Comme l’ont écrit fort justement nos confrères d’«Enquête» dans leur édition d’hier, les gendarmes de la Section de Recherches, sachant qu’ils avaient affaire à un gros morceau du régime en place, avaient pris toutes leurs dispositions.
Toutes leurs précautions aussi. C’est ainsi qu’ils ont filmé toute la scène de l’arrestation, notamment le moment où le député-voyou remettait à son complice la mallette remplie de faux billets. Pris la main dans le sac, il ne pouvait plus nier et nul ne pouvait plus voler à son secours au risque de se faire lyncher par l’opinion et les médias ! Il s’y ajoute qu’aussitôt après l’avoir conduit dans leurs locaux, à Colobane, les gendarmes ont tourné une deuxième vidéo au cours de laquelle ils ont étalé devant le propagandiste d’un troisième mandat du président de la République les preuves accablantes dont ils disposaient.
On peut y voir le député écarquillant gros les yeux, mais aussi le visage décomposé. Après quoi, pour ne pas offrir la faille qui avait permis au chanteur Thione Seck — le non-respect du Règlement numéro 5 de l’Uemoa relatif à la présence de l’avocat dès la garde à vue —, les pandores ont demandé à Bougazelli s’il avait un avocat. «Oui, Me Assane Dioma Ndiaye» a-t-il répondu.
Joint par les pandores, le droit-de-l’hommiste, visiblement pas très chaud pour défendre un tel client surtout pour une telle cause, a demandé un temps de réflexion. Les défenseurs de Bougazelli au sein du pouvoir ont sauté sur l’occasion pour demander au procureur de le faire libérer sur convocation jusqu’au lendemain. Après quoi, le pouvoir lui-même a organisé la disparition de l’encombrant député ! Cette disparition, il la fallait pendant une durée de trois jours au moins pour faire disparaître la flagrance et tout ce qui s’y rattachait en termes de procédure. Pour cause, cela aurait fait mauvais effet de voir les gendarmes débouler à l’Assemblée nationale avec un «honorable» député du parti au pouvoir menottes au main pour perquisitionner son bureau ! Maintenant qu’il ne l’est plus, c’est autre chose… Bougazelli planqué dans un lieu sûr — comme jadis Abdoulaye Baldé lorsque le procureur de la Crei Alioune Ndao avait voulu le faire arrêter —, le pouvoir, en rapport avec la présidence de l’Assemblée nationale, pouvait donc organiser la «démission» de Seydina Fall puis la reddition honorable… de l’ex-honorable.
Entretemps, et vu la gravité des faits — le trafic de fausse monnaie étrangère est considérée comme un crime —, même les plus chauds partisans du député de Guédiawaye au sein du pouvoir s’étaient fait à l’idée qu’il n’était pas possible de juger Bougazelli en flagrant délit comme un vulgaire voleur de poulets ou un fumeur de cornets de chanvre indien. Comme Thione Seck ou Ngaka Blin D, il fallait absolument qu’il se prépare à un long séjour à Rebeuss. Car, et c’est bien entendu, le tonitruant député de Guédiawaye et ex-simbkat Seydina Fall Bougazelli ne peut pas échapper au mandat de dépôt…